préf. Gabriel de Broglie, introduction Yann Sordet,
Paris, Éditions des Cendres, Bibliothèque Mazarine, 2012,
195 p., ill. 35 euros.
ISBN 979-10-90853-01-0 / 978-2-86742-194-5
Il y a quelques semaines sortait le Catalogue des Imitatio Christi conservées dans les principales bibliothèques parisiennes. L’exposition inaugurée hier soir à la Bibliothèque Mazarine présente une série d'exemplaires remarquables de l'Imitatio, et elle est accompagnée d’un catalogue co-édité par la Bibliothèque Mazarine et par les Éditions des Cendres.
Le titre du catalogue peut surprendre, en ce qu’il met l’accent sur la perspective d’histoire économique du livre: l’Imitatio est d’abord envisagée comme «un succès de librairie européen», voire mondial. Elle a été constituée en tant que recueil de quatre textes vers 1427, et nous en conservons quelque 800 manuscrits. Mais la typographie en caractères mobiles fait passer sa diffusion à un autre niveau, à partir de la première édition, à Augsbourg probablement en 1470 (édition princeps, réalisée du vivant de l’auteur): nous sommes à 74 éditions connues pour le XVe siècle, mais à 329 pour le XVIe, à 810 pour le XVIIe et à 1084 pour le XVIIIe…
Même si les chiffres de tirage moyen sont nécessairement de l’ordre de l’hypothèse et même si ceux retenus par Yann Sordet paraissent très (trop?) prudents, ce sont bien évidemment plusieurs millions (peut-être quatre à cinq millions) d’exemplaires du texte qui sont mis en circulation au cours de la période. Le tableau de la p. 107 donne des éléments tangibles sur lesquels appuyer les évaluations (tirage des Imitatio de Plantin entre 1598 et 1645).
Mais l’exposition ne se borne pas à souligner le rôle de l’Imitatio comme idéaltype du succès de librairie: l’essentiel réside bien évidemment ailleurs, dans l’histoire des sensibilités religieuses (à commencer par la devotio moderna), dans la réception du texte (largement diffusé dans les différentes langues vernaculaires), dans la problématique de son attribution (cf. p. 13 et suiv. du catalogue, mais aussi la notice 17, p. 101 et suiv.), dans l’étude de sa mise en livre, et notamment de son illustration.
Imitatio Christi en breton, Quimper, 1743 (notice n° 30, exemplaire de l'Arsenal) |
La notice consacrée à l’adaptation de l’Imitatio par Pierre Corneille en 1656 (n° 24 a et b) effectue un rapprochement avec un remarquable manuscrit réalisé pour le duc de Bourgogne Philippe le Bon en 1462 et aujourd’hui conservé à Valenciennes. Mentionnons encore une édition en arabe sortie de presses de la Congrégation De Propaganda Fide en 1663 (n° 27), celle donnée par l’Imprimerie de Monsieur à Paris en 1788 (n° 32) et celle de Bodoni à Parme cinq ans plus tard (n° 33).
La série se referme avec la seconde Imitatio de Curmer (1856, n° 35), qui fonctionne comme une proclamation des capacités techniques des «arts du livre» sous le Second Empire. Ajoutons que les exemplaires présentés sont tous exceptionnels non seulement du point de vue de l'histoire éditoriale et de la trajectoire du texte, mais aussi par leurs particularités, notamment s’agissant des reliures.
Le catalogue est à la fois un modèle d’érudition par ses notices savantes établies par les meilleurs spécialistes, et une belle démonstration de pédagogie, par les analyses plus générales et les tableaux d’ensemble permettant de contextualiser un certain nombre de phénomènes important. Il est enfin un livre parfaitement réussi sur le plan matériel, et remarquablement illustré. Il se referme sur la bibliographie et sur l’index.
Merci pour ce post et en particulier pour la photo de l'édition bretonne, exemplaire de l'Arsenal, qui porte l'ex-libris de Jean-François de Miniac, un des bienfaiteurs de la bibliothèque de Rennes au XVIIIe s. Pour info j'au une petite page qui lui est dédié :
RépondreSupprimerhttps://sites.google.com/site/jeanfrancoisdeminiac/
jean luc deuffic
Merci à vous!
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