samedi 28 février 2015

Conférences d'histoire du livre

École pratique des hautes études, IVe section
Conférence d'histoire et civilisation du livre

Lundi 2 mars 2015
14h-16h
Histoire de l’édition pédagogique au XVIIIe siècle (1)
Les Frères des Écoles chrétiennes et la librairie française au XVIIIe siècle
par
Madame Emmanuelle Chapron,
chargée de conférences à l’EPHE,
maître de conférences à l’Université d’Aix-Marseille,
membre de l’Institut universitaire de France (junior)
Les Frères des Écoles chrétiennes sont, avant la Révolution, la principale congrégation masculine consacrée à l’enseignement des enfants pauvres. Répandues dans une centaine de villes, leurs écoles ont constitué un marché de niche pour la librairie française, car la pédagogie des Frères repose sur l’utilisation d’un matériel scolaire strictement homogène. Comment ces petites brochures scolaires aujourd’hui largement disparues ont-elles été produites, de Rouen à Avignon, en dizaines de milliers d’exemplaires? Comment les frères «ignorantins» en organisaient-ils la distribution auprès de leurs trente-six mille élèves? C’est à cette entreprise particulièrement originale que l’on consacrera cette séance.

16h-18h
Histoire des corporations du livre (2)
par
Monsieur Jean-Dominique Mellot,
conservateur général à la Bibliothèque nationale de France

Nota: La conférence régulière d'Histoire et civilisation du livre a lieu tous les lundis à l'École pratique des hautes études, de 16h à 18h. (190 avenue de France, 75013 Paris, 1er étage, salle 115). Le secrétariat de la IVe Section se situe dans les mêmes locaux.
 
Accès les plus proches (250 m à pied)
Métro: ligne 6 (Nation-Pte Dauphine), station Quai de la Gare.
Bus 89, arrêt Quai de la Gare (cette ligne dessert notamment la Gare Montparnasse, puis elle passe rue de Rennes et place du Luxembourg).
Accès un petit peu plus éloignés: Métro: ligne 14, station Bibliothèque François Mitterrand. RER ligne C, station Bibliothèque François Mitterrand. Bus: 62 et 64 (arrêt Bibliothèque François Mitterrand Avenue de France) et 64.

Calendrier des conférences (attention: les sujets à jour des conférences et les éventuelles modifications sont régulièrement annoncés sur le blog. N'oubliez pas, comme disent les informaticiens, de «rafraîchir» la page du calendrier quand vous la consultez).

jeudi 26 février 2015

La rentrée littéraire

La prochaine journée d’études organisée par la Bibliothèque nationale sur la «rentrée littéraire» nous donne l’occasion d’évoquer cette pratique en effet bien parisienne… et assez particulière. Le jeune Pierre Benoît revient sur son premier grand succès, le roman de Kœnigsmark, et sur sa quête de la reconnaissance –de fait, il n’a pas de fortune personnelle, ni de prébende administrative, de sorte que, s’il veut se consacrer à l’écriture, il lui faudra vivre de sa plume. Kœnigsmark sort… le 11 novembre 1918 –une telle date ne s’invente pas, pour un roman «germanique», voire germanophile.
Et notre jeune auteur, monté à Paris (selon la meilleure tradition française), d’entreprendre de se faire connaître. Quel meilleur moyen pour cela que de candidater à un prix littéraire, par exemple le Goncourt, inauguré quelques années plus tôt. Pierre Benoît reviendra sur cet épisode:
Quelle journée! Je la passai à déposer mon livre chez les membres de l’Académie Goncourt (…), les frères Rosny, Léon Daudet, Paul Margueritte, Élémir Bourges, Lucien Descaves, Gustave Geffroy, Henry Céard, Léon Hennique. (…) Je n’avais pas d’argent pour prendre un taxi, et ils habitaient tous dans des arrondissements différents! À partir de ce moment-là, les Français allaient tout de même reprendre le droit de se nourrir d’autre chose que de littérature héroïque. Ils ne s’en privèrent point. Et la chance de Koenigsmark a été de profiter de ces circonstances…
Gustave Geffroy, président de l'Académie Goncourt, par Paul Cézanne (coll. part.)
Il faut, en effet, «déposer» son livre, sinon faire des visites auprès des membres d’une «académie» quelque peu conservatrice: les noms cités par Pierre Benoît sont ceux des titulaires des différents «fauteuils» de l’Académie Goncourt en 1918, de Léon Daudet (1er fauteuil) à Lucien Descaves (10e fauteuil). L’Académie est alors présidée par Gustave Geffroy (8e fauteuil).
Il resterait à rechercher dans les annuaires de l’époque les adresses des différents jurés, pour retracer la carte des pérégrinations parisiennes de notre jeune provincial qui se lance dans les lettres.
On sait que Koenigsmark manquera de peu le Goncourt, avec 4 suffrages sur 10, face à Civilisation, de Georges Duhamel. Nous sommes effectivement au sortir de la Guerre, et le choix des jurés va vers ce récit poignant du quotidien d’un hôpital de campagne. Duhamel n’a pas souhaité publier sous son nom, mais sous le pseudonyme de Denis Thévenin. La cuvée des candidats au Goncourt de 1918 est d’ailleurs déjà prometteuse, puisque nous y trouvons aussi les noms d’André Maurois et de Jean Giraudoux…
Le Goncourt, aujourd'hui reconnu par tous, a pourtant commencé petitement, et sa notoriété ne s’est construite que très progressivement. Le premier lauréat a été John Antoine Nau, pour un roman assez étrange, Force ennemie, édité à compte d’auteur à Paris en 1903, et pour lequel Nau n'a apparemment fait aucune visite. Il s’agit de science fiction: le poète Veuly, après un temps d’égarement, se réveille à l’asile de Vassetot. Cherchant à échapper aux traitements qu’on lui fait subir, il se rend progressivement compte qu’il est habité par l’«esprit» néfaste d’un extra-terrestre qui a fui sa planète d’origine… Le Goncourt n’a encore aucun effet médiatique, et le médiocre succès de Force ennemie est comme résumé par la note peu amène portée par Eugène Pierre sur la page de garde de son exemplaire (auj. Bibliothèque de l'Institut de France):
C’est après avoir lu ce livre que l’on peut dire avec plus de vérité encore que Louis XIV devant les tableaux hollandais: Ôtez de ma vue ces affreux magots!
Il n’en sera déjà plus de même quelques années plus tard, quand le Goncourt sera devenu l'un des événements...  de la rentrée littéraire.

lundi 23 février 2015

La rentrée littéraire

Les Ateliers du livre
Le phénomène de la "rentrée littéraire"
Bibliothèque nationale de France - site François Mitterrand,
Petit auditorium

En partenariat avec l'Université de Paris-Ouest Nanterre-La-Défense

Mardi 10 mars 2015, 14h-20h
Entrée libre
Dans le cadre de ses Ateliers du livre, inaugurés en 2002, la Bibliothèque nationale de France consacre une session annuelle à l'histoire du livre et son univers contemporain.
L'après-midi d'étude du 10 mars, organisé en partenariat avec l'Université de Paris Ouest Nanterre La Défense, sera consacré au phénomène de la rentrée littéraire. Comment ce phénomène s'est-il imposé dans le monde de l'édition et de la librairie au point de devenir un événement incontournable, objet de promotions médiatiques de grande ampleur ? Quelles espérances collectives porte-t-il ? Et en quoi est-il au service de l'écrivain et de la littérature contemporaine ? Telles sont quelques-unes des questions qui seront abordées au cours de cette demi-journée qui mêlera communications, présentations interactives et table ronde animée par des universitaires et des professionnels du monde du livre.
 

14h Ouverture

14h10 La rentrée littéraire : origines et développement d’un phénomène (XIXe-XXe siècles)
Aux origines du phénomène de la rentrée littéraire
Jean-Yves Mollier, professeur d’histoire contemporaine, Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines
L'intensification de la vie du livre au XXe siècle
Olivier Bessard-Banquy, professeur à l'Université de Bordeaux-Montaigne, en charge des cours de bibliologie et d'édition au sein du Pôle des métiers du livre

15h La rentrée littéraire : approche socio-économique
Bertrand Legendre, professeur en sciences de l’information et de la communication, Université de Paris XIII (Sorbonne Paris Cité), responsable du master Politiques éditoriales et directeur du LabSIC/Labex ICCA

15h30 Questions

15h45 Rentrée littéraire : quand le marketing éditorial raconte des histoires et rêve de grands écrivains
Sylvie Ducas, maître de conférences HDR en Littérature française et en Sciences de l'Information-Communication, chercheuse au Centre des Sciences de la Littérature française (CSLF) de l’Université Paris Ouest Nanterre La Défense et directrice du master Métiers du livre de Saint-Cloud

16h15 Quelques rentrées littéraires emblématiques
Pierre Jourde, écrivain, critique littéraire, professeur à l'Université Grenoble III

16h45 Intervention des étudiantes du master des Métiers du livre de l’Université Paris-Ouest Nanterre-La-Défense

17h00 Questions 

17h30 Table ronde : la rentrée littéraire de septembre 2014 et janvier 2015
Animation : Olivier Bessard-Banquy
Avec Joy Sorman, écrivain, auteur de La Peau de l’Ours paru en septembre 2014 aux éditions Gallimard ; Jean-Noël Orengo, romancier, auteur de La Fleur du Capital paru en janvier 2015 aux Éditions Grasset, co-fondateur de la plateforme en ligne D-Fiction ; Thomas Simmonet, éditeur de l'Arbalète/Gallimard ; Anaïs Massola, co-gérante de la librairie «Le Rideau rouge» ; Marie-Christine Jacquinet, conservateur, directrice de la bibliothèque départementale des Yvelines, professeur associé à l’université de Paris Ouest Nanterre La Défense ; Oriane Jeancourt, rédactrice en chef Littérature au magazine Transfuge ; Silvana Bergonzi, chargée de communication Éditions J’ai lu

Communiqué par Marie Galvez, chargée de collections en Histoire du livre (Département Littérature et art).

dimanche 15 février 2015

Histoire du livre et modèle politique

Le problème de la forme et de la pratique du Gouvernement est aujourd’hui à l’ordre du jour, dans un environnement politique où le rôle des médias de masse est devenu central. En France, le débat public revient périodiquement sur la question de la Constitution (devons-nous passer à la VIe République?), tout comme sur celle du périmètre d’une décentralisation éventuellement souhaitable: notre système parfois décrit comme celui d'une «monarchie républicaine» donne au Président de la République des pouvoirs bien plus grands qu’à beaucoup de ses homologues dans les autres démocraties occidentales.
Ces problèmes ont déjà été agités au cours de l’histoire, notamment à propos du Saint-Empire et dans les pays germanophones à partir du XVIIe siècle. La rationalité administrative est gage d’un progrès que l’on assimile à un «vivre mieux» dont bénéficiera le plus grand nombre, et son cadre privilégié de mise en œuvre serait celui de la collectivité autonome (une ville libre) ou, de plus en plus souvent, de la principauté territoriale. Dans une logique qui est celle du contrat, ceux qui sont en charge des affaires, à commencer par le prince, jouiront de privilèges parfois très étendus, mais ils auront en retour à remplir un certain nombre d’obligations. L’objectif central de l’État est celui de mettre en œuvre la politique rationnelle la plus favorable au bien commun.
Dans cette conjoncture, le statut du Saint-Empire fait débat: le Saint-Empire ne correspond pas au modèle d’un État moderne, et le pouvoir réel de l’Empereur vient avant tout de son contrôle sur un ensemble très étendu de territoires «héréditaires» soumis à la Maison de Habsbourg (Autriche, royaumes de Bohème et de Hongrie, etc.) –en somme, sur une réunion de principautés territoriales. Dès 1667, le cas du Saint-Empire est discuté par Pufendorf, et sa critique atteindra son apogée avec Hegel au tout début du XIXe siècle: «l’Allemagne n’est plus un État», parce que le Saint-Empire ne se résout dans aucune catégorie rationnelle et que ce qui ne peut être décrit par un concept ne saurait exister. Une variante très intellectualisée –très allemande– de l'aphorisme français selon lequel «ce qui se conçoit bien s'énonce clairement».
Ces considérations ont trouvé un large écho dans l’historiographie allemande, entre autres parce qu’elles permettaient de démontrer par opposition la réussite du «Second Empire», l’empire wilhelminien organisé autour de la Prusse bismarckienne à partir de 1871. Par contrecoup, elles ont souvent été adoptées par la recherche française. Pourtant, d’autres analyses et interprétations se développent rapidement, auxquelles le récent manuel publié par un historien anglais donne une vitalité et une actualité nouvelles. Un des textes les plus importants est l’Extrait du projet de paix perpétuelle publié par Jean-Jacques Rousseau au milieu du XVIIIe siècle (1761): le Saint-Empire fonctionne d’abord comme un espace de rencontres et de discussions assurant l’équilibre entre ses différents acteurs, et leur apportant la paix. La position de cet espace au centre de l’Europe fait de son type d’organisation une manière de modèle pour tout le continent.
C’est précisément là la thèse de Joachim Whaley (thèse qui n’est donc pas si nouvelle...): à l’heure où les «nations» demandent leur autonomie (la Catalogne, l’Écosse, etc.), le modèle du Saint-Empire pourrait être un exemple précieux. Le Saint Empire a effectivement été une structure de négociations entre les princes eux-mêmes (rappelons qu'il réunit encore quelque deux cents entités indépendantes lors de sa dissolution de 1806), et entre les princes et l'Empereur. Il a constitué un espace intégrant les différentes confessions (la paix d’Augsbourg de 1555 marque à cet égard une date fondatrice), et correspondant à une unité fondée sur le compromis. Autant de termes, et d’expériences, dont pourraient s’inspirer nos dirigeants actuels –tout comme ils devraient s’inspirer d’une certaine forme de culture historique malheureusement de moins en moins répandue...

Joachim Whaley, Das Heilige Römische Reich Deutscher Nation, trad. allde, Darmstadt, Philipp von Zabern, 2014, 2 vol.
Samuel von Pufendorf (pseud. Severinus de Monzambano, Veronensis), De statu imperii germanici ad Laelium fratrem, dominum Trezolani, Genevae, apud Petrum Columesium, 1667. Nombreuses rééd., et trad. allde dès 1669.

mardi 10 février 2015

Bibliothèques scientifiques

La dernière livraison de la Revue de la BNU (2014, n° 10) intéresse non seulement l’historien du livre, mais aussi les spécialistes d’histoire des idées et d’histoire des sciences, puisque le dossier thématique en est consacré à «Des sciences et des bibliothèques» –par «sciences», il est entendu «sciences [dites] dures», qui sont le domaine de la recherche où les procédure de travail et de publication se trouvent aujourd’hui les plus impactées par l’essor des nouveaux médias. D’où la question: quel peut être le rôle de la documentation imprimée et des «bibliothèques scientifiques», à l’heure où la dématérialisation de l’information est pratiquement générale?
Christian Jacob rappelle très brièvement, en tête, le cas de ces textes scientifiques grecs qui nous sont parvenus, et dont un certain nombre date du IIIe siècle avant Jésus-Christ: le bibliothécaire d’Alexandrie, Ératosthène de Cyrène, aurait conduit au Musée une politique systématique d’acquisition des textes les plus importants dans les domaines scientifiques aussi. Christian Jacob pose notamment la question de l’articulation entre les sciences et l’histoire des sciences, la science aujourd’hui en construction ne ressentant pas toujours le besoin de faire référence à des ouvrages anciens, et correspondant à état dépassé des connaissances.
Le superbe portrait de Johann Kepler appartenant à la Fondation du Chapitre Saint-Thomas de Strasbourg a été offert à la bibliothèque de cette ville en 1627 par Matthias Bernegger, historien, philologue et mathématicien. Rappelons que Bernegger, qui possède lui-même une remarquable bibliothèque, sera notamment le traducteur et éditeur de Galilée en latin en 1635.
Un article consacré à la révolution scientifique du premier tiers du XVIIe siècle (ce que Pierre Chaunu appelait le «miracle de 1630») et aux réseaux de Johann Kepler reprend la problématique du rôle du média dans cette invention. La recherche s’appuie sur l’organisation de réseaux savants au sein desquels ce sont non seulement les hommes qui circulent, mais aussi les informations (par le biais de la correspondance) et les livres. Les bibliothèques réunies par certains princes ou très grands personnages, à Munich comme plus tard à Wolfenbüttel et, bien sûr aussi, à Paris, fonctionnent effectivement comme les laboratoires de la recherche. Une ville comme Strasbourg tient une place notable dans le dispositif, par ses établissements d’enseignement (la Haute École, devenue Université), par les recherches qui y sont conduites, par les collections de livres qui y sont disponibles, et par l’activité de ses professionnels de l’édition: on rappellera que c’est à Strasbourg que Galilée est pour la première fois traduit et publié en latin (1635), pour répondre à une commande des Elzevier de Leyde.
Stephan Waldhoff revient sur le rôle de «Leibniz bibliothécaire», en montrant comment les conceptions et les pratiques mises en place au début du XVIIe siècle s’approfondissent et se systématisent deux générations plus tard. Le projet de Leibniz (1646-1716) est celui de s’employer à accroître «le bien-être général», en entrant au service d’un prince et en construisant pour celui-ci l’instrument le plus accompli possible de rationalisation de l’action politique –entendons, une bibliothèque universelle, à laquelle serait appliquée un plan de classement systématique qui en ferait le «cosmos du savoir». Leibniz a commencé sa «carrière de bibliothécaire» à Mayence, au service de Johann Christian von Boineburg (1622-1672), principal ministre de l’électeur primat; mais Leibniz est surtout connu comme le bibliothécaire du duc de Hanovre, et surtout du duc de Wolfenbüttel (1691). La reconstruction de la bibliothèque selon le célèbre plan ovale qui fera l’admiration de Montesquieu date précisément de sa gestion –mais aucun document n'est connu à l'appui de la thèse selon laquelle Leibniz aurait joué un rôle quelconque dans ce programme architectural. 
Les conceptions de Leibniz associent le cabinet de curiosités, les archives et les «archives imprimées»,  la bibliothèque, pour construire l’instrument de travail intellectuel le plus complet et le plus efficace possible. C’est le même projet que suit le naturaliste et professeur d’université Jean Hermann (1738-1800) dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. L’article que lui consacre Dorothée Rusque développe cette pratique consistant à mettre en regard la bibliothèque (avec ses imprimés, mais aussi ses planches d’histoire naturelle) et la «collection de spécimens issus des trois règnes de la nature». L’étude des exemplaires conservés permet de suivre le travail du savant au quotidien, qui n’hésite pas à couvrir notes les marges de ses livres, voire à les interfolier pour y intégrer ses propres observations.
Un article d’Isabelle Laboulais est encore consacré à la bibliothèque de l’École des mines: l’auteur présente non seulement la genèse et les enjeux de la constitution et de l’organisation d’une collection spécialisée, mais aussi la problématique, bien plus rarement abordée, de l’espace de la bibliothèque (la salle de lecture) et de son mobilier (dont les boîtes du premier catalogue sur fiches). Un entretien avec Catherine Kounelis, responsable de la bibliothèque de l’École supérieure de physique et de chimie industrielle, un article sur le statut et le rôle de la bibliothèque scientifique à l’heure de la révolution numérique, et un autre entretien avec Jules Hoffmann, Prix Nobel de physiologie, complètent cette très intéressante livraison de la Revue de la BNU.
Il est sans doute logique, d’une certaine manière, que la réflexion sur les modalités du travail intellectuel soit plus particulièrement poussée dans les périodes de mutation du système des médias –en l’occurrence, la «troisième révolution du livre», celle qui nous fait passer dans le monde des médias numériques. Dans le même ordre d’idées, nous signalons ici l’ouverture prochaine de l’exposition De l’argile au nuage: une archéologie des catalogues [de bibliothèque], à la Bibliothèque Mazarine, le 12 mars prochain. De longue date, les historiens du livre sont attentifs au rôle du média dans la construction du texte et du sens: les travaux actuels sur ce que nous avons désigné comme la «logistique de l'intelligence» ne peuvent que les réjouir, et les conforter dans leur entreprise.

Patrick Boner, Miguel Granada, Édouard Mehl, «L’impulsion bibliothécaire de la révolution scientifique : livres et réseaux autour de Johannes Kepler». Stephan Waldhoff, «Leibniz bibliothécaire». Dorothée Rusque, «Construire et organiser le savoir naturaliste au XVIIIe siècle: la collection de livres de Jean Hermann». Isabelle Laboulais, «La bibliothèque de l’École des mines, lieu de savoir et lieu de mémoire pour les ingénieurs». «Un fonds patrimonial dans une bibliothèque d’ingénieurs : entretien avec Catherine Kunelis». Jean-Pierre Elloy, Morgan Magnin, «Le numérique: une bibliothèque universelle pour la création scientifique?». «La science se fait-elle encore dans les livres? Un entretien avec Jules Hoffmann, de l’Académie française, Prix Nobel de physiologie».

jeudi 5 février 2015

Conférence d'histoire du livre

École pratique des hautes études, IVe section
Conférence d'histoire et civilisation du livre

Lundi 9 février 2015
16h-18h

Une composante méconnnue de l'archéologie du livre:
les papiers dominotés
par

Monsieur Marc Kopylov

Les papiers dominotés français ont connu un développement considérable dans la seconde moitié du xviiie siècle. C’était l’oeuvre de graveurs sur bois, artisans plutôt qu’artistes oeuvrant pour les fabricants d’indiennes dont ils gravaient les « moules », travaillant indifféremment pour les imagiers et les tapissiers. Les livres de cette époque qui nous sont parvenus, couverts de papiers colorés, montrent aussi bien des motifs géométriques que de grandes arabesques de papiers de tenture. On peut penser que les brocheuses de ce temps utilisaient à la fois les fragments des lés inutilisés ou gâchés par les tapissiers et les dominos achetés à bas prix chez les imagiers. Le développement de ces dominos aux couleurs séduisantes a été immense, et correspondait sans doute à la mode pour les indiennes dont la fabrication avait été libéralisée au milieu du siècle (André Jammes).

Nota: La conférence régulière d'Histoire et civilisation du livre a lieu tous les lundis à l'École pratique des hautes études, de 16h à 18h. (190 avenue de France, 75013 Paris, 1er étage, salle 115). Le secrétariat de la IVe Section se situe dans les mêmes locaux.
Accès les plus proches (250 m. à pied)
Métro: ligne 6 (Nation-Pte Dauphine), station Quai de la Gare.
Bus 89, arrêt Quai de la Gare (cette ligne dessert notamment la Gare Montparnasse, puis elle passe rue de Rennes et place du Luxembourg).
Accès un petit peu plus éloignés: Métro: ligne 14, station Bibliothèque François Mitterrand. RER ligne C, station Bibliothèque François Mitterrand. Bus: 62 et 64 (arrêt Bibliothèque François Mitterrand Avenue de France).

Calendrier des conférences (attention: les sujets à jour des conférences et les éventuelles modifications sont régulièrement annoncés sur le blog. N'oubliez pas, comme disent les informaticiens, de «rafraîchir» la page du calendrier quand vous la consultez).