samedi 21 mai 2011

Livres de cour: les bibliothèques de la dynastie de Bourbon-Parme

Il y a quelques semaines, nous évoquions sur ce blog la problématique des livres de cour, en parlant de Bodoni à Parme et des ses éditions.
Ancienne cité épiscopale, puis communale, Parme est soumise à différents pouvoirs extérieurs (notamment Milan), et occupée un temps par les Français au début du XVIe siècle. Le pape Paul III Farnèse investit du duché son... fils, Pier Luigi Farnese, en 1545. Sous les Farnèse, la capitale de la petite principauté connaît une phase de développement, mais elle devient une véritable capitale européenne après que le titre de duc de Parme passe, en 1748, à une branche de la famille de Bourbon, dès lors Bourbon-Parme.
Philippe de Bourbon (don Filipo, 1710-1765), marié à Élisabeth Louise de France (fille de Louis XV), avait fait de son secrétaire, Léon Guillaume du Tillot (Bayonne, 1711-Paris, 1774), son principal ministre à partir de 1759. Même si la situation politique évolue progressivement après la montée sur le trône de Ferdinand de Bourbon (don Ferdinando), et surtout avec son mariage autrichien (1769), le duché s’impose l’un des modèles du despotisme éclairé.
C’est dans ce cadre, et par rapport au modèle parisien et versaillais, qu’il faut analyser l’attention donnée à la politique culturelle : la Gazzetta di Parma commence à paraître en 1760, on crée au Palais de la Pilotta une Académie des Beaux Arts, l’Université est réorganisée à la suite du départ des Jésuites (1768). Son intérêt pour les arts, pour les bibliothèques et pour la diffusion des connaissances, donc aussi pour les livres, caractérise le prince comme un prince éclairé et fonctionne comme argument de légitimation et d'illustration politiques (ci-contre, portrait de Ferdinand de Bourbon-Parme).
Le 1er août 1761 a été fondée «per pubblica utilità» la Bibliotheca Palatina, confiée au Père théatin Paolo Maria Paciaudi (1710-1785), proche de Choiseul-Stainville et correspondant de Caylus. Les travaux d’aménagement sont conduits par l’architecte français Ennemond Alexandre Petitot (1727-1801), ancien élève de Soufflot et Grand Prix de Rome (1745), lequel est installé à Parme depuis 1753.
L’étiquette utilisée pour la bibliothèque (d'après un dessin de Gravelot) suit la disposition d’une médaille: la statue d’Apollon Palatin se détache sur un arrière-plan de rayonnages. Le dieu est entouré par les symboles du savoir, tandis que le socle supportant la statue porte trois fleurs de lys. La légende est double: «Apollini Palatino Sacrum.», et «Bibliotheca Regia Parmensis.» La Bibliothèque sera inaugurée par le duc, en présence de l'empereur Joseph II, en mai 1769. Parme reçoit alors le qualificatif d’«Athènes de l’Italie», et la Palatina s'impose comme une des plus riches bibliothèques européennes des Lumières.
L'exposition en cours sous le titre de Libri a corte propose un ensemble de pièces provenant des bibliothèques ducales successives et aujourd'hui conservées à la Palatina. Le très élégant catalogue qui l'accompagne est magnifiquement illustré. Il s'ouvre par une présentation très précise des différents ensembles bibliographiques successivement entrés dans la Bibliothèque, et se poursuit par des notices détaillées des vingt-six pièces principales.
Citons la Bibbia atlantica, monumental codex copié en écriture caroline et enluminé au XIe siècle; le somptueux Tetraevangelo, manuscrit grec du XIIe siècle; ou encore les Lunettes de foi et de prudence céleste de Jean Henry, manuscrit français réalisé dans les années 1500 et ayant d'abord appartenu au comte Philippe de Béthune. La scène de dédicace figurant dans ce volume est absolument admirable. Les Psaumes sont représentés par un volume à la reliure exceptionnelle, puisqu'il porte la figure de Luther au plat supérieur et celle de Mélanchton au plat inférieur. La richesse de la collection musicale s'explique par la présence de la cour et de son théâtre.
Ajoutons que, d'une manière générale, la collection des reliures est en tous points admirable, qu'il s'agisse de reliures anciennes ou de reliures ducales réalisées pour les différents membres de la famille de Bourbon-Parme. Et convenons que, comme au XVIIIe siècle, la visite de l'austère Palazzo della Pilotta, qui abrite toujours aujourd'hui la Palatina et où l'exposition est ouverte au public, s'impose de plus en plus aux chercheurs et aux amateurs d'histoire du livre depuis que son patrimoine réellement exceptionnel se trouve progressivement mieux mis en valeur.
Libri a corte. Le biblioteche dei duchi di Parma conservate nella Biblioteca Palatina, sous la dir. de Andrea De Pasquale, préf. Carlo Saverio di Borbone-Parme, Parma, Biblioteca Palatina, Monte Università Parma, 2011, 137 p., ill.

2 commentaires:

  1. Vous publiez sur cette page une photo d'un portrait du duc Ferdinand Ier de Parme, savez-vous qui a peint ce portrait? Merci.

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  2. Il faudrait vérifier dans le catalogue, mais je ne l'ai plus sous la main. FB

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