Les amateurs d’histoire du livre et des bibliothèques découvriront avec intérêt une inscription épigraphique fragmentaire qui est en même temps un monument exceptionnel relatif à notre sujet: il s’agit en effet du vestige du (ou de l’un des) premiers(s) règlement(s) conservé(s) de bibliothèque.
La silhouette de l’Acropole d’Athènes est universellement connue, avec le plateau entouré de puissants remparts et portant les temples, à quelque 150m au-dessus de la ville. En redescendant de la colline, du côté de l’Aréopage, nous gagnons le cœur politique, administratif et commercial de la ville antique, l’ancienne Agora grecque, dominée par le temple du Théséion, étonnamment bien conservé. .
La Grèce constitue une province romaine depuis la défaite de Philippe V de Macédoine, mais la romanisation du paysage urbain ne se fait, à Athènes, que lentement. L’un des éléments marquants sera la création d’une Agora romaine, reliée à l’ancienne Agora par des ensembles de portiques progressivement mis en place. Au tournant du Ier siècle de notre ère, un bâtiment déjà existant au coin de la voie des Panathénées est aménagé par son propriétaire, Pantainos, pour abriter désormais une bibliothèque publique. Ce T. Flavius Pantainos, lui-même «prêtre des muses philosophes», est le fils d’un philosophe, et il est possible que le bâtiment réutilisé ait à l’origine été constitué par l’école dirigée par son père. La dédicace gravée au fronton explique en tous les cas qu’il a fait faire «à ses frais les colonnades extérieures, le péristyle, la bibliothèque avec les livres, et toute leur ornementation…»
Le complexe, aujourd’hui pratiquement disparu, comprenait donc une suite de trois portiques abritant eux-mêmes des pièces plus ou moins grandes, un péristyle et une cour intérieure. Donnant sur celle-ci, une salle de 100m2, dallée de marbre, accueillait la bibliothèque. La tradition de l’évergétisme voit, à l’époque, se multiplier les fondations et donations de bibliothèques somptueusement aménagées, aux différentes cités grecques, par de richissimes citoyens. À Athènes, la localisation de la bibliothèque Pantainos dans un emplacement stratégique, et plusieurs vestiges en provenant apparemment, témoignent d’une volonté de monumentalisation et de luxe. La bibliothèque a probablement accueilli les deux grandes statues personnifiant l’Iliade et l’Odyssée, que l’on a retrouvé à proximité.
Beaucoup moins spectaculaire, le fragment de règlement est aujourd’hui présenté dans le cadre du Musée d’ancienne Agora grecque. Il précise que les livres (des volumina) ne pourront pas être empruntés à l’extérieur, les responsables de la bibliothèque ayant prêté serment dans ce sens, et que l’institution elle-même est ouverte «de la première à la sixième heure», ce qui correspond à la matinée –rappelons que, dans le système romain, le jour est divisé en douze heures, dont la sixième s’achève à midi. On comprend au passage que ces heures n’ont évidemment pas une durée fixe, puisque l’amplitude du jour change avec la saison. Malheureusement, nous ne savons rien du contenu lui-même de la bibliothèque, dont on peut supposer pourtant que, puisqu’elle n’aurait eu qu’une seule salle, elle se limitait à la seule littérature grecque.
Deux références pour plus d'informations:
Phttps://cm.revues.org/96
http://www.agathe.gr/guide/library_of_pantainos.html
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