dimanche 15 janvier 2017

Conférence d'histoire du livre

École pratique des hautes études, IVe section
Conférence d'histoire et civilisation
du livre 

Lundi 16 janvier 2017
16h-18h
À propos de la nef et des fous:
quelques aperçus sur les problèmes de la réception 
par
Monsieur Frédéric Barbier,
directeur d'études
--> Jodocus Badius Asensius, Stultiferae naves, [Paris], Thielman Kerver pour Enguilbert, Jean et Geoffroy de Marnef, anno hoc iubileo ad xii kalendas martias [18 II 1500] (GW 3155).
Le succès du Narrenschiiff de Sébastien Brant fait du double motif de la nef et de la folie un thème à la mode autour de 1500.
Voici le jeune Josse Bade, originaire probablement de Asche (Brabant). Étudiant à Louvain, puis en Italie, il s’est arrête à Valence, puis à Lyon, sur sa route de retour: il exerce comme professeur de latin au collège de Henri Valluphinus, et travaille parallèlement pour le grand imprimeur-libraire Jean Trechsel, lui-même peut-être venu de Bâle. En 1497, Trechsel envisage de donner une édition des œuvres d’Avicenne, et il dépêche Bade à Paris pour y prendre connaissance des manuscrits disponibles notamment «aux écoles de médecine».
C’est à cette occasion que le jeune savant entre en relations avec les frères de Marnef: établis rue Saint-Jacques à l’enseigne du Pélican, ils sont aussi ses compatriotes (ils viennent très probablement de Marneffe, près de Liège) et se trouvent précisément alors engagés dans leurs éditions du Narrenschiff en latin et en français. Bade en voit probablement les épreuves, et élabore avec Engilbert de Marnef le projet de prolonger l’opération en préparant un supplément consacré aux femmes –pratiquement absentes du texte de Brant.
De retour à Lyon, Bade envoie son manuscrit le 10 septembre 1498: un texte relativement court, puisqu’il ne comprend que six «nefs» dont la première est consacrée au pêché originel, tandis que les cinq autres correspondent aux pêchés spécifiques entraînés par les cinq sens. Pourtant, la première publication se fait sous la forme d’une traduction française, préparée par Jehan Drouyn, la volonté du libraire étant de rendre d’abord le texte accessible au lectorat féminin, lequel en règle général ne sait pas le latin.L’initiative est prise par le libraire, comme l’expliquera le traducteur, Jean Drouyn: l’auteur en effet est
«Maistre Josse Bade Ascense poëte lauré, qui a composé ce petit libelle en latin, et puis l’a translaté de latin en françois maistre Jean Droyn, bachelier en loix et en décret pour retirer les folles de leurs voluptéz, à la pétition et requeste de maistre Anguilbert de Marnef, lequel est inventeur de l’avoir fait imprimer, lequel est très à louer (…). Et pour ce l’avons tourné en françois à fin que les femmes le lisent plus à leur aise, et aussi pour leur discipline salutaires [sic] et enseignemens de pure vie».
Philippe Renouard décrit quatre éditions parisiennes, et une cinquième donnée beaucoup plus tard, à Lyon chez Jean d’Orgerolles en 1583. L’investissement engagé en 1498-1500 par les Marnef n’est pas négligeable, notamment s’agissant de l’illustration, que l’on a pu attribuer au Maître d’Anne de Bretagne. Dans un second temps seulement, les Marnef donnent le texte original de Bade, sorti des presses le 18 février 1500 et reprenant les gravures de l’édition en français. Philippe Renouard en connaît deux autres éditions, la première par Friedrich Biel à Burgos, la seconde, avec une préface de Wimpheling, par Johann Prüss à Strasbourg en 1502...

 Nota: La conférence régulière d'Histoire et civilisation du livre a lieu tous les lundis à l'École pratique des hautes études, de 16h à 18h. (190 avenue de France, 75013 Paris, 1er étage). 

Calendrier des conférences (attention: les sujets à jour des conférences et les éventuelles modifications sont régulièrement annoncés sur le blog. N'oubliez pas, comme disent les informaticiens, de «rafraîchir» la page du calendrier quand vous la consultez).

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