Le principe de la mondialisation est bien sûr d’abord lié à l’espace. À ce titre, le phénomène est déjà ancien, puisque l’invention de l’imprimerie vers 1450 inaugure des processus d’ouverture dont l’un des effets est la véritable «conquête» du globe par le média nouveau: après l’Europe, l’Amérique espagnole s’inscrit en tête, avec les presses de Mexico et de Lima au XVIe siècle, tandis que le XVIIe siècle voit la première imprimerie en Amérique du nord (Harvard, 1640) . Le XVIIIe siècle marque, peut-être, le premier apogée d’un processus dont l’abbé Raynal se fait le théoricien dans son Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, publiée pour la première fois à l’adresse d’Amsterdam en 1770.
Articulé avec le concept de mondialisation, celui de globalisation renvoie plutôt à une logique de rapprochement et d’intégration de phénomènes complexes –et Raynal en est à nouveau le théoricien lorsqu’il ouvre son livre en montrant comment la dilatation d’un monde occidental étendu aux dimensions du globe s’accompagne d’une interdépendance nouvelle, notamment d’ordre économique (y compris l’économie de la consommation) entre les différents espaces et les différentes civilisations:
«C’est [avec le passage du cap de Bonne-Espérance] que les hommes des contrées plus éloignées se sont devenus nécessaires; les productions des climats placés sous l’équateur se consomment dans les climats voisins du pôle; l’industrie du nord s’est transportée au sud; les étoffes de l’Orient habillent l’Occident, et par-tout les hommes se sont communiqués leurs opinions, leurs lois, leurs usages, leurs remèdes, leurs maladies, leurs vertus et leurs vices».
À Irkoutsk, les "Débats" des décembristes |
«Tandis que les patates de mon souper ébouillaient sous ma garde, je m’amusai à lire à la lueur du feu, en baissant la tête, un journal anglais tombé à terre entre mes jambes: j’aperçus, écrits en grosses lettres, ces mots: Flight of the king (Fuite du Roi). C’était le récit de l’évasion de Louis XVI…» »Encore quelques décennies, et ces décembristes exilés à Irkoutsk seront abonnés au Journal des débats, qui constitue l’un de leurs liens privilégiés avec l’Europe».
Un second billet suivra.
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