mercredi 17 février 2010
Un texte: la "Danse macabre des imprimeurs"
Chaque historien du livre connaît la célèbre "Danse macabre des imprimeurs" publiée à Lyon par Husz en 1499 et reproduite un très grand nombre de fois, entre autres dans L'Apparition du livre de Lucien Febvre et Henri-Jean Martin en 1958. Il s'agit d'une des premières représentations d'un atelier d'imprimerie en Occident, et sans doute de la première représentation d'une librairie.
Pourtant, on ne sait pas toujours que la xylographie se superpose à un texte en vers, selon le dispositif très généralement adopté pour les "danses macabres" peintes. Ce texte, rédigé avec une certaine élégance, fait alterner d'une strophe à l'autre l'appel de la mort pour attirer les différentes catégories de vivants, et la réponse de ces derniers, peu désireux de sauter le pas: en l'occurrence, l'imprimeur et le libraire.
(Transcription de Frédéric Barbier. La ponctuation est rétablie)
Le mort
Venez danser ung tourdion/ Imprimeurs sus, légièrement
Venez tost, pour conclusion./ Mourir vous fault certainement
Faictes ung sault habillement./ Presses et casses vous fault laisser
Reculer n’y fault nullement./ À l’ouvraige on congnoist l’ouvrier.
Les imprimeurs
Hélas, où aurons-nous recours/ Puis que la mort nous espie ?
Imprimé avons tous les cours/ De la saincte théologie
Loix, décret et poèterie./ Par notre art plusieurs sont grands clers
Relevée en est clergie./ Les vouloirs des gens sont divers.
Le mort
Sus avant, vous irés après/ Maistre libraire, marchez avant.
Vous me regardez de bien près./ Laissez voz livres maintenant.
Danser vous fault, a quel galant./ Mettez ici vostre pensée.
Comment vous reculez marchant./ Commencement n’est pas fusée [= Commencer, ce n'est pas finir].
Le libraire
Me fault-il malgré moy danser ?/ Je croy que ouy, mort me presse
Et me contrainct de me avancer./ N’est-ce pas dure destresse ?
Mes livres il fault que je laisse/ Et ma boutique désormais
Dont je pers toute liesse./ Tel est blecé qui n’en peult mais.
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