tag:blogger.com,1999:blog-27977862925091066902024-03-16T02:10:18.734+01:00Histoire du livreFrédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.comBlogger925125tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-30083619443394144482021-05-12T18:17:00.005+02:002021-05-12T18:21:15.560+02:00Les livres ont-ils un genre?<div style="text-align: center;"><b><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Les livres ont-ils un genre ? (XVIe-XXe siècle)</span></b></div><div style="text-align: center;"><b><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span></b><br /></div><div>
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Appel à contribution pour la revue <i>Histoire et civilisation du livre</i> (Genève, Librairie Droz), 2023.</span><br />
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Coord.: Emmanuelle Chapron (Aix Marseille Université / EPHE), Sabine Juratic (CNRS/ IHMC).</span></div><div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Comité scientifique: Marie-Cécile Bouju (Univ. Paris 8 Vincennes-Saint-Denis), Jean-Charles Geslot (Univ. Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines), Rémi Jimenes (Univ. Tours), Annette Keilhauer (Friedrich-Alexander Univ. Erlangen-Nürenberg), Edwige Keller-Rhabé (Univ. Lumière – Lyon 2), Sylvain Lesage (Univ. Lille).</span></div><div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span><br />
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<u>Argumentaires et Axes </u></span><br />
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Depuis la fin des années 1990, une bibliographie croissante s’est intéressée aux relations entretenues par les femmes avec les livres et, plus largement, avec le monde de l’imprimé en Occident. Les travaux ont mis en évidence la participation des femmes à la production et au commerce des livres, des ateliers d’Ancien Régime (Jimenes 2017) au développement des éditions féministes dans les années 1970 (Pavard 2005, Mazzone 2007), jusqu’à la place occupée par les «petites» maisons d’édition fondées par des femmes dans un champ éditorial, celui de la fin des années 1990, globalement guetté par une «révolution conservatrice» (Bourdieu 1999). Au cœur de nombreuses recherches, les lectrices ont été saisies à la fois comme construction normative (la lectrice idéale) et comme réalité sociale (von Tippelskirch 2011, Matamoros 2017). Les travaux ont éclairé les contraintes matérielles, sociales et culturelles qui s’exerçaient sur la lecture féminine, autant que la capacité des lectrices à s’en accommoder, à les contourner ou à les renverser à leur profit (Brouard-Arends 2003). Enfin, la place des femmes dans le champ littéraire, leur accès longtemps mesuré et contraint à la publication, le façonnement de figures d’autrices ont été questionnés dans la longue durée (Reid 2020). </span><br />
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Récemment, plusieurs travaux ont proposé une perspective plus englobante, embrassant l’ensemble du circuit du livre, dans la France (Broomhall 2002), l’Angleterre (Smith 2012) ou l’Italie (Richardson 2020) des XVIe et XVIIe siècles: les femmes y sont saisies à leur table de travail, à écrire, traduire, préfacer, copier, préparer les textes pour la presse, dans l’atelier, la rue et les corporations de métier, dans leurs interactions avec les auteurs, les imprimeurs et les patrons, dans leur confrontation, plume à la main, avec le texte lu, offert, prêté ou échangé. </span><br />
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Il n’est plus contestable qu’observer les femmes à l’œuvre ou même, comme le suggère Brian Richardson, de regarder «how activities related to books looked through the eyes of the women», permet d’ouvrir des perspectives latérales, de produire un autre regard sur des réalités consolidées par l’historiographie, d’interroger différemment les manières de lire, les formes de l’auctorialité, le genre des <i>inky fingers</i>, les paratextes (Keller-Rahbé et Clément 2017), en bref d’examiner autrement l’ordre des livres. </span><br />
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De plus en plus, l’entrée par les femmes est en réalité une entrée par le genre, même si elle ne s’avoue pas comme telle (Clément 2016): il s’agit tout autant de considérer les dominations masculines sur les pratiques féminines du livre, que toutes les traces, visibles ou invisibles, de l’incorporation du travail féminin dans les objets et les lieux de l’imprimé (de sorte que les livres seraient, comme le suggère Helen Smith, indissociablement mâles et femelles). En contrepartie, il importe aussi de discuter constamment l’idée que dans la direction d’une maison d’édition, la manipulation des livres ou la constitution d’une bibliothèque, le genre serait une ligne de clivage plus pertinente et plus déterminante que les autres. </span><br />
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Cet appel à propositions s’articule autour de trois axes, combinables et non exclusifs d’autres propositions. On les présentera en s’appuyant sur des travaux récents qui nous paraissent ouvrir des pistes intéressantes. </span><br />
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1) Le premier axe propose de croiser histoire du livre et histoire (genrée) du travail, en suivant les suggestions d’une historiographie sur le travail en plein renouvellement. Cette approche inclut évidemment, en premier lieu, les activités de production et, plus largement, la participation des femmes à l’économie du livre. Il importe d’étudier à la fois les modalités concrètes de cette féminisation (en matière de formation professionnelle, par exemple), et la manière dont elle ébranle la culture de métiers longtemps très masculins. En effet, au cours des siècles, la féminisation de certaines activités est souvent le moteur d’une réflexion sur les «fondamentaux» du métier et les compétences qui lui sont associées. Au XIXe siècle, les embauches féminines liées à l’introduction de procédés mécaniques de composition dans les ateliers typographiques se font dans un climat d’hostilité et troublent les identités ouvrières (Jarrige 2007). Si la féminisation du personnel des bibliothèques au cours du XXe siècle a, elle aussi, jeté un «trouble dans le genre de la bibliothèque» (Eddy 2006), si elle s’est accompagnée d’une importante évolution de la littérature professionnelle (Bonavent 2018), il est aussi important de voir dans quelle mesure elle a concrètement transformé le fonctionnement des institutions ou, à l’inverse, comment l’institution a sourdement résisté à cette féminisation (Salanouve 2016). À la fin du XXe siècle, les femmes restent sous-représentées dans les comités de lecture de la plupart des grandes maisons d’édition françaises, par rapport à leur importance dans le lectorat (Simonin et Fouché 1999). </span><br />
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On s’interrogera, en second lieu, sur ce que suppose et implique d’être une femme à la tête d’une entreprise du livre, à la suite des travaux pionniers des années 1980 sur les veuves (d’)imprimeurs. À titre d’exemple, on pourra porter l’attention sur la mobilisation différentielle des capitaux économiques, sociaux, intellectuels ou symboliques par les hommes et les femmes qui sont à la tête des ateliers d’imprimerie, des librairies et des maisons d’édition, mais aussi des ateliers de reliure, qui restent mal connus. Cet axe inclut enfin, en troisième lieu, ce qui relève d’une approche genrée du travail intellectuel. Il faut rappeler qu’à l’époque moderne et encore au XIXe siècle, l’accès des femmes aux bibliothèques n’est pas acquis. Les travaux récents sur les bibliothèques d’artistes et d’écrivains soulignent que les femmes auteures, à l’instar de Virginia Woolf, travaillent souvent dans et avec la bibliothèque de leur père ou de leur époux (Ferrer 2001). La question des femmes d’écrivains, de savants ou d’universitaires, et du rôle qu’elles jouent dans la gestion des livres, des papiers et des bibliothèques de leur époux, pourra aussi être abordée. </span><br />
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2) Comme on le voit, il est difficile de poser la question du travail sans affronter du même coup la question de la construction, de la perpétuation ou de l’évolution des rôles sociaux et des stéréotypes de genre, masculins et féminins, à l’œuvre dans le monde du livre. Un deuxième axe propose de reprendre ce thème, à l’échelle de l’objet-livre, de la collection éditoriale ou de la bibliothèque. Dans cette perspective, on souhaiterait que les propositions dépassent la seule analyse de contenus textuels pour mobiliser les outils propres à l’histoire du livre, afin de mettre en lumière les assignations de genre véhiculées par les formes de mise en livre, les arbitrages typographiques, les paratextes ou encore les supports publicitaires. Ces choix éditoriaux en «rose et bleu», ou en «rose et vert», méritent d’être interrogés dans la longue durée, en confrontant les objets et les pratiques de lecture et en discutant l’efficacité sociale de ces dispositifs. Dans cette perspective, on pourra poser la question des communautés, réelles ou imaginées, que dessinent la production, la consommation, la conservation et la circulation genrée des livres, ou qu’elles participent à renforcer: on pense par exemple au rôle de médiation des libraires, ou aux pratiques de don et de prêt de livres à l’intérieur du cercle familial et amical. </span><br />
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3) En contrepoint du précédent, le troisième axe concerne la question de l’agentivité (<i>agency</i>), définie au sens large comme l’ensemble des formes d’accommodation, de contournement, de négociation, jusqu’à des formes assumées et réflexives de résistance, d’opposition ouverte et de redéfinition de cet ordre des livres. Depuis l’émergence de cet outil d’analyse, on a vu combien il avait permis d’ouvrir de nouvelles perspectives sur des dossiers classiques, comme la participation des femmes à la culture pamphlétaire dans l’Angleterre du milieu du XVIIe siècle (Nevitt 2006). L’analyse de la fréquence et des modalités du recours à l’autoédition, par les femmes et par les hommes, déjà esquissée pour le XVIIIe siècle, mériterait d’être reprise et étendue à d’autres périodes (Felton 2014). On pense aussi au rôle joué par les bibliothèques identifiées comme lieu de reconnaissance des études féministes (bibliothèque Marguerite Durand à Paris, Centre des archives du féminisme à la bibliothèque universitaire d’Angers), dans le développement de nouvelles problématiques de recherche et la consolidation de communautés académiques. </span><br />
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Cet axe invite aussi à s’intéresser aux formes de renversement du stigmate qui s’opèrent lorsque les individus exploitent de manière inattendue les identités de genre qui leur sont imposées. L’investissement des autrices dans la littérature pédagogique en est un des aspects, comme le montre la construction de véritables «empires» féminins, dans les départements jeunesse des bibliothèques, les librairies et les maisons d’édition spécialisées dans les États-Unis du début du xxe siècle (Eddy 2006). On pourra aussi faire place à l’histoire des maisons d’édition féministes, déjà étudiées en partie (Murray 2004, Pavard 2005, Mazzone 2007) et à des modes d’action qui le sont moins (les collections pour enfants de ces mêmes maisons d’édition, comme la collection «Du côté des petites filles», active de 1975 à 1982 aux éditions Des femmes). </span><br />
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Cette problématique conduit enfin à regarder du côté des échecs ou des revers non contrôlés de ces formes de résistance. Ainsi des anthologies d’autrices anglaises du XVIIe siècle qui se multiplient au XIXe siècle: en construisant un canon de littérature féminine, dans une perspective féministe, elles ont probablement contribué à l’éviction de ces œuvres du champ de l’analyse littéraire, telle qu’elle s’est professionnalisée à l’université dans les années 1920 (Dubois-Nayt, 2014).</span></div><div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Note. Ci-après, la célébrissime <i>Galerie du Palais</i>, par Abraham Bosse, vers 1638. Si les femmes sont effectivement présentes dans ce haut-lieu du commerce élégant au milieu du XVIIe siècle, les activités sont effectivement genrées: les clientes se réunissent devant le comptoir des éventails, quand le libraire voisin (probablement Augustin Courbé) n'a qu'un seul client potentiel. La seule présence féminine est chez lui celle de la jeune demoiselle de magasin. </span></div><div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://1.bp.blogspot.com/-YJ6adD8Z11o/YJv8jrcMydI/AAAAAAAAWL4/zt7EImx50lc-C1F2snKkQg6v5s-G99FJACLcBGAsYHQ/s600/Galerie%2Bdu%2BPalais%2B1640.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="477" data-original-width="600" height="509" src="https://1.bp.blogspot.com/-YJ6adD8Z11o/YJv8jrcMydI/AAAAAAAAWL4/zt7EImx50lc-C1F2snKkQg6v5s-G99FJACLcBGAsYHQ/w640-h509/Galerie%2Bdu%2BPalais%2B1640.jpg" width="640" /></a></div> </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><u>Modalités de soumission</u> </span><br />
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Les propositions (1 page de texte, précisant clairement les objectifs de l’article et les sources mobilisées, accompagnée d’un court CV bio-bibliographique) doivent être conjointement adressées à Emmanuelle Chapron (<a href="mailto:chapron@mmsh.univ-aix.fr">chapron@mmsh.univ-aix.fr</a>) et Sabine Juratic (<a href="mailto:sabine.juratic@ens.psl.eu">sabine.juratic@ens.psl.eu</a>) avant le 15 juillet 2021. </span><br />
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Les propositions seront soumises au comité scientifique du dossier. La décision sera communiquée aux auteurs avant le 1er octobre 2021. Les textes définitifs seront à remettre avant le 1er mai 2022. La publication se fera dans la livraison 2023 de la revue.</span></div><div><br /><u>
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Bibliographie </span></u><br />
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Bonavent 2018: Bonavent Élodie, <i>Être une femme bibliothécaire: analyse du regard de la littérature professionnelle. Début XXe siècle-années 1970</i>, mémoire de Master 1 Science de l’information et des bibliothèques, Université d’Angers, 2017-2018. </span><br />
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Bourdieu 1999: Bourdieu, Pierre, «Une révolution conservatrice dans l’édition», dans <i>Actes de la recherche en sciences sociales</i>, 126-127, 1999, p. 3-28. </span><br />
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Broomhall 2002: Broomhall Susan, <i>Women and the Book Trade in Sixteenth-Century France</i>, Aldershot, Ashgate, 2002. </span><br />
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Brouard-Arends 2003: Brouard-Arends Isabelle (dir.), <i>Lectrices d’Ancien Régime</i>, Rennes, PUR, 2003. </span><br />
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Clement 2016: Clement Michèle, «Asymétrie critique. La littérature du XVIe siècle face au genre», dans <i>Rapports de sexe et rôles sexués (XVIe-XVIIIe s.)</i>, <i>Littératures classiques</i>, 2016/2, n° 90, p. 23-34. </span><br />
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Dubois-Nayt 2014: Dubois-Nayt Armel, «L’édition des autrices anglaises du XVIIe siècle: état des lieux, enjeux et prospective» [carnet du groupe de recherche Britaix 17-18, AMU, LERMA, britaix.hypotheses.org] </span><br />
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Eddy 2006: Eddy Jacalyn, <i>Bookwomen: creating an empire in children’s book publishing, 1919-1939</i>, Madison, University of Wisconsin press, 2006. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Felton 2014: Felton Marie-Claude, <i>Maîtres de leurs ouvrages: l'édition à compte d'auteur à Paris au XVIIIe siècle</i>, Oxford University Studies in the Enlightenment, Oxford, Voltaire Foundation, 2014. </span><br />
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Ferrer 2001: Ferrer Daniel, «Les bibliothèques virtuelles de James Joyce et de Virginia Woolf», dans Paolo d’Iorio, Daniel Ferrer (éd.), <i>Bibliothèques d’écrivains,</i> Paris, CNRS Éditions, 2001, p. 171-194. </span><br />
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Jarrige 2007: Jarrige François, «Le mauvais genre de la machine. Les ouvriers du livre et la composition mécanique (France, Angleterre, 1840-1880)», dans <i>Revue d’histoire moderne et contemporaine</i>, 2007/1, n° 54-1, p. 193-221. </span><br />
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Jimenes 2017: Jimenes Rémi, <i>Charlotte Guillard, une femme imprimeur à la Renaissance</i>, Tours, PUFR, 2017. </span><br />
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Keller-Rahbé et Clément 2017: Keller-Rahbé Edwige, Clément Michèle (dir.), <i>Privilèges d’auteurs et d’autrices en France (XVIe-XVIIe siècles). Anthologie critique</i>, Paris, Classiques Garnier, 2017; <i>Privilèges de librairie en France et en Europe (XVIe-XVIIe siècles)</i>, Paris, Classiques Garnier, 2017. </span><br />
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Matamoros 2017: Matamoros Isabelle, <i>«Mais surtout, lisez!». Les pratiques de lecture des femmes dans la France du premier XIXe siècle</i>, thèse de doctorat en histoire contemporaine, Université Lumière Lyon 2, sous la direction de Christine Planté et Rebecca Rogers, 2017. </span><br />
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Mazzone 2007: Mazzone Fanny, <i>L'édition féministe en quête de légitimité: capital militant, capital symbolique (1968-2001)</i>, thèse de doctorat en littérature française, Université de Metz, sous la direction de Jean-Marie Privat, 2007. </span><br />
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Murray 2004: Murray Simone, <i>Mixed media : feminist presses and publishing politics</i>, Londres, Pluto press, 2004. </span><br />
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Nevitt 2006: Nevitt M., <i>Women and the Pamphlet Culture of Revolutionary England, 1640-1660</i>, Aldershot, Ashgate, 2006. </span><br />
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Pavard 2005: Pavard, Bibia, <i>Les éditions Des femmes: histoire des premières années 1972-1979</i>, Paris, L’Harmattan, 2005. </span><br />
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Reid 2020: Reid Martine (dir.), <i>Femmes et littératures. Une histoire culturelle</i>, vol. 1, Paris, Gallimard, 2020. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Richardson 2020: Richardson Brian, <i>Women and the Circulation of Texts in Renaissance Italy</i>, Cambridge, CUP, 2020. </span><br />
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Salanouve 2016: Salanouve Florence, «Les bibliothèques en France ont-elles un genre?: l’indispensable conversion du regard vers le genre », dans <i>Revue de l’Enssib</i>, 2016, n° 3 [en ligne] </span><br />
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Simonin et Fouché 1999 : Simonin Anne, Fouché Pascal, «Comment on a refusé certains de mes livres. Contribution à une histoire sociale du littéraire», dans <i>Actes de la recherche en sciences sociales</i>, 126-127, 1999, p. 103-115. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Smith 2012: Smith Helen, ‘<i>Grossly material things’: women and book production in early modern England</i>, Oxford, Oxford university press, 2012. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Von Tippelskirch 2011: Von Tippelskirch Xenia, <i>Sotto controllo. Letture femminili in Italia nella prima età moderna</i>, Rome, Viella, 2011.</span></div><div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span></div><div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Communication d'Emmanuelle Chapron et de Sabine Juratic </span><br />
</div>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com4tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-61806338398802410572021-04-28T11:16:00.004+02:002021-04-28T11:19:26.334+02:00Nouvelle publication<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
En 2014, Madame Anne Boyer soutenait dans le cadre de l’École pratique des Hautes Études (ED 472) une thèse de doctorat consacrée à la dynastie des imprimeurs et libraires parisiens d’Houry. Le travail avait été préparé sous la direction éclairée de notre maître, Monsieur Daniel Roche. Aujourd’hui, une demi-douzaine d’années plus tard, voici que sort la version imprimée de cette thèse exemplaire, sous la forme d’un impressionnant volume inséré dans la série des publications spécialisées de l’EPHE et de la Librairie Droz:</span>
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Anne Boyer, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
<i>Les d'Houry. Une dynastie de libraires-imprimeurs parisiens, éditeurs de l'Almanach royal et d'ouvrages médicaux (1649-1790)</i>,</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">préf. Daniel Roche, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Genève, Librairie Droz, 2021, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">[XVI-]534-[2] p., ill. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">« Histoire et civilisation du livre », VI-40).</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">ISBN 978-2-600-05747-9</span> <span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Nous laissons d'abord la parole à l'éditeur: «Si la famille d’Houry, aux origines fort modestes, acquiert nom et fortune dans la librairie parisienne grâce à l’<i>Almanach royal</i> (dont Laurent d’Houry obtient le privilège à la fin du XVIIe siècle), elle a commencé bien plus tôt à spécialiser sa production dans un domaine scientifique, médical en particulier, en phase avec l'édification en cours du réseau académique français et d'une «République des sciences» entre «Grand Siècle</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">»</span> et </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">«</span>Lumières». Cette étude montre sur le temps long que ce parti éditorial précurseur de la maison d'Houry est indéniable, sans que pour autant sa viabilité soit assurée dans la durée, en raison d’un créneau professionnel encore étroit et surtout de la concurrence croissante d’autres maisons parisiennes. D’où les compléments essentiels qu’apportent à l’entreprise l’Almanach royal et l’établissement d’une imprimerie permettant une plus grande autonomie de production mais obligeant aussi à élargir le répertoire et à s’assurer d’autres marchés plus directement «alimentaires» (factums, travaux de ville, impressions au service de la famille d’Orléans et de l’ordre de Malte). À l’instar des Jombert, c’est la déstabilisation révolutionnaire qui viendra révéler les fragilités d’une entreprise étroitement dépendante, en fin de compte, des protections collectives et individuelles dont bénéficiait la librairie parisienne d’Ancien Régime».</span></p><p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEip9QASh3uMMAGU-xuVq-Vo_gOW8uVAR47UHwz-5RYPJlds4MAxFINQ4IOQnReiHuL4Ivzw8oh0tfGS9trTg9LN0I6ba-czsgsOyqPyKUlP_W09GDvtUGRB4bIWugF14QlC4pbMSpxmNx52/s617/Blog+d%2527Houry.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="583" data-original-width="617" height="378" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEip9QASh3uMMAGU-xuVq-Vo_gOW8uVAR47UHwz-5RYPJlds4MAxFINQ4IOQnReiHuL4Ivzw8oh0tfGS9trTg9LN0I6ba-czsgsOyqPyKUlP_W09GDvtUGRB4bIWugF14QlC4pbMSpxmNx52/w400-h378/Blog+d%2527Houry.jpg" width="400" /></a></div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Bien évidemment, le travail le travail de Madame Boyer apporte d’abord un précieux complément à nos connaissances<br /> sur la librairie d’Ancien Régime, mais il touche aussi à d’autres domaines, comme l’histoire des familles, l’anthropologie historique, ou encore la construction d’un modèle politique moderne. Arrêtons-nous un instant sur ce dernier point: l’origine de l’almanach est à chercher dans le calendrier, que nous voyons apparaître, sous la forme d’un imprimé, dès la fin du XVe siècle. Ce genre éditorial se développe progressivement, jusqu’à être pris en charge par l’administration princière: en France, l’<i>Almanach royal</i> fait l’objet d’un privilège et est publié chaque année à partir de 1683/1699 (cf détails donnés par Anne Boyer, p. 74 et suiv.). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">L’objectif poursuivi est de trois ordres:
1) L’<i>Almanach</i> donne d’abord la généalogie de la maison souveraine, et des autres maisons régnantes, en tant que cette généalogie est par elle-même une justification de la gloire fondée sur le lignage. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
2) Le tableau des bureaux (et l’état des dignitaires et membres du personnel) répond à l’objectif de rationalité et d’information. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
3) Enfin, l’A<i>lmanach</i> constitue un vecteur de publicité, puisqu’il est disponible sur le marché de la librairie. Globalement, l’<i>Almanach</i> est un indicateur de la modernité administrative, mais il fonctionne aussi comme un instrument permettant de gérer la hiérarchie sociale, à travers l’ordre des parties (le clergé d’abord, puis la noblesse) et des rubriques, et à travers les indicateurs de rapprochement, ou encore l’apparition de nouvelles charges. C’est ainsi que la liste des «princes, seigneurs et pairs de France» sera généralement donnée «suivant le rang qu’ils ont au Parlement». </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
C’est en tant que témoignage de la modernité que le modèle français sera repris, tout en conservant le cas échéant le choix même du français, dans un certain nombre de publications d’Outre-Rhin : ainsi de l’<i>Almanach de la cour électorale de Cologne</i>, voire de l’<i>Almanach de la cour impériale et royale de Vienne</i>, etc. La pertinence de l’<i>Almanach</i> suppose qu’il soit très régulièrement tenu à jour (en cas de besoin, on y insérera des cartons). Enfin, son caractère représentatif en tant que produit de la cour explique aussi l’attention donnée à sa forme matérielle, et notamment à la qualité de la typographie et aux ornements xylographiés.
</span><br />
<p></p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-29384434736248225202021-04-21T14:04:00.015+02:002021-04-21T17:50:07.056+02:00Translittération (1)<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> La translittération décrit une opération qui porte sur l’écriture elle-même: il s’agit de remplacer un système d’écriture par un autre, par ex. en transcrivant sous une forme cursive une inscription épigraphique. La métamorphose peut être plus radicale, lorsque l’on adopte un nouveau système d’écriture pour une langue existant déjà sous forme écrite: ce sera doublement le cas du turc, qui utilise d’abord l’alphabet arabe, alors que celui-ci n’est pas le mieux adapté à la phonétique turque. En 1928, Atatürk fait procéder à une réforme de l’écriture, qui impose l’emploi de l’alphabet latin et qui fait le choix de l’orthographe phonétique (<i>fotograf</i>, <i>tünel</i>, etc.). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Les historiens du livre aussi sont familiers du processus de translittération, qui concerne dans leur cas la substitution d’un support à un autre, et en particulier le remplacement du rouleau (<i>volumen</i>) sur papyrus par le livre en cahiers (<i>codex</i>) sur parchemin, remplacement à peu près généralisé en Europe au IVe siècle. Quatre siècles plus tard, la réforme carolingienne ne marque pas un nouveau changement de support: nous restons sur le principe du codex, même si le format change (le modèle tend à devenir celui d’un format carré). En revanche, comme on sait, la nouvelle écriture, dite minuscule caroline, est imposée en quelques décennies à partir du palais d’Aix-la-Chapelle, et des grands <i>scriptoria</i> de Corbie et de Tours. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Le deuxième temps fort de mutation est constitué, dans le domaine de l'histoire du livre, par l’invention de la typographie en caractères mobiles, à partir du milieu du XVe siècle, tandis que le passage aux nouveaux médias marquera, peut-être, la troisième mutation majeure. Bien évidemment, on ne recopie pas sur les nouveaux supports tous les contenus anciens mais on se concentrera, en fonction des moyens disponibles, sur les textes auxquels on accorde plus de valeur ou dont on estime avoir plus besoin. Les autres sont négligés, et cet abandon prélude à leur destruction. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Certains domaines de la connaissance supposeront d’introduire, au fil des siècles, des dispositifs particuliers, par ex. pour insérer des jeux d’équations algébriques dans des formes typographiques. Pourtant, il est un domaine spécifique qui permet de mieux démonter le schéma de la translittération et de mieux percevoir certaines conséquences du phénomène sur le plan socio-culturel: il s’agit de la musique, dont l’écriture doit associer la portée, la hauteur de la note et sa longueur, outre, le cas échéant, un certain nombre de signes particuliers (#, ♭, etc.). La logique typographique ne s’adapte pas à la notation musicale, pour laquelle la solution reste d’abord la copie, puis la gravure sur bois ou en taille douce. Les inconvénients de la gravure sont connus, notamment l’impossibilité de modifier ou de corriger, et son coût relativement élevé, mais une reconfiguration radicale apparaît avec l’invention de la lithographie: grâce à la lithographie, il est possible de dessiner directement sur la pierre la page musicale dans son ensemble, partition et notation, et on pourra dès lors la reproduire très facilement. Les coûts sont d’autant plus réduits que la pierre peut le cas échéant être lavée, donc réutilisée pour un autre travail. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Mais, dans l’immédiat, c’est «l’âge d’or» des copistes de musique, et Sylvie Mamy souligne avec raison le fait que les grands compositeurs italiens de l’époque des Lumières ne connaissent que très mal les travaux de leurs contemporains, parce que ceux-ci ne sont pas diffusés. Même avec la lithographie, l’édition, les transcriptions et les adaptations ne sont réalisées qu’après coup –entendons, après les premières représentations publiques, pour lesquelles, s’agissant de pièces faisant intervenir un orchestre, c’est encore le règne de la copie qui se poursuit. Les archives de l’Opéra de Paris témoignent d’ailleurs de la présence dans les rôles du personnel, sous la monarchie de Juillet, d’un groupe de copistes et de leur chef, lesquels sont responsables de la mise au net des partitions pour les différents pupitres. Bien évidemment, les copistes spécialisés peuvent aussi travailler au coup par coup pour des amateurs, désireux par exemple d’exécuter en privé telle ou telle aria entendue sur la scène. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La diffusion de la pratique musicale privée (et celle du piano droit) bouleversent cette économie dans les premières décennies du XIXe siècle, et des maisons d’édition spécialisées s’appuient sur la conjoncture montante pour assurer leur développement. La musique devient en effet aussi alors à l’origine de tout un domaine spécifique d’écriture et de réécriture, d’adaptation et de transcription pour le piano, qui permettra aux amateurs qui ne peuvent pas venir au spectacle de se familiariser avec une certaine composition ou avec ses thèmes principaux. Les séries de partitions publiées sous la forme de cahiers par les grands éditeurs spécialisés constituent des collections gigantesques et font la fortune de maisons industrielles à Paris comme à Bruxelles ou à Leipzig. Les grandes séries éditoriales compteront à terme plusieurs centaines, voire des milliers de numéros. À Leipzig à partir de 1755, Breitkopf et Härtel mettent sur pieds une imprimerie de référence, à laquelle est jointe une maison d’édition en partie spécialisée dans la musique et qui fera un très large appel à la lithographie à partir de la première moitié du XIXe siècle : elle est alors l’une des principales d’Europe.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-ulvjRoffzFk/YIATyqdkaZI/AAAAAAAAWKM/Sim5h8FdUpI10G8J31tJlhbbv9GIRgM3QCLcBGAsYHQ/s2048/Blog%2BSchlesinger.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="2048" data-original-width="1360" height="640" src="https://1.bp.blogspot.com/-ulvjRoffzFk/YIATyqdkaZI/AAAAAAAAWKM/Sim5h8FdUpI10G8J31tJlhbbv9GIRgM3QCLcBGAsYHQ/w424-h640/Blog%2BSchlesinger.jpg" width="424" /></a></span></div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Arrêtons-nous pourtant sur un exemple parisien. Moritz (Maurice) Schlesinger (1798-1871) est le fils d’un libraire de Berlin spécialisé dans la musique (il publie le <i>Berliner allg. musikalische Zeitung</i> et est l’éditeur de Weber). Il vient à Paris (comme hussard de Brandebourg!) en 1815, et s’y installe, travaillant d’abord à la librairie internationale de Martin Bossange. En 1822, Schlesinger fonde sa propre maison, 13 quai Malaquais, avant de traverser la Seine pour se transporter quelques mois plus tard rue de Richelieu. Fondateur de la <i>Gazette musicale</i> en 1834 (<i>Débats</i>, 27 févr. et stt 5 déc. 1835), Il passe des commandes pour des arrangements et autres réductions devant permettre à chaque amateur de s’approprier les motifs des pièces les plus célèbres, et il s’adresse pour ce faire à des musiciens débutants: <i>Le Dilettante d'Avignon</i> est l’une des premières pièces de Fromental Halévy, donnée en 1828. L’éditeur commande à Henry Lemoyne un arrangement pour piano qui puisse être utilisé pour les danses de salon. Wagner lui-même travaillera comme petite main chez lui, précisément sur des partitions de Halévy (<i>Le Figaro</i>, 21 fév. 1861). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Mais Schlesinger est un personnage ambigu, avec lequel les compositeurs ont des relations parfois… houleuses, et les procès ne manquent pas. Ce redoutable négociateur et homme d’affaires, qui traite de tout (rue de Richelieu, on peut souscrire ou s’abonner, mais aussi prendre des billets, etc.) peut se muer en maître de maison attachant et ouvert (son salon est l’un des plus en vogue de la capitale). Pour Flaubert, il </span><br />
<i><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">tenait le milieu entre l’artiste et le commis-voyageur; il était orné de moustaches; il fumait intrépidement; il était vif, bon garçon, amical; il ne méprisait point la table (…). Il était venu [à Trouville] dans sa chaise de poste, avec son chien, sa femme, son enfant, et vingt-cinq bouteilles de vin du Rhin.</span></i><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Il est vrai que le jeune Flaubert est tombé follement amoureux de Madame Schlesinger (1810-1888, mariée en deuxièmes noces avec Schlesinger en 1840), et qu’il se rappellera de la figure de son mari au moment de présenter Monsieur Arnoux, dans <i>L'Éducation sentimentale</i>… Mais pour d’autres, chez qui les sentiments ne sont pas les mêmes, Schlesinger n’est qu’un «foutu drôle» (Franz Liszt), avant tout attentif à tirer un maximum de son écurie de compositeurs.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">C’est bien, en définitive, l’invention de la lithographie et l’essor de l’économie des médias qui rendront possible d’atteindre, pour telle œuvre ou tel auteur, un retentissement et des rentrées financières jusque-là inconnus. Bien évidemment, le processus de reclassement est plus que jamais à l’œuvre: les collections nouvelles publiées par la lithographie ne reprennent pas de manière exhaustive l’ensemble du corpus préexistant;<i> a contrario</i>, elles sont aussi à l’origine de l’écriture de très nombreuses petites pièces répondant à la demande sociale de la «musique de salon». </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Notre second billet consacré aux logiques de la translittération en matière d’édition musicale abordera brièvement les phénomènes liés au techniques permettant d’enregistrer le son, et à leur diffusion.</span><p></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Cliché: le piano de Maurice Schlesinger (© Hôtel Bertrand, Musée de Châteauroux). </span><br />
</p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-63049420682492880562021-04-15T13:23:00.001+02:002021-04-15T14:46:53.390+02:00Histoire des techniques d'imprimerie<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Nous sommes très heureux de signaler la publication d’un ouvrage scientifique italien consacré à l’histoire des techniques d’imprimerie et de reproduction graphique. Le lecteur francophone y trouvera d’autant plus son intérêt que l’approche résolument transnationale donne à cette étude une dimension trop souvent négligée. Nous publions ci-après le sommaire détaillé, et faisons suivre la notice d’une brève présentation historiographique visant à replacer l’histoire des techniques d’imprimerie dans le champ plus vaste de la recherche historique: certes, l’histoire des techniques doit être «œuvre de techniciens», mais chaque technique ne se donne à comprendre qu’au sein d’un ensemble, celui des «systèmes techniques» tels que les avait définis notre maître Bertrand Gille. Pour l’historien, la technique n’est pas une donnée, mais une variable, qui s’organise nécessairement par rapport à des conditions sociales, économiques et culturelles plus générales auxquelles elle répond.</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Maria Gioia Tavoni,</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>Storie di libri e tecnologie. Dall’avvento della stampa al digital</i>e,</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Roma, Carocci editore, 2021,</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">221 p., ill., glossaire, <i>index nominum</i></span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(« iblioteca di testi e studi»). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">ISBN : 9788829001101</span></p><p style="text-align: center;"><b><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Sommaire </span></b><br /></p><p style="text-align: left;">
<u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">1. Con l’avvento della stampa</span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Nuove procedure/Il modello per la stampa/Interventi degli editori e/o dei compositori/Con la stampa si cambia mestiere/Carattere e caratteri/Convivere con il manoscritto/Veri imprenditori: i Gryphe di Lione/Il collezionismo/Vendere girovagando e cantando/La conquista di un’audience femminile/Nei chiostri/I traguardi delle donne/Per interesse o per passione?/Figure legate alla stampa: i correttori/Per meglio veicolare i testi: le immagini a stampa/Al servizio della scienza/Accorgimenti per una più attenta fruizione </span><br />
<u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">2. Dalla parte dei bambini</span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Luoghi del lavoro/Educare anche all’arte/L’apprendimento con tavole e disegni/L’editoria scolastica/Premiare a scuola/Produrre il libro scolastico/Crescere con i torchi/Apprendere il mestiere/Quanti e quali bambini all’opera/Il contesto lavorativo/In sorte ai bambini anche nell’industrializzazione/Il magistero della Chiesa/Il pedaggio dell’industrializzazione</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><u>3. Il balzo dei giornali e i problemi della carta</u></span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><br />
Dalla domanda di lettura alle svolte editoriali/Le donne e i giornali/Un genere che seppe imporsi: il feuilleton/Oltreoceano e in Europa con nuove macchine/I traguardi nell’uso della carta/In Italia, il problema della carta/Da ricerche del passato e di imprenditori/L’autarchia/Un caso fra tanti/In risposta alla domanda di lettura</span><br />
<u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">4. Contro la massificazione: le nicchie</span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Incipit/Un movimento e i suoi adepti/Le specializzazioni/Donne e stampa manuale/La Scuola viennese/L’arte del libro in Germania/La tecnica al servizio del libro d’arte/Una rivista fuori dall’ortodossia di stampa/Belli e utili i caratteri di legno/Un’impresa fra storia e attualità/L’Italia, una meta/Rinnovare il passato/E domani? </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><u>5. La fiction: un altro caso a sé</u> </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Romanzi ma del genere reality/Honoré de Balzac, editore e tipografo/Le Illusions perdues e la macchina editoriale/Un tecnico narratore/Nelle segrete cose: Ezio D’Errico docente/Due autori a confronto/Conteso fra due esperienze </span><br />
<u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">6. Dal passato, uno sguardo al futuro</span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Il nuovo che avanza/Il libro: àncora o ancora?/Un nuovo corso/Tempora mutantur, et nos mutamur in illis/Le nuove macchine di stampa digitale/Le macchine e il loro utilizzo/Il print on demand, un’opportunità?/ Il print on demand in biblioteca/Un motivato auspicio </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Glossario a cura di Edoardo Fontana</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Indice dei nomi a cura di Chiara Moretti</span> <span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span></p><p style="text-align: left;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">C’est peu de dire que l’histoire des techniques se place, traditionnellement, au cœur de l’histoire du livre, puisque la grande mutation de celle-ci avait été identifiée à l’invention de la typographie en caractères mobiles par Gutenberg et ses épigones au mitant du XVe siècle. Pour Henri Berr projetant (comme plus tard pour Lucien Febvre préparant) <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2011/05/les-deux-approches-de-lhistoire-du.html" target="_blank"><i>L’Apparition du livr</i>e</a>, le fait majeur réside dans la mise au point de la presse –ce que nous désignons aujourd’hui comme l’innovation de procédé. Ce choix aboutit à séparer radicalement l’«avant» et l’«après» tout en insistant sur le rôle décisif de l’inventeur génial. Par suite, la concurrence entre les nations s’accompagnera aussi, dans la seconde moitié du XIXe et un partie du XXe siècle, de l’essor de la controverse autour de la figure de l’inventeur et de la première localisation des presses (<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2019/01/nouvelle-publication.html" target="_blank">Haarlem</a>, Mayence ou Strasbourg?). Le titre même de <i>L’Apparition du livre</i> (1958) donne au phénomène une dimension quasi-surnaturelle que nous retrouvons dans la lecture de l’invention par Luther: l’imprimerie n’est-elle pas le dernier don par lequel Dieu se manifeste aux hommes avant l’Apocalypse? Son «apparition» fonctionnerait bien comme une épiphanie.</span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhfjLuwT-DykpSrY1tt73NWkyVGz_aOrGV8Zc_aGbBvkEWpxg8lTryO6WYARJ-pcySRjoYKPk5XEDVfz8giFFJ9EzT_sESVO2ACz8eMHD8K5I4pX-o0uOKoHGYcvveY3dPVy06iIF_zIYka/s560/Gutenberg.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="532" data-original-width="560" height="380" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhfjLuwT-DykpSrY1tt73NWkyVGz_aOrGV8Zc_aGbBvkEWpxg8lTryO6WYARJ-pcySRjoYKPk5XEDVfz8giFFJ9EzT_sESVO2ACz8eMHD8K5I4pX-o0uOKoHGYcvveY3dPVy06iIF_zIYka/w400-h380/Gutenberg.jpg" width="400" /></a></span></div><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Pour autant, la recherche aboutit, depuis plusieurs décennies, à insérer cette approche dans une double mise en perspective. Sur le plan de la chronologie, d’abord: les lecteurs de notre blog connaissent notre position, selon laquelle le changement ne peut se donner à comprendre que par l’analyse de ses conditions de réalisation. Pour faire bref, il faut qu’il soit rendu possible par un certain nombre de mutations ou d’évolutions qui lui sont antérieures, et dont la moindre ne réside pas dans la mutation du système d’ensemble des techniques. Les développements de la sidérurgie et de la métallurgie sont la condition liminaire pour passer à la typographie en caractères mobiles, tandis que seule la diffusion du nouveau support d’écriture, le papier en place du parchemin, rend possible une large utilisation des presses. Le marché lui-même se déplace, dans la mesure où l’innovation suppose d’engager un capital important, ce qui ne sera effectif que si l’investisseur perçoit des possibilités de développement lui permettant de se rémunérer. Un coup d’œil rétrospectif montre que la réflexion sur ces thèmes a été considérablement enrichie par l’apport du comparatisme entre les différentes «révolutions du livre», jusqu’à la révolution actuelle des nouveaux médias.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La seconde mise en perspective est elle aussi familière aux lecteurs de ce blog, qui concerne la dynamique même du changement. L’innovation de procédé n’épuise évidemment pas le processus d’innovation: la typologie très sommaire met en évidence le rôle de l’innovation organisationnelle –on pensera d’abord à l’organisation et aux pratiques de travail dans les nouveaux ateliers de production, puis dans les usines du XIXe siècle. Il ne s’agit d’ailleurs pas du seul petit monde de la production <i>stricto</i> <i>sensu</i>, mais aussi de ses conditions extérieures de fonctionnement: par ex., «l’apparition du livre» supposera de mettre en place des structures de distribution qui bien évidemment n’existaient pas jusque-là. On pense notamment aux <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2010/02/la-danse-macabre-des-imprimeurs-un.html" target="_blank">librairies de détail</a>, dont nous voyons le réseau commencer à s’étendre à travers l’Europe occidentale dans les premières décennies du XVIe siècle –et, comme on le sait, la problématique de la distribution figure à nouveau au premier plan dans l’agenda des transformations liées aux médias informatiques.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Nous n’avons jusqu’ici considéré que les conditions de fonctionnement du système-livre en tant que système clos, mais il est bien évident que celui-ci ne pourra se développer de manière viable que s’il rencontre <i>in fine</i> un type d’innovation très complexe, à savoir l’innovation de produit, auquel devra répondre l’accueil favorable du marché et des consommateurs. Pour assurer l’essor de leurs affaires, les professionnels proposeront en effet des produits nouveaux (par ex., <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2010/10/histoire-du-livre-et-theorie-de.html" target="_blank">le livre imprimé</a>, en tant qu’il est essentiellement différent du manuscrit et de ses avatars), qui doivent être favorablement accueillis par les consommateurs (l’innovation dans la consommation). Nous avons suffisamment exposé ces points pour qu’il ne soit pas nécessaire d’y revenir plus longuement ici</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Tout en concentrant son travail sur l’histoire des techniques, Madame Tavoni n’ignore évidemment rien de l’économie d’ensemble de la branche de la «librairie». Elle remporte ainsi, grâce à un plan astucieux, le challenge difficile consistant à articuler la chronologie au sein d'une présentation systématique, et à intégrer la synthèse efficace avec la problématique historique la plus récente.</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Cliché: Gutenberg, tiré de <i>Les Veber's</i>, Paris, 1895.</span></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Billets récents</span></u><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/03/economie-de-linformation-1.html" target="_blank">Économie de l'information (1)</a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/03/economie-de-linfiormation-2.html">Économie de l'information (2)</a><br /><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/03/nouvelle-publication-sur-erasme.html" target="_blank">Nouvelle publication sur Érasme</a><br /><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/03/histoire-dun-editeur.html" target="_blank">Histoire d'un éditeur (Fasquelle)</a><br /><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/03/un-manuel-dhistoire-du-livre.html" target="_blank">Un manuel d'histoire du livre</a><br /><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/" target="_blank">Retour au blog</a><br /></p><p></p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-45213102132780317492021-04-05T15:34:00.005+02:002021-04-05T20:30:25.928+02:00Conférence d'histoire du livre<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Nous sommes d’autant plus heureux d’annoncer la prochaine conférence de la direction d’études d’«Histoire et civilisation du livre» (EPHE), que cette conférence envisage une problématique d’une très grande importance, mais qui s’est trouvée jusqu’à présent particulièrement négligée: il s’agit du statut et du rôle de la «copie» d’un texte ou d’un ensemble de textes. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgxM1aaCNz2z0f9x-sMDuSq4c8qRfTFVAwjQrkwNL4ntga9j246MVj_53gQpTZNv9cxmEpu5zfHf-7XAHbMWGRtYCvCVaTMGY9NGOgbfzbp2c6prQ4sHFF_VKOyf59e11aNqnJ2FxsdVU-X/s800/inventaire_56-800h.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="600" data-original-width="800" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgxM1aaCNz2z0f9x-sMDuSq4c8qRfTFVAwjQrkwNL4ntga9j246MVj_53gQpTZNv9cxmEpu5zfHf-7XAHbMWGRtYCvCVaTMGY9NGOgbfzbp2c6prQ4sHFF_VKOyf59e11aNqnJ2FxsdVU-X/s320/inventaire_56-800h.jpg" width="320" /></a></span>Bien entendu, l’économie de la copie est complètement différente en Occident dans le système du manuscrit (pour l’essentiel, avant 1450), mais sa pratique monte peut-être paradoxalement en puissance à l’époque de l’imprimé. Bien entendu aussi, le statut de la copie engage, du moins à partir de l’époque moderne, celui de l’original éventuel. L’œuvre d’art originale prend une valeur que n’auront pas les copies (comme le montre l’exemple des copies de <i>L'École d’Athènes </i>dans les bibliothèques), et il est possible que ce modèle ait été décalqué dans le domaine littéraire. Les aléas de l’histoire peuvent d’ailleurs aboutir à inverser l’équilibre entre les deux termes, quand la disparition de <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2011/07/vrai-faux-original-copie.html" target="_blank">l’original</a> donne à la copie une valeur nouvelle. On le voit, l’intitulé de la conférence suscite toutes sortes de réflexions, qui pourraient aussi toucher à l'approche de la copie (de l'acte de copier/ recopier) en termes de</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> technique ou de pratique</span>, ou encore à l’ordre de la lexicographie.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La conférence insistera tout particulièrement sur la dimension anthropologique de la pratique de la copie et de son utilisation dans l’élaboration d’un certain mode et modèle de connaissance. Pour conclure sur un sourire: l'actualité du sujet n'est-elle pas démontrée par le fait que la copie reste, aujourd’hui, à la base du travail de l’historien (et de l’historien du livre) constituant sa propre collection d’extraits qui lui permettront de charpenter et de dérouler son discours à venir.</span></p><p></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Mais il est temps de laisser la parole à l’organisatrice, que nous remercions de l'information par elle transmise. Les auditeurs souhaitant participer à la séance (par le biais de Zoom) sont invités à s’adresser à Madame Emmanuelle Chapron pour se faire communiquer l’indicatif et le code secret de la réunion (emmanuelle.chapron-lebianic@ephe.psl.eu).</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>Chères auditrices, chers auditeurs, </i></span><i><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Voici l'annonce de la prochaine séance de mon séminaire, qui sera commun avec celui de Mme d'Orgeix. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Je me réjouis de vous retrouver à cette occasion. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Emmanuelle Chapron</span></i><br />
</p><div style="text-align: center;"><b><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La valeur de la copie et du fragment</span></b><br /></div><div style="text-align: center;">
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Séance commune aux séminaires d’Emmanuelle Chapron (Histoire et civilisation du livre)</span></div><div style="text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">et d’Émilie d’Orgeix (Histoire culturelle des techniques). </span><br /></div><p style="text-align: left;">
</p><div style="text-align: center;"><b><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Vendredi 9 avril, 14h-17h</span></b></div><p>
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Les copies sont nombreuses dans les fonds d’érudits de l’époque moderne conservés aujourd’hui dans les bibliothèques –copies d’inscriptions, de lettres, de manuscrits, voire d’ouvrages imprimés. Durant cette séance, on cherchera à déplier les enjeux de cette pratique, le rôle que la copie tient dans l’économie des échanges savants, du travail intellectuel et des techniques de reproduction de l’écrit. Comment les savants et les professionnels d’Ancien Régime travaillent-ils en copiant ou plutôt, quel genre de travail ont-ils l’impression de faire avec la copie? Qui sont les écrivains, copistes ou «misérables secrétaires», petites mains de l’ombre fugacement évoqués dans les sources? Quelle est la valeur, intellectuelle et financière, de ces copies? Comment ces copies finissent-elles par «faire livre» et constituer des bibliothèques? </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
La séance portera également sur l’usage de la copie de fragments de textes dans des recueils manuscrits. Comment expliquer ces compositions et comment étudier ce type d’ouvrages et quelle valeur leur donner? </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">On présentera plusieurs études de cas, à partir de la correspondance du savant Jean-François Séguier (1703-1784) et de recueils d’architecture «composés» à partir de fragments (XVIe-XVIIe siècle).</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Les participants au séminaire sont chaleureusement invités à réfléchir à ce qui, dans leur corpus, relève de la copie et du fragment, et à en proposer une rapide présentation (5-10 minutes).</span></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Billets récents</span></u><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/03/economie-de-linformation-1.html" target="_blank">Économie de l'information (1)</a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/03/economie-de-linfiormation-2.html">Économie de l'information (2)</a><br /><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/03/nouvelle-publication-sur-erasme.html" target="_blank">Nouvelle publication sur Érasme</a><br /><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/03/histoire-dun-editeur.html" target="_blank">Histoire d'un éditeur (Fasquelle)</a><br /><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/03/un-manuel-dhistoire-du-livre.html" target="_blank">Un manuel d'histoire du livre</a><br /><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/" target="_blank">Retour au blog</a><br /></p><p></p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-83159985530814663622021-03-31T14:52:00.011+02:002021-03-31T17:04:03.108+02:00Économie de l'information (2)<p><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Nous avons, il y a déjà quelques semaines, abordé <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/03/economie-de-linformation-1.html" target="_blank">la problématique de l’économie de l’information </a>à l'époque de la deuxième révolution du livre, à savoir au XIXe siècle. Le moteur de la mécanisation et de l'industrialisation réside d'abord dans la presse périodique, à laquelle les transformations des r</span>éseaux de communication permettent de devenir une presse périodique de masse: les grands titres de quotidiens tirent à des centaines de milliers, voir à plus d'un million d'exemplaires. Mais, comme toujours, la configuration nouvelle des structures de production et de diffusion implique que l'innovation touche aussi le public: il ne s'agit plus de quelques milliers de privilégiés, comme chez Champy en 1796, mais bien d'un public de masse, et d'un public qui n'aura certes plus la patience d'attendre pour être informé jour par jour, et bientôt heure par heure. Les <span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">«</span>nouvelles<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">» font désormais l'objet d'un commerce qui concerne non plus le seul domaine </span>financier, mais bien ses attendus (on pense à la publicité), et bientôt les attendus qui le sous-tendent (la presse d'opinion).<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Une caractéristique moderne de cette manière de consommation de nouvelles, caractéristique qui induit, indirectement, la sensation d’un manque insupportable, réside dans l’impatience à être informé, surtout si l’on est dans une période plus incertaine. Les grands journaux parisiens paraissent plusieurs fois par jour et on les diffuse aussi vite que possible, mais l'impatience interdit, le cas échéant, d’attendre la sortie des dernières éditions. Ainsi, le 8 mai 1870, a lieu le plébiscite sur l’Empire libéral et, si Ludovic Halévy s’abstient (ancien orléaniste, il ne veut pas voter contre un projet libéral, sans pour autant approuver le plébiscite), il se refuse à quitter Paris avant 22 heures, parce qu’il veut être au plus près des événements et des nouvelles. Il ne rentre à Ville-d’Avray, où il réside (</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">petite commune proche de Sèvres, à l'ouest de Paris)</span>, qu’au milieu de la nuit par des «petits sentiers déserts» et «la plus belle nuit du monde», mais ne peut y tenir, et, dès le lendemain matin, retourne en ville: </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>J’ai un besoin de savoir les chiffres vrais de Paris, ceux de la province (…). Pourquoi ne pas attendre les journaux, qui m’arrivent ici à deux heures [14h] ? Non, non, passer la moitié de la journée sans nouvelles, impossible. En route pour les nouvelles du plébiscite</i> (<i>Carnets</i>, II, p. 123-124)<i>.</i></span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le statut du journal change encore plus vite avec les développements de l’Affaire Dreyfus: il faut des nouvelles au plus vite, il faut pouvoir suivre précisément les développements de la polémique, mais il faut aussi manifester son soutien à la cause de Dreyfus. Durant l’été 1899, Geneviève Straus, tante de Ludovic Halévy, est à Trouville, dans sa somptueuse villa du «<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2010/09/topographie-litteraire.html" target="_blank">Clos des Mûriers</a>», où un vieil ami, le journaliste Eugène Dufeuille (1842-1911), vient séjourner trois jours, mais lui non plus ne peut pas, en définitive, y tenir –et pourtant, il est originaire de Normandie: </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
<i>Dufeuille a passé trois jours ici la semaine dernière, mais il est reparti pour être plus près des journaux et des nouvelles. Nous n’en manquons pourtant pas. Hier, onze dépêches de Rennes ou Paris! Néanmoins je comprends sa fièvre, puisque je la partage</i> (17 août 1899)<i>.</i></span><br /><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Tandis que Ludovic s’abonne au <i>New York Herald Tribune</i> pour avoir sur l’«Affaire» des nouvelles, non seulement américaines, mais reprises «de journaux du monde entier», Geneviève s’inquiète de ce que son cousin souffre des yeux, ce qui pourraient l’empêcher de lire –au passage, on voit le souci d’avoir à Trouville <i>Le Figaro</i> du jour : </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>Ah oui ! Je comprends ce que ce serait de ne pas lire ces jours-ci !… Nous avons </i>Le Figaro<i> le soir à 9 heures. Nous l’envoyons chercher à la gare</i> (1er septembre 1899)<i>.</i></span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i></i></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i></i></span><a href="https://1.bp.blogspot.com/-kIZVwMTA2PE/YGRwVQp0dnI/AAAAAAAAWIo/Lvbdg1JwtlE6DweQKeEzsB_nBs7ic6wDgCLcBGAsYHQ/s700/img-11-small700.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="463" data-original-width="700" height="424" src="https://1.bp.blogspot.com/-kIZVwMTA2PE/YGRwVQp0dnI/AAAAAAAAWIo/Lvbdg1JwtlE6DweQKeEzsB_nBs7ic6wDgCLcBGAsYHQ/w640-h424/img-11-small700.jpg" width="640" /></a></div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Deux photographies illustrent le thème : sur la première (cf <i>supra</i>), Geneviève Straus, Madeleine Bizet et Paul Hervieu, à Trouville, sont plongés dans la lecture des journaux. Le cliché a été pris de telle sorte que l’on puisse lire les différents titres, <i>L’Aurore</i>, <i>Le Siècle</i>, et le <i>Radical</i>. </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>La Libre parole</i> est abandonnée sur un guéridon. </span>Sur le second cliché, on reconnaît Ludovic, Daniel et Marianne Halévy, en compagnie de Mme Darmesteter (1), tous quatre plongés dans la lecture du seul <i>Figaro</i>. Le journal est devenu, en période d’incertitudes politiques, une manière d’afficher son choix –celui du <i>Figaro</i>, de Dreyfus et de la justice, et non pas des titres opposés à la révision.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>L’Affaire Dreyfus est avant tout un affaire d’opinion. À tous les stades de son déroulement, on retrouve, peu ou prou, la presse. Non pas la presse, fidèle écho d’un drame qui demeure extérieur, mais la presse partisane, provoquante, agressive, de bonne et de mauvaise foi </i>(Pierre Miquel)<i>.</i> </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> <br /></span><p></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Note</span></u><br /><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(1) Mary Robinson veuve de James Darmesteter, professeur de persan au Collège de France, directeur de l’École pratique des hautes études (1849-1894 : voir <i>Annuaire</i> de l’E.P.H.E., 1895). Les Darmesteter sont originaires de Château-Salins, où le père de James et de son frère aîné, Arsène, était relieur et appartenait à la communauté juive.</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/" target="_blank">Retour au blog</a> </span><br />
</p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-58048088062948696442021-03-24T10:07:00.004+01:002021-03-24T10:14:06.652+01:00Nouvelle publication sur Érasme<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Quelques monuments de l’histoire du livre, notamment à l’époque de la Renaissance ont fait ces dernières années, en France, l’objet de monographies spécifiques: nous citerons <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2018/11/histoire-dun-livre-la-nef-des-fous.html" target="_blank"><i>La Nef des fous</i></a> (<i>Narrenschiff</i>), ou encore l’<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2012/04/un-succes-de-librairie-europeen-l.html" target="_blank"><i>Imitation de Jésus Christ</i></a>. La petite collection s’accroît aujourd’hui d’un titre important, consacré au <i>Nouveau Testament</i> d’Érasme (<i>Novum Instrumentum</i>):</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>Le Nouveau Testament (1516). Regards sur l’Europe des humanistes et la réception d’Érasme en France</i>,</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">éd. Thierry Amalou, Alexandre Vanautgaerden, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Turnhout, Brepols, 2020, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
420 p., index, ill., cartes, graph. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(«Nugæ humanisticæ», 21).</span><p></p><p style="text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjA6nyZiMdLpVTzCc5RH2QLwSxjeYDHfIyGjiVuMKDf058ewNVGSGYkEIElUdsoLmiGIPG0EI4x4h0GsDa9I0IjFa1IDRIK-Q5F3_NvVwPTg-eRMhcTZnaQCNrcWNe_YOSPeEjnpBFcIrPq/s800/Blog+E%25CC%2581rasme.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="800" data-original-width="513" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjA6nyZiMdLpVTzCc5RH2QLwSxjeYDHfIyGjiVuMKDf058ewNVGSGYkEIElUdsoLmiGIPG0EI4x4h0GsDa9I0IjFa1IDRIK-Q5F3_NvVwPTg-eRMhcTZnaQCNrcWNe_YOSPeEjnpBFcIrPq/w256-h400/Blog+E%25CC%2581rasme.jpg" width="256" /></a></span><b><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Sommaire</span></b><br /></p><p style="text-align: center;">
<u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">1 Introduction</span></u><br /></p><p style="text-align: left;">
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Thierry Amalou (Université de Paris 1-Panthéon-Sorbonne)</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Dans le lit de l’humanisme biblique : le <i>Nouveau Testament </i>d’Érasme, œuvre majeure de la Renaissance</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Avertissement</span><br />
</p><p style="text-align: center;"><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">2 Restituer les Écritures ou corriger la Vulgate?</span></u><br /></p><p style="text-align: left;">
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">1 Sylvana Seidel Menchi (Université de Pise) </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Érasme et le <i>Nouveau Testament</i>, 1516 – 1535: le défi, le repli, l’expiation ?</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">2 André Godin (CNRS) </span><br /><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">‘<i>Novum Instrumentum</i>’, ‘<i>Philosophia Christi</i>’: enjeux et mise en œuvre d’un humanisme biblico-patristique</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">3 Luigi-Alberto Sanchi (CNRS, Institut d’Histoire du droit)</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><br />
Guillaume Budé et la critique érasmienne du <i>Nouveau Testament </i>en latin</span><br />
</p><p style="text-align: center;"><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">3 Collaborer. Les réseaux savants d’Érasme</span></u><br /></p><p style="text-align: left;">
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">1 Marie Barral-Baron (Université de Franche-Comté, LSH) </span><br /><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Érasme et l’édition du <i>Nouveau Testament</i> de 1516: entre travail collaboratif et «folie» du texte</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">2 Gilbert Fournier (CNRS, IRHT)</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Portrait d’un «ami indépendant». Louis Ber dans la correspondance d’Érasme</span><br />
</p><p style="text-align: center;"><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">4 Transmettre et juger</span></u><br /></p><p style="text-align: left;">
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">1 Malcom Walsby (Université de Rennes 2, cerhio) </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Les éditions du <i>Nouveau Testament</i> d’Érasme en France et leur diffusion </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">2 Jonathan Reid (East Carolina University) </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Erasmus’s Call for Vernacular Scriptures and the Biblical Program of Lefèvre d’Étaples</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">3 Christine Bénévent (École des Chartes) </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">François Ier lecteur d’Érasme</span><br />
</p><p style="text-align: center;"><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">5 Conclusion</span></u><br /></p><p style="text-align: left;">
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Jean-Marie Le Gall (Université de Paris 1-Panthéon-Sorbonne)</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Érasme : une image de vitrail ?</span><br />
</p><p style="text-align: center;"><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">6 Postface</span></u><br /></p><p style="text-align: left;">
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Alexandre Vanautgaerden (Académie royale de Belgique, Le Studium Research Fellow, Orléans-Tours, CESR - Université de Tours) </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">« Monumentum paratum est»: chronique des travaux récents sur le <i>Nouveau Testament</i> d’Érasme (2016-2020)</span><br />
</p><p style="text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
<u>7 Bibliographie générale</u></span><br /></p><p style="text-align: left;">
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">1 Sources (archives, édition) </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">2 Sources imprimés</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">3 Catalogues imprimés</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">4 Catalogues numériques</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">5 Travaux</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">6 Expositions</span><br />
</p><p style="text-align: center;"><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">8 Liste des œuvres d’Érasme</span></u><br /></p><p style="text-align: center;">
<u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">9 Index</span></u><br /></p><p style="text-align: left;">
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Cet ouvrage est présenté par les éditeurs comme constituant les <a href="http://www.ihmc.ens.fr/nouveau-testament-erasme.html?lang=fr" target="_blank">Actes de la journée d’études</a> éponyme du <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2016/12/colloque-anniversaire-sur-erasme.html" target="_blank">13 décembre 2016,</a> mais il propose un contenu très enrichi, grâce à une impressionnante bibliographie et à la liste des œuvres d'Érasme. Signalons que les interventions à la journée d'études <a href="http://www.ihmc.ens.fr/nouveau-testament-erasme-videos.html" target="_blank">sont aussi disponibles en vidéo</a>.</span></p><p style="text-align: left;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/" target="_blank">Retour au blog</a> </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
</span></p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-20798683802495443292021-03-16T15:31:00.015+01:002021-03-18T20:07:46.511+01:00Histoire d'un éditeur<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La disparition toute récente d’un grand éditeur parisien, Jean-Claude Fasquelle, nous amène à revenir sur l’itinéraire d’une maison qui s’identifie, comme toujours, à un patronyme familial et, parfois (c'est le cas ici), à la figure d’un fondateur. Rappelons-le en effet: Henri-Jean Martin a sous-titré la partie de l’<i>Histoire de l’édition française</i> consacrée au XIXe siècle «Le temps des éditeurs», faisant de ce </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">«baron de la féodalité industrielle»</span> la cheville-ouvrière de la seconde révolution du livre, celle de la mécanisation et de la librairie de masse. C’est l’éditeur qui prend l’initiative, qui élabore et qui conduit une politique de publication, qui organise et qui entretient les relations avec les auteurs, qui assure le financement et qui alimente la diffusion, avant,<i> in fine</i>, de balancer les comptes de chaque opération. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Si un certain nombre d’éditeurs conserve dans le même temps les deux activités traditionnelles de l’imprimerie, voire de la librairie d’assortiment et de commission, la fonction éditoriale est désormais clairement identifiée et isolée –n’est-elle pas retenue, comme telle, en tant que l’un des «types» les plus célèbres de la grande série des <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/05/semantique-de-lediteur-1.html" target="_blank"><i>Français peints par eux-mêmes</i></a>? Et l’éditeur, souvent croqué de manière au moins... peu favorable, n’apparaît-il pas dans nombre de titres de la littérature du temps, comme chez Flaubert et chez Maupassant? </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Nous pourrions poser par hypothèse que se lancer comme éditeur (éditeur de revue, ou éditeur d’ouvrages proprement dits) est facilité par le fait que l’installation ne nécessite pas de capital important –contrairement par ex. à l’imprimerie. Pour autant, la dimension financière est au cœur de la fonction , entre le financement du projet et, à moyen terme, le retour sur investissements: nul doute que, des capacités financières et du crédit du responsable de la maison, dépendent en grande partie le succès et la pérennité de celle-ci. C’est une stratégie tout entière qui doit être déployée en arrière-plan, du choix des textes et de la forme matérielle de leur publication à la mobilisation la plus efficace possible d’<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/01/problematique-de-la-diffusion-la.html" target="_blank">un système de distribution</a> (où la publicité monte de plus en plus en puissance) et au suivi comptable qui doit accompagner les différentes étapes. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Nous voici maintenant dans la France du Second Empire, dans une société en pleine mutation et dans une ville, Paris, qui connaît alors les bouleversements les plus profonds. C'est réellement la grande époque des banquiers, des investisseurs et des architectes, mais aussi des hommes des médias, qu’il s’agisse de l’édition ou des spectacles. Comme tant d’autres (<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/search?q=brassac&x=0&y=0" target="_blank">les Fayard</a>), les Fasquelle «montent» à Paris: ils viennent en effet du petit village d’Antilly, à la lisière du Valois et de la Picardie, où Léon Alfred Fasquelle naît le 14 janvier 1835 de Romain Victor Fasquelle et de Marie Anne Honorine Filliatre (Ad60, 5Mi2091). Le jeune homme épousera à Paris en 1868 Joséphine Charlot, mais leur fils, Noël Eugène, le futur éditeur, est né dès 1863 rue de Mazagran. La tradition pieusement recopiée d’une notice à l’autre selon laquelle ce dernier serait originaire d’Asnières-s/Seine est donc controuvée, comme on peut le vérifier par la consultation de l’état civil aux Archives des Hauts-de-Seine. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Quoi qu’il en soit, le père est désormais bien établi comme architecte, il conduira la construction d’un certain nombre de grands immeubles des «beaux quartiers» parisiens (1), depuis son cabinet du 31 rue de Londres. En 1906, il est fait chevalier de la Légion d’honneur (sur l’introduction de son fils, alors officier (2)), et il décédera le 24 avril 1917, à son domicile du 92 bd Hausmann. Signalons que sa succession professionnelle sera prise par son fils, également prénommé Alfred. </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">C’est sans doute par l’intermédiaire de ce père que le jeune Eugène débute comme commis chez Tavernier, agent de change (7 rue Drouot), mais il s’oriente bientôt vers la librairie en entrant d’abord chez Georges Charpentier (1886). Il épouse, à l’automne 1887, «Jeanne Marpon, la fille de l’éditeur bien connu» (<i>Le Figaro</i>, 2 oct. 1887). Les témoins du marié sont Arsène Houssaye et Charpentier, ceux de la mariée, Flammarion et Pichery, ce dernier «contrôleur en chef de l’Opéra» (<i>Le Figaro</i>, 26 oct. 1887). La dot de Jeanne Marpon, fille unique, est de 50 000f., outre 25 000f. en espèces (3).</span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://1.bp.blogspot.com/-_i5lNOj96xg/YFDIWoUec5I/AAAAAAAAWHE/ZxNANMChkOoe5IePrNYkDnzOylJyin9VQCLcBGAsYHQ/s522/BibFra.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="394" data-original-width="522" height="485" src="https://1.bp.blogspot.com/-_i5lNOj96xg/YFDIWoUec5I/AAAAAAAAWHE/ZxNANMChkOoe5IePrNYkDnzOylJyin9VQCLcBGAsYHQ/w640-h485/BibFra.jpg" width="640" /></a></div><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Deux ans plus tard, la mort de Charles Marpon prélude à l’association de Fasquelle et de Charpentier dans une nouvelle société en nom collectif (Charpentier et Fasquelle), fondée en 1890 au capital de 1Mf., toujours au 11 rue de Grenelle, l’adresse de Charpentier depuis quinze ans. Mais, après la disparition de son fils unique, Charpentier souhaite se retirer, et Fasquelle reste seul propriétaire de l’entreprise à compter de 1896, année qui marque par conséquent la naissance des Éditions Fasquelle (cf cliché: annonce publiée dans la <i>Bibliographie de la France</i>). Nous sommes désormais de plain pied dans le «monde», soit à Paris, soit dans la «campagne» de l’éditeur, «Les Clématites», à Houlgate –Fasquelle vient aussi pour la saison d’été à Évian (avec Flammarion, Ollendorf, Firmin-Didot, et un certain nombre d’autres...). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La politique de la maison, et les bons rapports entretenus avec les principaux quotidiens, donnent une place nouvelle à la publicité, appuyée sur l’identification de différentes collections, de la «Bibliothèque Charpentier» à la «Petite Bibliothèque Charpentier», à la «Collection parisienne illustrée» et à la «Collection polychrome» et à ses illustrations. On pourra, bien sûr, considérer que le style des «réclames» est quelque peu naïvement emphatique, mais du moins ne peut-on pas leur retirer le mérite d’être le plus clairement explicites: </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>Pour être au courant des livres en vogue les plus récents, il suffit de parcourir, à notre dernière page, le gracieux panorama des dernières publication de la librairie Charpentier et Fasquelle, qui fait preuve d’un goût et d’un éclectisme le plus heureux dans le choix de ses éditions</i> (<i>Le Gaulois</i>, 8 févr. 1897)</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>.</i> </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/--g8MIOwdSL0/YFC_yhNbRVI/AAAAAAAAWG8/eZns9vYo5AYinFI0tHRS84JGbFRcM-ZvwCLcBGAsYHQ/s1876/Blog%2BFasquelle%2BZola.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="1876" data-original-width="1268" height="640" src="https://1.bp.blogspot.com/--g8MIOwdSL0/YFC_yhNbRVI/AAAAAAAAWG8/eZns9vYo5AYinFI0tHRS84JGbFRcM-ZvwCLcBGAsYHQ/w432-h640/Blog%2BFasquelle%2BZola.jpg" width="432" /></a></span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">L’éclectisme est bien là, en effet. Se souvenant de son passage rue Drouot, Fasquelle est le principal informateur de Zola lorsque celui-ci rassemble sa documentation en vue de rédiger <i>L’Argent </i>(Paris, Charpentier, 1891). Bien évidemment, il continuera à publier l’auteur le plus important de la maison, et c’est d’ailleurs Zola qui, en 1896, lui remet les insignes de chevalier de la Légion d’honneur. Il assiste, à côté de Clémenceau et de Me Labori, au procès de 1898, où sa présence est toujours relevée par la presse (il sera aussi l’exécuteur testamentaire de l’écrivain). Pour autant, l’éditeur publie aussi des auteurs comme Léon Daudet et Maurice Barrès... À côté de textes de qualité (le <i>Cyrano</i>, d’Edmond Rostand, qui est très vite un succès de librairie) et d’auteurs importants (comme Maurice Maeterlinck), d’autres publications ne sont pas toujours de très haut vol... </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">À titre plus anecdotique, on se souvient que, comme plusieurs de ses confrères, Fasquelle refuse, à la veille de la Guerre, le manuscrit de <i>Du côté de chez Swann</i>, de Proust, lequel a été introduit par Calmette rue de Grenelle. Jacques Madeleine (<i>pseud.</i> de Jacques Normand) est alors secrétaire de la maison, et son commentaire est demeuré célèbre: </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
<i>Au bout de sept cent douze pages de ce manuscrit (sept cent douze au moins, car beaucoup de pages ont des numéros ornés d'un bis, ter, quater, quinque), après d'infinies désolations d'être noyé dans d'insondables développements et de crispantes impatiences de ne pouvoir jamais remonter à la surface, on n'a aucune, aucune notion de ce dont il s'agit. Qu'est-ce que tout cela vient faire? Qu'est-ce que tout cela signifie? Où tout cela veut-il mener? Impossible d'en rien savoir! Impossible d'en pouvoir rien dire! (…) Il ne se trouvera pas un lecteur assez robuste pour suivre un quart d'heure, d'autant que l'auteur n'y aide pas par le caractère de sa phrase, qui fuit de partout</i> (4)</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">.</span><br />Comme un certain nombre d'autres, de Hachette à Flammarion ou à Fayard, Fasquelle illustre ce moment bien particulier de la conjoncture du livre et du périodique (parmi lesquels <i>La Revue blanche</i>) où le rôle des solidarités familiales et du capitalisme familial était central. La maison entrera dans un certain déclin dans la période de l'entre deux guerres, avant d'être reprise par Grasset. Aujourd'hui, les adresses éditoriales fonctionnent généralement d'abord en tant que références historiques, qui ont surtout valeur d'affichage à l'heure des grands conglomérats emboîtés à la manière de poupées russes et structurant la branche nouvelle des médias –et des nouveaux médias.<br /></p><p></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Notes
</span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(1) Par ex. 45 rue de Courcelles (1881); 101 ave Henri Martin (1891); 60 ave Foch (1893), etc. Il est aussi l’architecte du nouvel immeuble des 26-28 rue Racine, où la Librairie Flammarion s’installe en janvier 1900. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(2) AN, AN, LH 934/67, disponible <a href="https://www.culture.gouv.fr/Espace-documentation/Bases-de-donnees/Fiches-bases-de-donnees/Leonore-l-index-des-titulaires-de-l-Ordre-de-la-Legion-d-Honneur" target="_blank">sur la base Léonore</a> (où l’on consultera aussi le dossier d’Eugène Fasquelle, avec le duplicata de son acte de naissance). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(3) AN, MCNP, LXXXV, 1503 (d’ap. Jean-Yves Mollier, <i>L’Argent et les lettres</i>). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(4) Jacques Madeleine, «Rapport de lecture» dans <i>Du côté de chez Swann</i>, éd. Antoine Compagnon, Paris, Gallimard, 1999 («Folio classique»), p. 446.</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/" target="_blank">Retour au blog</a> </span><br />
</p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-32735982612910642422021-03-11T15:59:00.002+01:002021-03-11T16:03:13.430+01:00Un manuel d'histoire du livre<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-FGDAPMTl0bk/YEovrWaJXiI/AAAAAAAAWGc/PQLM78xixK4T-1ZKNsy9aaB-gzLC6ozYACLcBGAsYHQ/s619/Yann%2BS.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="619" data-original-width="400" height="400" src="https://1.bp.blogspot.com/-FGDAPMTl0bk/YEovrWaJXiI/AAAAAAAAWGc/PQLM78xixK4T-1ZKNsy9aaB-gzLC6ozYACLcBGAsYHQ/w259-h400/Yann%2BS.jpg" width="259" /></a></span></div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Yann Sordet</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">. </span><br />
<i>Histoire du livre et de l’édition. Production & circulation, formes & mutations</i>, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Postface de Robert Darnton, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Paris, Albin Michel, 2021, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
798 p., index, ill. en coul. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
(«L’évolution de l’humanité»).</span><p></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Nous nous réjouissons vivement de pouvoir signaler la parution très récente (hier!) d’un nouveau (et très imposant) volume publié dans la collection «L’Évolution de l’humanité», et consacré à l’histoire du livre. Les historiens du livre savent, en effet, le rôle tenu par cette collection dans la constitution de leur champ de connaissances en spécialité universitaire, depuis la publication de <i>L’Apparition du livre</i> de Febvre et Martin, au tournant de 1957/1958. Deux générations plus tard, le travail porte ses fruits, puisque nous sommes arrivés à l’âge des grandes synthèses.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> Notre maître Henri-Jean Martin aurait été tout particulièrement heureux de la présente publication, lui qui comprenait l’histoire du livre non pas comme une science auxiliaire de l’histoire (ou de l’histoire littéraire), mais bien comme un domaine spécifique, que les bibliothécaires érudits étaient les mieux placés pour explorer. Et que dire des compétences de notre ami Yann Sordet, ancien directeur de la Réserve des livres rares et précieux de la Bibliothèque Sainte-Geneviève, et directeur de la Bibliothèque Mazarine, sinon qu’elles font de lui l’un des savants les mieux à même de remplir ce qui pour beaucoup d’autres s’apparenterait à une gageure?</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
On comprendra qu’il n’est pas possible de rendre compte ici dans le détail d’un véritable «pavé» de près de 800 pages, avec sept parties et cinquante-trois chapitres courts. Et on nous excusera de nous borner dans l’immédiat à reprendre ci-après la présentation brève qui en est faite par l’éditeur: </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">«De l'invention de l'écriture à la révolution numérique, l'ambitieuse synthèse de Yann Sordet, richement documentée et illustrée, retrace, des origines à nos jours, les grandes étapes et révolutions de l'histoire du livre, de sa production, circulation, réception et économie, mais aussi de ses usages, formes et mutations majeures –expansion du codex au début de l'ère chrétienne, mise au point de la typographie en Europe au XVe siècle, invention des périodiques au début du XVIIe, engagement de la librairie dans la société de consommation et mondialisation du marché de l'édition depuis le XIXe, dématérialisation des procédés au XXe siècle...</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Cette très vaste enquête embrasse ainsi l'ensemble de la production écrite, quelles que soient sa vocation –pédagogie, combat, culte, information–, et ses formes –succès de librairie parfois planétaires, almanachs, publications éphémères et imprimés du quotidien–, tout en interrogeant une ambiguïté fondatrice: à la fois objet et produit manufacturé, le livre est aussi un bien symbolique, une œuvre à la valeur identitaire forte. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Elle porte enfin une grande attention à la diversité des acteurs de cette histoire générale du livre et de l'édition: auteurs, législateurs, copistes, artistes enlumineurs ou graveurs, imprimeurs-libraires puis éditeurs..., mais aussi lecteurs, collectionneurs, bibliothécaires..., et à leurs interactions.»</span></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Parmi les billets récents</span></u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">:</span><br />
</p><p><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/03/economie-de-linformation-1.html" target="_blank">Économie de l'information (1)</a><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/01/vient-de-paraitre-un-manuel-dhistoire.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Un manuel d'histoire des bibliothèques</span></a></span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">. </span><br />
</span><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/01/nouvelle-publication-sur-la-censure.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La censure au XVIe siècle</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/12/a-paris-sous-le-second-empire.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">À Paris sous le Second Empire</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/12/le-canal-les-banquiers-et-les-medias.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Un livre en forme de chéquier</span></a><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> <br /></span></span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Retour au blog</span></a></span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
</p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-39698176480474447202021-03-07T17:14:00.004+01:002021-03-08T13:34:47.526+01:00Économie de l'information (1)<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le XIXe siècle est en France et notamment pour l’historien du livre, le siècle de la presse périodique, et au premier chef du quotidien à très grand tirage. Sans nous arrêter aujourd’hui sur l’économie même du phénomène (on sait le rôle du quotidien dans la mise en point des nouvelles machines d’imprimerie, par exemple à Paris chez Marinoni), nous en analyserons une composante plus discrète, et d’autant plus prégnante: il s’agit de l’économie (de la consommation) des nouvelles –ce que l’on désigne aujourd’hui par l’anglicisme de <i>news</i>. Nous nous appuierons pour cela sur deux citations qui nous semblent plus particulièrement significatives. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Bien sûr, la consommation des «nouvelles» a changé d’ampleur, et de nature, en notre aube du IIIe millénaire, avec les nouveaux médias et l’utilisation systématique d’Internet –ce sont les «notifications» dont les téléphones portables sont désormais bombardés. Pour autant des mutations <i>a priori </i>comparables se sont produites dans le passé. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Notre première citation date de la fin du XVIIIe siècle, et elle vient aussi nous éclairer sur le changement dans la sociologie du lectorat. Nous sommes encore dans l’économie traditionnelle des «gazettes» d'Ancien Régime, quand Louis Daniel Champy, devenu propriétaire des Forges de Framont, demande à son correspondant strasbourgeois, le libraire Levrault, de lui faire suivre ses abonnements: </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>On a souvent oublié de renouveller</i> [sic] <i>mon abonement</i> [sic] <i>pour le </i>Moniteur<i>. Dans le cas qu’on ne l’ait pas fait, qu’on ne le renouvelle pas, car c’est une gazette assez </i>[barré: <i>mauvaise</i>]<i> stérile</i> <i>(…). Peut-être aura-t-on aussi oublié de renouveller celui pour le </i>Courier françois<i>. Si on l’a oublié, qu’on ne le renouvelle pas non plus, j’aime mieux le </i>Courier de l’Égalité<i>, et en place du </i>Moniteur<i>, veuillez m’abonner pour toute autre [feuille] à votre choix. Comme il s’écoulera quelques semaines avant que je n’en reçoive, si après avoir lu vos gazettes, vous vouliez m’en envoyer une, vous me feriez bien plaisir, car à la campagne on ne peut selon moi vivre sans gazette</i> (1)<i>.</i> </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Nous sommes en 1796, et dans un environnement assez particulier: les forges de Framont-Grandfontaine, exploitées depuis le XVIe siècle, font la richesse de la <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2014/03/livres-et-bibliotheques-au-desert-dom.html">principauté de Salm</a> (Salm-Salm), jusqu’à l’annexion de celle-ci par la France (1793). Originaire de Bourgogne, Champy a dix-neuf ans lorsqu’il vient à Framont, comme adjoint de son oncle, lequel est alors régisseur des Forges au nom du prince. Lui-même en devient directeur en 1786. Au début de la Révolution, il sera favorable aux réformes, tout en se tenant longtemps en retrait de la vie politique active: il ne sera élu député de Vosges qu’en 1820, siégeant parmi les Constitutionnels, puis parmi les Libéraux</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i> </i>(cf notice de Robert Lutz, dans <i>Nouv. Dict. de biogr. alsacienne</i>)<i>.</i></span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-kMV9mxBjJRY/YET7LHrYfAI/AAAAAAAAWF8/MbIMYBUWTRMIndpw9w26x3LNerUo_6hKgCLcBGAsYHQ/s1128/Framont.png" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="850" data-original-width="1128" height="301" src="https://1.bp.blogspot.com/-kMV9mxBjJRY/YET7LHrYfAI/AAAAAAAAWF8/MbIMYBUWTRMIndpw9w26x3LNerUo_6hKgCLcBGAsYHQ/w400-h301/Framont.png" width="400" /></a></span></div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Résumons maintenant notre propos sur le commentaire de la citation en trois temps: </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">1- D’abord, le besoin de s’informer. «On ne peut (…) vivre sans gazette», ce qui répond à un véritable impératif, savoir ce qui se passe. Pour autant, nous noterons que Champy distingue explicitement la ville (où l'information est disponible) de la campagne (où il faut la faire venir), et qu'il garde le choix de ses lectures (il préfère un certain titre à un autre).</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">2- L’échange épistolaire se déploie dans le cadre qui est celui de la «librairie d’Ancien Régime»: l’espace pèse de tout son poids à l’encontre d’une circulation rapide des «nouvelles», et Champy, pourtant privilégié par la fortune, sait qu’il lui faudra attendre des jours, voire des semaines, avant de recevoir ses gazettes parisiennes au fond de sa petite vallée sous-vosgienne (notre cliché, même si quelque peu romantique, en donne l'illustration dans la décennie 1830).</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">3- Pour finir, il n’est pas possible d’occulter la problématique sociologique: Champy est une personnalité fortunée, et qui sera en mesure de payer non seulement le prix de l’abonnement, mais aussi le port jusqu’à son hameau de la nouvelle municipalité de Grandfontaine. L’abonnement reste un indicateur sociologique très efficace, surtout dès lors que l’on sort de Paris et des villes principales. Au demeurant, Champy sait qu'il peut se livrer en toute confiance à ses amis Levrault pour le choix d'un titre auquel s'abonner: nous sommes bien dans le même monde, celui des réformateurs libéraux, appartenant à la grande bourgeoisie urbaine, et partisans de l'ancien maire de Dietrich.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Sur ces trois points, la nouvelle économie de l’information apportera, en France à compter surtout de la monarchie de Juillet, un changement complet de paradigme. L’intégration de l’espace par la révolution des transports, permettra de diffuser de plus en plus largement les titres de périodiques, tandis que la nouvelle économie de la presse à grand tirage se fondera sur l’articulation entre la multiplication des exemplaires, la baisse radicale du prix de vente, et le rôle nouveau dévolu à la publicité dans le maintien d’un équilibre financier toujours indispensable. À terme, la conquête du monde rural deviendra un enjeu stratégique pour la presse quotidienne, y compris sur le plan politique.</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Avec notre seconde citation, nous verrons comment, à échéance de deux générations, le phénomène se donne directement à lire dans une économie nouvelle de l’information, c’est-à-dire dans un autre rapport au temps.</span><p></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Note</span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(1) Archives du Bas-Rhin, Fonds Berger-Levrault. Cité par Frédéric Barbier, <i>Trois cents ans de librairie et d’imprimerie…</i>, Genève, Droz, 1979, note 924 p. 446. </span><br />
</p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-39104378296298498252021-02-24T10:51:00.003+01:002021-02-25T20:30:36.797+01:00Un instrument de travail sur la Russie des Lumières<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Nous recevions il y a quelques jours la lettre ci-dessous (cf texte en italiques), dans laquelle notre collègue et ami Monsieur Vladislas Rjeoutski, à Moscou, nous informe de la mise en ligne d’un très important instrument de travail sur la production imprimée russe à l’époque des Lumières.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le XVIIIe siècle est le temps de l’acculturation de l’Empire russe, soit un phénomène impulsé d’en haut, par le tsar, et appuyé notamment sur l’introduction et les développements de la typographie en caractères mobiles, mais aussi sur une suite de réformes de grande ampleur (par ex., en 1707 l’abandon de l’ancien cyrillique, remplacé par un nouvel alphabet). Pour Pierre le Grand († 1725), qui initie le mouvement, le modèle est celui des puissances occidentales, d’où sont importés les institutions (comme l’Académie), les techniques et les pratiques (comme la typographie), et les textes (qu’il s’agisse d'importation ou de production locale). Dans un certain nombre de cas, les compétences aussi sont importées par de nouveaux venus (à l’image de Johann Caspar Taubert (1717-1753), fils d’un émigré saxon): ce sont longtemps des Allemands qui dirigent la Librairie Académique de Saint-Pétersbourg (1).</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-Pc68soa5H-E/YDYhFE9jnNI/AAAAAAAAWE8/JlXf5AANjOwziJp3dWmtg_jpJEfaJPSHACLcBGAsYHQ/s907/IMG_0608%2Bcopie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="907" data-original-width="680" height="400" src="https://1.bp.blogspot.com/-Pc68soa5H-E/YDYhFE9jnNI/AAAAAAAAWE8/JlXf5AANjOwziJp3dWmtg_jpJEfaJPSHACLcBGAsYHQ/w300-h400/IMG_0608%2Bcopie.jpg" width="300" /></a></span></div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">L’ouverture du marché russe se fait de plus en plus sensible sous Catherine II, à travers l’essor de la branche de la «librairie», la montée en puissance des professionnels d’origine russe (un personnage comme Novikov en 1779-1789), et la multiplication des traductions en russe. Pour autant, la conjoncture de la branche reste étroitement soumise aux aléas de la politique impériale, marquée par des alternances de fermeture (et de censure) et d’ouverture –à la fin de la période, le déclenchement de la Révolution française aura aussi pour effet de faire renforcer le contrôle, à Saint-Pétersbourg comme à Vienne.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">On le verra en partant à la découverte du site élaboré par Monsieur Rjeoutski: des concepts aussi importants que ceux d’acculturation, d’appropriation, de transfert, d’intermédiaire et de frontière, voire de périphérie, sont engagés au fil de l’étude de la librairie russe des Lumières. Même si l’objectif premier de l’enquête est celui de contribuer à l’histoire des idées politique, c’est peu de dire que les informations remarquables compilées, réunies et très libéralement mises à disposition intéressent plus largement l’historien du livre et l’historien des Lumières. Le commentaire inspiré à Voltaire par l’invitation de Catherine II à d’Alembert resterait-il d’actualité: «Je me souviens que dans mon enfance je n’aurais pas imaginé qu’on écrirait un jour de pareilles lettres de Moscou à un Académicien de Paris (…). Ne remarquez-vous pas que les grands exemples et les grandes leçons nous viennent souvent du Nord?» (Lettre à d’Alembert, 4 fév. 1763. Cf cliché: <i>Voyage... </i>de Lady Craven, Londres [Paris], 1789, p. 184).<br /></span><p></p><p><u>Note</u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(1) Nous ne disons rien ici de la problématique géographique, pourtant essentielle: à partir de Pierre le Grand, la Russie va faire se dilater le modèle politico-culturel occidental aux dimensions d’un continent, avec la «réunion» de l’Ukraine jusqu'à la côte de la mer Noire, et avec la progression de la </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">«frontière» </span>en Asie centrale et au-delà de l’Oural.</span></p><p><br />
<i><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Cher Ami,</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Je suis très content de pouvoir vous envoyer le lien vers une section de notre site internet consacré à la traduction de textes politiques en Russie, qui présente des données statistiques inédites sur le marché du livre en Russie pour tout le XVIIIe siècle.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Pour le moment, cette section, basée sur notre base de données qui répertorie toute la production publiée en Russie pendant cette période (à l'exception des périodiques), présente trois pages de graphiques:</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">- la part des traductions dans le corpus des livres publiés en russe, les langues d'origine des textes traduits et publiés en russe au XVIIIe siècle;</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">- l'évolution du marché du livre russe au cours du XVIIIe siècle;</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">- «dashboard» qui permet de chercher des informations selon quelques critères choisis par l'utilisateur. </span></i><br />
<i><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">On va introduire encore quelques critères ce qui va permettre avec le temps d'enrichir considérablement la palette des données statistiques présentées dans cette section.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Voici le lien vers la version de cette section en anglais: </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://krp.dhi-moskau.org/en/page/introduction" target="_blank">https://krp.dhi-moskau.org/en/page/introduction</a></span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Je vous serais reconnaissant si vous pouviez diffuser cette annonce aux collègues travaillant sur l'histoire du livre.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">En vous remerciant par avance, bien amicalement, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Vladislav Rjeoutski</span></i><br />
<i><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Deutsches Historisches Institut Moskau</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">http://www.dhi-moskau.org/</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">https://dhi-moskau.academia.edu/VladislavRJEOUTSKI</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">https://www.researchgate.net/profile/Vladislav_Rjeoutski</span></i><br />
</p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-13705324689717831172021-02-17T09:12:00.123+01:002021-02-17T13:57:15.020+01:00Les catalogues régionaux d'incunables (3)<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">L’apport des <i>Catalogues régionaux d’incunables</i> (les <i>CRI</i>, auxquels nous avons récemment consacré <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/02/les-catalogues-regionaux-dincunables.html" target="_blank">deux billets</a>) à la connaissance historique pourrait en principe figurer dans les «Introductions générales» présentées en tête de chaque volume. Pourtant, un certain glissement s’est opéré, le contenu de l’introduction prenant de plus en plus la forme d’une manière de récapitulatif des exemplaires les plus exceptionnels, des provenances les plus remarquables – par ex., <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/02/les-incunables-de-la-region-parisienne.html" target="_blank">une provenance Martin Gering</a> dans le <i>CRI</i> XXI– et des reliures les plus significatives. Inversement, la dimension proprement historique de l’enquête s’est trouvée plus occultée, même si les notices consacrées à la présentation de certains fonds se distinguent par leur précision et par leur intérêt (par ex. Rouen, dans le <i>CRI </i>XVII). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">L’exploitation des enquêtes et des recensements pourra prendre deux formes, dont la première porte sur des présentations plus ou moins savantes proposées au public sous forme d’expositions. La sortie du <i>CRI</i> I (ancienne région Champagne-Ardennes) a ainsi été suivie d’une exposition consacrée aux incunables («Les Incunables: la naissance du livre imprimé», 27 novembre 1981-28 février 1982). L’achèvement des travaux consacrés au Nord- Pas-de-Calais (Artois, Flandre, Hainaut français) a aussi permis d’organiser une exposition de 54 pièces, dont certaines réellement exceptionnelles: des documents d’archives datant de la seconde moitié du XIVe siècle illustrent d’abord la pénétration rapide du nouveau support constitué par le papier dans les villes bourguignonnes; ils sont suivis par un exemplaire très remarquable de la <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/10/une-bibliotheque-entre-manuscrits-et.html" target="_blank"><i>Bible à 42 lignes</i></a>, très probablement acquis peu après sa publication par les Bénédictins de Saint-Bertin et aujourd’hui toujours conservé à Saint-Omer (1); puis c'est un livret xylographique de la <i>Biblia pauperum</i> (apparemment un <i>unicum</i>) retrouvé à Douai (2); enfin, un <i>Speculum humanae salvationis</i> imprimé avec une technique prototypographique, probablement aux Pays-Bas (Bibliothèque de Lille) (3). Nous aurions pu y ajouter <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2016/01/leconomie-des-indulgences.html" target="_blank">une <i>Lettre d’indulgences</i></a> pour l’expédition contre les Turcs, antérieure au 5 avril 1500, et dont un exemplaire a été identifié dans les Archives municipales de Valenciennes (anciennes Archives hospitalières. Cf cliché ci-contre).</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-mGsfGytayY4/VpdmPr7wJCI/AAAAAAAATDQ/vgRAyg_Qxjcd1TgrIhgVNXVgAGDxj5OLACPcBGAYYCw/s1020/Indulgences2%2B-%2Bcopie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="679" data-original-width="1020" height="266" src="https://1.bp.blogspot.com/-mGsfGytayY4/VpdmPr7wJCI/AAAAAAAATDQ/vgRAyg_Qxjcd1TgrIhgVNXVgAGDxj5OLACPcBGAYYCw/w400-h266/Indulgences2%2B-%2Bcopie.jpg" width="400" /></a></span></div><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">L’exploitation générale du fichier bibliographique a été envisagée par un article des <i>Mélanges Louis Trénard</i> (4). Dans cette même perspective, il a paru intéressant de proposer des sujets de thèse relatifs à l’histoire du livre dans la région: Madame Hélène Servant a consacré son très remarquable travail à l’exploitation des très riches fonds des Archives municipales de Valenciennes s’agissant de à l’histoire socio-culturelle de la ville (y compris la première presse typographique de la région) dans la seconde moitié du XVe siècle (5).</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">L’exploitation des <i>Catalogues</i> amène à souligner tout particulièrement deux ensembles de problèmes, dont le premier est relatif aux sources. Pierre Aquilon écrivait, en 1996: </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>Puisqu’il s’agit de mesurer (…) la diffusion de l’imprimé dans l’Europe du XVe siècle en identifiant les exemplaires parvenus jusqu’à nous, ne serait-il pas souhaitable, comme l’ont déjà fait certains rédacteurs, de signaler non seulement les ouvrages détruits au cours des deux Guerres mondiales (Arras, Tours, Vire et Chartres (…)), mais aussi d’exploiter les inventaires, dressés du XVe au XVIIIe siècles par les bibliothécaires des communautés religieuses, hospitalières [et] universitaires, et de solliciter les répertoires des dépôts littéraires et ceux des écoles centrales établis à l’époque révolutionnaire, pour y retrouver la trace de quantité d’autres incunables disparus</i> (art. cité, p. 37)<i>.</i></span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Avouons- le, la deuxième partie de la proposition, le dépouillement systématique de sources d’archives écrasantes, relève encore de l’utopie, quand des catalogues déjà constitués peuvent au contraire exister pour certains fonds disparus –il conviendrait d’ajouter <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2015/09/vient-de-paraitre-bibliotheque.html" target="_blank">notamment Strasbourg</a> à la liste proposée par Pierre Aquilon, il est vrai pour la seule région du Centre.Val-de-Loire. Pour nous en tenir au seul exemple d’Arras, les incunables alors conservés sur place figuraient déjà dans les trois volumes publiés du <i>Catalogue</i> de Marie Pellechet (lettres <i>A</i> à <i>GRE</i>), mais la préparation du volume du <i>CRI</i> IX a permis d’identifier un jeu d’épreuves typographiques du nouveau catalogue préparé par le conservateur à la veille de 1914…, alors même que la collection serait détruite peu après et que par suite l’idée d’en publier le catalogue ait été bien évidemment abandonnée. Nous avons cependant décidé d’intégrer les exemplaires détruits dans le manuscrit du <i>Catalogue régional</i> tel que remis à l’éditeur en 1982: il s'agissait sans doute en partie de l'héritage de l'abbaye de Saint-Waast (une partie est aujourd'hui conservée à Boulogne-s/Mer), et par ailleurs, la structure des fonds arrageois s'est révélée radicalement différente de celle des fonds aujourd'hui toujours conservés dans les villes plus septentrionales, même très proches, Douai, Lille et Valenciennes. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La question de la géographie est encore plus intéressante pour nous. Le choix du cadre régional, s’il a le mérite de l’efficacité, reste discutable sur le plan historique –du moins son emploi suppose-t-il de prendre quelques précautions: même sans considérer l’histoire des collections sur près de six siècles (depuis 1450), il faut tenir compte du fait que la géographie de la France a très profondément changé au cours de la période et que, d’une manière générale, les régions administratives françaises se superposent bien moins souvent </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">à des entités historiques </span>que ne le font, par ex., les <i>Länder</i> allemands. Par ailleurs, la concentration parisienne a évidemment modifié la répartition géographique des fonds de livres anciens...</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">L’approche historique sera bien sûr la plus pertinente dans le cas de régions correspondant elles-mêmes à une réalité historique ancienne –l'essentiel du Nord- Pas-de-Calais, l’Alsace, la plus grande partie de la Lorraine, la Franche-Comté (la «comté de Bourgogne»)… On notera au passage que ces géographies régionales sont en majorité extérieures au royaume proprement dit dans son périmètre du XVe siècle. D'autres problèmes peuvent se poser à l'intérieur même du royaume: parmi les grandes principautés lui appartenant, le cas de la Bretagne apparaît pourtant comme problématique, parce que la capitale ducale, Nantes, ne fait aujourd’hui plus partie de la région de Bretagne, mais bien de celle des Pays-de-Loire</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">En définitive, l’exploitation des informations réunies par la collection des <i>CRI</i> suppose ainsi de maîtriser à la fois la géographie historique, et l’histoire des bibliothèques recensées. Bien évidemment, la mise à disposition sur Internet des résultats compilés du travail de catalogage (dans le cadre notamment du programme <i>Biblissima</i>) ouvre peu à peu des perspectives nouvelles à cette dimension de la recherche.</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> C'est peu de dire que nous nous en réjouissons.<br /></span></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Notes</span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> (1) Frédéric Barbier, «Saint-Bertin et Gutenberg» [sur la <i>Bible à 42 lignes</i> de Saint-Omer], dans <i>Le Berceau du livre: autour des incunables. Mélanges offerts au Professeur Pierre Aquilon par ses collègues, ses élèves et ses amis</i> [dir. Frédéric Barbier], Genève, Librairie Droz, 2003, p. 55-78, ill. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(2) Frédéric Barbier, «Une édition xylographique à la Bibliothèque municipale de Douai», dans <i>Revue française d'histoire du livre</i>, n° 35 (1982), p. 187-188. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(3) <i>Les Débuts du livre imprimés. Éditions du XVe siècle conservées dans les Bibliothèques de la région Nord- Pas-de-Calais</i> [réd. Frédéric Barbier], Arras, Imprimerie centrale de l’Artois, 1982, 44 p., ill</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">. </span><br />
(4) Frédéric Barbier, «Le Livre imprimé au XVe siècle dans la France du Nord», dans <i>Mélanges Louis Trénard</i>, Lille, 1984, (<i>Revue du Nord,</i> t. LXVI, n° 261-262), p. 633-651. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
(5) Hélène Servant, <i>Artistes et gens de lettres à Valenciennes à la fin du Moyen Âge (vers 1440-1507)</i>, Paris, Librairie Klincksieck, 1998.</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Billets récents</span></u></span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><br /><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/01/vient-de-paraitre-un-manuel-dhistoire.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Un manuel d'histoire des bibliothèques</span></a></span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">. </span><br />
</span><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/01/nouvelle-publication-sur-la-censure.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La censure au XVIe siècle</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/12/a-paris-sous-le-second-empire.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">À Paris sous le Second Empire</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/12/le-canal-les-banquiers-et-les-medias.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Un livre en forme de chéquier</span></a><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> <br /></span></span></p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Retour au blog</span></a></span><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
</p><p></p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-57194363977170523962021-02-13T10:31:00.003+01:002021-02-17T10:44:00.341+01:00Deux importants nouveaux usuels de référence<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i></i></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i><a href="https://1.bp.blogspot.com/-hHs2aMA20Ww/YCebJlZfEPI/AAAAAAAAWD0/1zFUkgr4xUUZ_0js2ehN0U0_-l9tQAxAACLcBGAsYHQ/s753/Blog%2B1.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="753" data-original-width="570" height="400" src="https://1.bp.blogspot.com/-hHs2aMA20Ww/YCebJlZfEPI/AAAAAAAAWD0/1zFUkgr4xUUZ_0js2ehN0U0_-l9tQAxAACLcBGAsYHQ/w303-h400/Blog%2B1.jpg" width="303" /></a></i></span></div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>Un siècle d'excellence typographique : Christophe Plantin & son officine (1555-1655)</i>, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
sous la direction de Goran Proot, Yann Sordet, Christophe Vellet, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Paris, Bibliothèque Mazarine, Éditions des Cendres ; Dibeek, Cultura Fonds Library, 2020, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
499 p., ill.</span><p></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">ISBN : 979-10-90853-16-4 et 978-2-86742-299-7</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le monde du livre célèbre le <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2019/12/commemoration-de-la-naissance-de.html" target="_blank">5e centenaire de la naissance de Christophe Plantin</a> (vers 1520-1589). Originaire de Touraine, formé à la reliure, <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/02/aux-bouches-de-lescaut-au-xvie-siecle.html" target="_blank">il s’installe vers 1549 à Anvers</a>, qui est déjà une plaque tournante du commerce international. Il y établit en 1555 les fondements de la plus vaste entreprise d’imprimerie que l’Europe d’Ancien Régime ait connue. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> Génie des affaires et typographe de talent, Plantin acquiert une position officielle avec sa nomination, en 1570, en qualité d’architypographe du roi d’Espagne Philippe II, qui règne alors sur l’ensemble des Pays-Bas. Son officine, qui a pris pour enseigne «le Compas d’Or», devient l’un des plus importants soutiens éditoriaux de la Contre-Réforme, ce qui ne l’empêche pas de se livrer à quelques activités clandestines. À sa mort, elle passe à son gendre Jan I Moretus, et reste entre les mains de la famille jusqu’au XIXe siècle. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Dès l’origine la production de Plantin se signale par son élégance. Sa correspondance, comme les archives de l’entreprise, exceptionnellement conservées, témoignent d’amples ambitions commerciales et d’une grande attention accordée aux attentes des publics et des marchés. Elles documentent aussi un soin extrême apporté à la conception des livres. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le premier siècle d’activité de la maison Plantin Moretus, particulièrement brillant, ses stratégies éditoriales et les exigences de sa production sont au cœur de cette exposition. Elle montre comment Christophe Plantin et ses successeurs ont transformé l’esthétique du livre de la Renaissance et inauguré l’ère baroque de la mise en page, en mobilisant un matériel typographique et ornemental nouveau, en promouvant la gravure sur cuivre, en sollicitant de manière privilégiée le peintre Pierre Paul Rubens ou des illustrateurs et graveurs de talent (Pieter van der Borcht et les frères Wierix, Charles de Mallery ou Cornelis Galle). Dans ce siècle d’or, l’officine plantinienne conçoit plus de 5 000 éditions, où la séduction visuelle rejoint la recherche de lisibilité et d’efficacité.</span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://1.bp.blogspot.com/-5mQrV7QQnm4/YCfWT_ofqLI/AAAAAAAAWEA/WoxgjJd6_os59pY1rXdqr6tuOfFSKi7FwCLcBGAsYHQ/s900/Blog%2BEC.png" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="900" data-original-width="594" height="400" src="https://1.bp.blogspot.com/-5mQrV7QQnm4/YCfWT_ofqLI/AAAAAAAAWEA/WoxgjJd6_os59pY1rXdqr6tuOfFSKi7FwCLcBGAsYHQ/w264-h400/Blog%2BEC.png" width="264" /></a></div><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Emmanuelle Chapron, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
<i>Livres d’école et littérature de jeunesse en France au XVIIIe siècle</i>,</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-ali:=""> Oxford Univ. Studies in the Enlightenment, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
368 p.</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> <br /></span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">ISBN : 978-1-800-34803-5</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Riche de ses éditeurs scolaires et de ses collections enfantines, le dix-neuvième siècle a-t-il inventé le marché du livre pour enfants? Dans la France du dix-huitième siècle, de nombreux acteurs s’efforcent déjà de séparer, au sein de la librairie, les lectures adaptées aux enfants et aux jeunes gens. Les rituels pédagogiques des collèges et des petites écoles, les stratégies commerciales des libraires, les préoccupations des Églises, les projets et les politiques de réforme scolaire, tous poussés par la fièvre éducative de la noblesse et de la bourgeoisie, produisent alors d’innombrables bibliothèques enfantines, plurielles et plastiques, avec ou sans murs. Cet ouvrage montre comment, à un ordre des livres dominé par les logiques des institutions scolaires et des métiers du livre, se surimpose à partir des années 1760 une nouvelle catégorie, celle du «livre d’éducation», qui ne s’identifie plus à un lieu, mais à un projet de lecture, et s’accompagne de l’émergence de nouvelles figures d’auteurs. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Alors que les études sur la littérature de jeunesse poursuivent partout leur développement et leur structuration, ce livre dialogue avec les dernières recherches européennes sur la question. À l’inverse des travaux littéraires, il part, non des auteurs et des textes, mais des objets et de leurs manipulations. Son originalité est d’apporter un regard historien sur ces questions, en articulant histoire du livre et de la librairie, histoire de l’éducation, histoire des milieux littéraires et de la condition d’auteur.</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Billets récents</span></u><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/01/vient-de-paraitre-un-manuel-dhistoire.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Un manuel d'histoire des bibliothèques</span></a></span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">. </span><br />
</span><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/01/nouvelle-publication-sur-la-censure.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La censure au XVIe siècle</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/12/a-paris-sous-le-second-empire.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">À Paris sous le Second Empire</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/12/le-canal-les-banquiers-et-les-medias.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Un livre en forme de chéquier</span></a><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> <br /></span></span></p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Retour au blog</span></a></span><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
</p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-90436363124097400282021-02-09T10:26:00.004+01:002021-02-17T10:43:12.157+01:00Les Catalogues régionaux d'incunables (2)<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Nous avons évoqué il y a quelques jours <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/02/les-incunables-de-la-region-parisienne.html" target="_blank">le recensement des incunables conservés dans les bibliothèques publiques de France</a>. Il s’agit en réalité d’un dossier ouvert depuis plus d’un siècle, puisque le premier volume du <i>Catalogue général des incunables des bibliothèques publiques de France</i>, par <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/05/documentation-sur-la-librairie-des-xixe.html" target="_blank">Marie Pellechet</a>, a été publié en 1897. Le projet est poursuivi par Louis Marie Polain, mais la publication s’interrompt au tome III (lettre G), en 1909. Un certain nombre de bibliothèques publiques disposent par ailleurs de catalogues imprimés parfois anciens, comme celles de Besançon, de Dijon ou encore de Versailles (1889), voire, bien plus tard, de Bordeaux (1974), tandis que certains grands établissements entreprennent, enfin, de publier les leurs, à commencer par l’ancienne Bibliothèque nationale, aujourd’hui Bibliothèque nationale de France (1). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Après trois générations, il est apparu nécessaire de reprendre le projet d’un recensement coordonné des incunables, aussi bien pour tenir compte des pertes (plus rarement des enrichissements des collections), que pour faire entrer en ligne de compte les modifications des normes de catalogage, et, pour finir, pour exploiter autant que possible les capacités offerts par les nouvelles techniques informatiques dans le domaine du catalogage des livres anciens (des travaux préliminaires, mais très novateurs, avaient à cet égard déjà été réalisés par Henri-Jean Matin, alors directeur de la Bibliothèque de Lyon). Le dossier du <i>Catalogue général des incunables</i> est </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">désormais </span>impulsé par Louis Desgraves (1921-1999), ancien directeur de la Bibliothèque municipale de Bordeaux et, depuis 1970, inspecteur général des bibliothèques (2). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le programme élaboré suivra le cadre des régions, et le premier volume sort en 1979, sous la responsabilité de Jean-Marie Arnoult, directeur de la Bibliothèque municipale de Châlons-s/Marne (auj. Châlons-en-Champagne), avec plus de 1500 éditions répertoriées (3). Plusieurs volumes suivent bientôt, sur les régions Languedoc-Roussillon (Montpellier), Midi-Pyrénées (Toulouse) et Pays de la Loire (Nantes). Le format bibliographique alors adopté est celui, classique, des grands catalogues d’incunables: des notices à titres courts, sauf dans le cas d’<i>unica</i>; les renvois aux catalogues de références (depuis Hain); de brèves observations sur les particularités d’exemplaires, et sur les variantes observées par rapport aux descriptions canoniques. Le catalogue lui-même est complété par un jeu de tables: table des adresses typographiques (imprimeurs et libraires, villes), tables de concordances avec les grands catalogues (H, HC, HCR; GW; Pell.), table des provenances. L’ensemble est accompagné par un cahier d’illustrations, et introduit par une introduction générale et par une présentation sommaire des différents fonds classés par institutions de conservation. </span><br /></p><p>
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le devenir de la collection des <i>CRI </i>(<i>Catalogues régionaux des incunables</i>) est étroitement lié à son histoire éditoriale: les cinq premiers volumes (4) ont été publiés sous l’égide de la Société des Bibliophiles de Guyenne, à Bordeaux. Les difficultés de la Société entraînent pourtant des retards, avant que la publication ne passe en co-édition avec la maison parisienne «Aux amateurs de livres» (t. VI à VIII, X et XI). Le rachat de Klincksieck par ce dernier éditeur fait que l’adresse devient celle de Klincksieck pour les t. XII et XIV, avant que la faillite de Klincksieck n’entraîne une nouvelle crise: à la suite d’une rencontre organisée à Paris dans les locaux de l’École normale supérieure, la publication est confiée par le ministère de la Culture à la Librairie Droz, le premier volume paraissant sous la nouvelle adresse étant celui de la Haute-Normandie (Caen), en 2005. Les volumes paraissent désormais sous l’égide de l’École pratique des Hautes Études, et sont intégrés dans la série de publication fondée par Henri-Jean Martin sous l’intitulé d’«Histoire et civilisation du livre». Ils sont préparés sous la responsabilité scientifique de Pierre Aquilon et du Centre d’études supérieures de la Renaissance (CESR) à Tours (CNRS et Université François Rabelais). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/--80hbmm0Vp0/YCJSZl85EvI/AAAAAAAAWDU/F0gJ7qbeW2k4S2NBR-oQ9HOtnOeg88s6QCLcBGAsYHQ/s907/IMGP1582%2Bcopie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="907" data-original-width="591" height="400" src="https://1.bp.blogspot.com/--80hbmm0Vp0/YCJSZl85EvI/AAAAAAAAWDU/F0gJ7qbeW2k4S2NBR-oQ9HOtnOeg88s6QCLcBGAsYHQ/w261-h400/IMGP1582%2Bcopie.jpg" width="261" /></a></span>Les aléas et la lenteur relative de la publication sont pourtant à l’origine d’un certain nombre de difficultés, dont la première réside dans l’évolution des normes de description. La plus grande partie de la production incunable conservée dans le monde est aujourd’hui connue, de sorte que l’intérêt des chercheurs porte toujours, certes, sur l’identification de nouveaux exemplaires d’éditions déjà répertoriées, ou d’unica, mais aussi, et de plus en plus, sur les particularités d’exemplaires. Par suite, la collection des <i>CRI</i> se révèle relativement hétérogène, entre ses premiers volumes (où, par ex., la présence d’une reliure remarquable, ou simplement ancienne, était notée par la simple mention de «Reliure»), et les volumes plus récemment publiés (à titre d'exemple, cf cliché ci-contre: l<i>'Hypnerotomachia</i> de la Bibliothèque de Reims, avec une importante mention d'appartenance). Inversement, les renvois aux séries de catalogues de référence ne s’imposent plus dans les mêmes conditions qu’autrefois, non plus que la publication de tables de concordances développées</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Un second phénomène fait aussi sentir ses effets, après presque un demi siècle de publication: les premiers volumes ont été en effet préparés et publiés à l’ère «pré-informatique», alors que les instruments de travail aujourd’hui disponibles sur Internet n’existaient évidemment pas, et que seules quelques-unes parmi les bibliothèques des départements disposaient des usuels nécessaires à la préparation d’un catalogue scientifique de livres anciens. Depuis lors, les développements de l’informatique ont complètement modifié les conditions du travail de catalogage et de bibliographie, au point que la question même de la publication d’un «catalogue papier» a été posée –mais nous laisserons ici de côté cette dimension de la problématique.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Bien évidemment, les aléas relatifs à l’histoire éditoriale de la collection ne sont pas restés sans influer sur le rythme de publication, au point que les retards accumulés atteignent jusqu’à quarante ans (!) pour certains volumes. C'est la cas du t. IX, consacré à l’ancienne région du Nord- Pas-de-Calais (Lille), dont le manuscrit a été remis par l’auteur (Frédéric Barbier) à l’éditeur bordelais en 1982, mais pour lequel les difficultés de l'éditeur ont retardé la publication. Dans le même temps, la richesse et l’importance des fonds catalogués poussaient les responsables de la collection à reprendre le dossier de ce volume pour en enrichir notamment la partie «particularités d’exemplaires», et à le traiter par informatique, décision heureuse mais qui a été à l’origine de nouveaux retards... Sur un autre plan, la multiplication des responsables de volumes s’accompagne d’une qualité de travail qui peut varier, ce qui est par ex. illustré à travers le cas du catalogue relatif au département du Rhône.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">L’apport des Catalogues concerne d’abord le plan de la recherche bibliographique et bibliothéconomique, mais il touche aussi la recherche proprement historique, s’agissant d’histoire des collections et des bibliothèques, d’histoire du livre au sens le plus large, d’histoire culturelle (y compris histoire des pratiques culturelles), voire d'histoire religieuse, d'histoire politique, etc. L'importance de ce troisième pan de la réflexion justifiera de lui consacrer un billet indépendant.</span><br />
</p><p></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Notes</span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(1) La Bibliothèque nationale (aujourd’hui BnF) a enfin publié son propre catalogue, le <i>CIBN</i>, en deux tomes mais huit volumes: t. I, fascicule 1, <i>Xylographes et lettre A</i>, 1992; fasc. 2, <i>B</i>, 1996; fasc. 3, <i>C-D</i>, 2006; fasc. 4, <i>E-G et suppl.</i>, 2014; t. II, fascicule 1, <i>H-L</i>, 1981; fasc. 2, <i>M-O</i>, 1982; fasc. 3, <i>P-R</i>, 1983; fasc. 4, <i>S-Z et Hebraica</i>, 1985. Un troisième tome est en préparation, qui contiendra les index, les concordances et les addenda et corrigenda. Le fonds de la Bibliothèque de l'Arsenal ne figure pas dans le <i>CIBN</i>.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(2) Denis Pallier, «Louis Desgraves (1921-1999)», dans <i>BEC</i>, 157/2 (1999), p. 675-677. Rappelons ici que Louis Desgraves est l’auteur du <i>Rapport sur le patrimoine des bibliothèques</i> remis au directeur du Livre au ministère de la Culture, en 1981. Cf Pierre Aquilon, «Les Catalogues régionaux des incunables des bibliothèques de France», dans <i>Gazette du livre médiéval</i>, 28 (1996), p. 33-37. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(3) Jean-Marie Arnoult, <i>Catalogues régionaux des incunables des bibliothèques publiques de France, 1, Bibliothèques de la Région Champagne-Ardennes</i>, Bordeaux, Société des Bibliophiles de Guyenne, 1979, XII-458-XXX p. («CRI», I)</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(4) Après la Champagne-Ardennes, il s’agit des régions Languedoc-Roussillon (1981), Midi-Pyrénées (1982), Basse-Normandie (Rouen) et Pays de Loire (Nantes) (resp. 1984 et 1987). </span><br />
</p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-65091409959680901672021-02-02T14:10:00.011+01:002021-02-17T10:43:40.457+01:00Les incunables de la région parisienne (Les catalogues régionaux d'incunables, 1)<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>Catalogues régionaux des incunables de bibliothèques publiques de France. Volume XXI. Région Île-de-France</i>, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">réd. Dominique Coq, Annie Taurant-Boulicaut, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Genève, Droz, 2020, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
441-[7] p., ill. pour partie en coul. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
(Collections de l’École pratique des Hautes Études, XII: «Histoire et civilisation du livre», 38). </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> <br /></span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">ISBN : 978 2 600 06222 0</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-wj5BRM4Hrds/YBlPENRJ7fI/AAAAAAAAWCc/R2XB0_Iim24frtA2Ap9urDeEKG7g8XW-ACLcBGAsYHQ/s600/CRI%2BXXI.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="600" data-original-width="404" height="400" src="https://1.bp.blogspot.com/-wj5BRM4Hrds/YBlPENRJ7fI/AAAAAAAAWCc/R2XB0_Iim24frtA2Ap9urDeEKG7g8XW-ACLcBGAsYHQ/w269-h400/CRI%2BXXI.jpg" width="269" /></a></span></div><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La collection des «Catalogues régionaux des bibliothèques publiques de France» (CRI) vient de s’enrichir d’un nouveau volume, volume consacré aux bibliothèques d’Île-de-France hors Paris et rédigé par Dominique Coq, avec le concours d’Annie Taurant-Boulicaut, les clichés ayant été réalisés par notre ami Pierre Aquilon. L’entreprise des <i>Catalogues</i> avait été lancée de longue date par Louis Desgraves, mais il nous souvient du jour où nous avons eu la chance de pouvoir faire se rencontrer, rue d’Ulm, le responsable scientifique de la publication (enseignant chercheur au CESR de Tours) et le directeur d’une célèbre maison d’édition, maison établie à Genève et tout particulièrement tournée vers les titres d’érudition: la rencontre a permis de donner un nouveau souffle (et une nouvelle adresse) à cette série de publications, ce dont nous pouvons toujours nous féliciter. Les volumes sont depuis lors accueillis dans la collection fondée à l’École pratique des Hautes Études par Henri-Jean Martin, conjointement à la conférence d’«Histoire et civilisation du livre» et sous le même intitulé.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Plusieurs volumes ont déjà été consacrés aux incunables conservés dans les bibliothèques d’Île-de-France, en se limitant aux bibliothèques parisiennes hors celles des grands établissements (1). Le présent volume, vingt et unième de la série, traite de cette même région, mais pour l’essentiel en dehors de Paris, soit 505 notices pour 570 exemplaires.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La distribution est caractérisée par son déséquilibre, puisque deux établissements conservent quelque presque 90% des exemplaires recensés, le reste étant dispersé entre dix-sept fonds d’importance bien moindre: en tête, la bibliothèque de Versailles (293 éditions, 312 exemplaires), puis les Archives départementales des Yvelines à Nanterre (pour la bibliothèque André Desguine, soit 149 éditions pour 155 exemplaires). Le décrochement par rapport au troisième fonds en importance, celui de la médiathèque de Meaux, est radical, puisque nous tombons alors à 23 exemplaires –soit une rupture directement signifiante de l'hétérogénéité de la série.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Une deuxième caractéristique émerge bientôt, qui concerne la part prise cet ensemble par les collections: la bibliothèque Desguine est par définition une collection, tandis que la bibliothèque de Versailles conserve notamment des exemplaires donnés par le bibliographe John Patrick Madden (70 éditions). Les deux seuls ensembles d’incunables réunis par Desguine et par Madden représentent donc 43% des exemplaires catalogués, ce dont l’interprétation des résultats s’agissant de l’histoire de la culture livresque et de l’histoire de Paris et de sa région devra impérativement tenir compte. En revanche, nous avons eu l’occasion de souligner </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">ailleurs </span>tout l’intérêt des exemplaires provenant de la bibliothèque personnelle de Louis XVI, et aujourd’hui toujours conservés à Versailles: sept exemplaires en figurent dans le présent catalogue, qui se caractérisent notamment par la large domination des textes en vernaculaire (cf p. 10).</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Parmi les exemplaires ici recensés et intéressant tout particulièrement l’historien du livre, nous noterons les <i>Postilles</i> de Nicolas de Lyre, dans leur édition parisienne de 1483 (HC 10378). On sait que l’imprimé pénètre à Paris bien avant que les presses ne soient établies sur les rives de la Seine: les Mayençais Fust et Schoeffer y diffusent leur production, et Fust lui-même décède, probablement de la peste, au cours d’un voyage d’affaires dans la capitale française en 1466 (il aurait été enterré à Saint-Victor). Dans ces mêmes années, Heynlin von Stein (Jean de La Pierre) séjourne à Bâle, et pousse peut-être jusqu’à Mayence: c’est lui qui, de concert avec le Savoyard Guillaume Fichet, élabore et réalise le projet d’importer la typographie en caractères mobiles dans le royaume. En tant que prieur du collège de Sorbonne, il dispose aisément d’<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2010/07/topographie-parisienne.html" target="_blank">un local pour abriter une première presse</a>, et il fait venir les ouvriers typographes destinés à le seconder, à savoir Ulrich Gering, Martin Krantz et Michael Friburger. Comme on le sait, les presses commencent à «gémir» à Paris en 1470 (2). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Il n’est pas nécessaire de reprendre ici le détail des activités des prototypographes parisiens. Rappelons simplement que, après le départ de Fichet pour Rome et de Heynlin pour Bâle, Crantz et Friburger quitteront eux aussi Paris (1477 ?), où Gering («magister Uldaricus») continue dès lors à conduire seul l’atelier. C’est lui qui achève, le 5 novembre 1483, une édition des <i>Postilla super Psalterium</i> de Nicolas de Lyre, dont il donne l’année suivante un exemplaire aux Dominicains de Ste-Croix de la Bretonnerie (3). L’exemplaire est aujourd’hui conservé à Versailles, et le long <i>ex dono</i> manuscrit qui suit le colophon est retranscrit dans la notice (n° 355) et reproduit dans les illustrations (pl. X). Parmi les autres mentions de provenance tout particulièrement significatives, nous remarquons encore l’achat d’une <i>Summa moralis</i> d’Antoninus Florentinus, par le poète Jean Boucher, en 1508. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">L’introduction au catalogue proprement dit propose aussi une liste des «exemplaires rares» (<i>sic</i>), des exemplaires enluminés et des «mentions singulières», comme mentions de prix d’achat ou encore fragment d'un livre de raison. Le catalogue lui-même (p. 31-231) est complété par une précieuse table des recueils, tandis que les annexes comprennent, outre les illustrations, une «Table des reliures anciennes ou à décor», la présentation des différentes institutions de conservation, et la table des lieux d’impression (à laquelle renvoie celle des imprimeurs et des libraires), pour se refermer avec l’index des provenances (lui-même suivi des armoiries et devises non identifiées). Si on pourra regretter quelques faiblesses de style (4), nous sommes enchantés, comme pour les autres catalogues «parisiens» de la série (n° XVIII et XX), d’être enfin débarrassés des sempiternelles et répétitives Tables de concordances entre les grands catalogues d’incunables, et de les voir remplacées par des notes sur les particularités d’exemplaires, notes toujours très précieuses pour l’historien...</span></p><p></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Notes</span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(1) Outre les deux volumes consacrés par la regrettée Denise Hillard aux collections de la Mazarine, le t. XVIII traite de la bibliothèque de l’École nationale supérieure des Beaux-Arts (2012), et le t. XX à un certain nombre de petites bibliothèques parisiennes, etc.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(2) Frédéric Barbier, «Émigration et transferts culturels : les typographes allemands et les débuts de l’imprimerie en France au XVe siècle», dans <i>Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres</i>, 155/1 (2011), p. 651-679</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">3)</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> Sur le prieuré de Ste-Croix de la Bretonnerie et sa bibliothèque, cf Franklin, I, p. 329 et suiv. L'auteur signale que le couvent abrite depuis 1475 le dépôt des exemplaires d'imprimés expédiés de Mayence par Peter Schoeffer. Schoeffer est en l'occurrence </span>associé avec Conrad Henkis, qui avait épousé Marguerite, veuve de Fust après le décès de celui-ci.<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(</span>4) Un exemplaire est par définition unique (p. 13), quand les exemplaires sont nécessairement conservés dans des «établissements de conservation» (p. 7), etc.</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Billets récents</span></u><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/01/vient-de-paraitre-un-manuel-dhistoire.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Un manuel d'histoire des bibliothèques</span></a></span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">. </span><br />
</span><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/01/nouvelle-publication-sur-la-censure.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La censure au XVIe siècle</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/12/a-paris-sous-le-second-empire.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">À Paris sous le Second Empire</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/12/le-canal-les-banquiers-et-les-medias.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Un livre en forme de chéquier</span></a><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> <br /></span></span></p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Retour au blog</span></a></span>
<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
</p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com4tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-44507669623606255422021-01-29T11:11:00.005+01:002021-01-29T18:04:42.360+01:00Vient de paraître: un manuel d'histoire des bibliothèques<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-2VF28HjHJQw/YBPeNsYxUZI/AAAAAAAAWBY/8tBNCBhRb98PMQ7SCShh_8nl30SmKaKnACLcBGAsYHQ/s680/IMG_0468.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="680" data-original-width="486" height="400" src="https://1.bp.blogspot.com/-2VF28HjHJQw/YBPeNsYxUZI/AAAAAAAAWBY/8tBNCBhRb98PMQ7SCShh_8nl30SmKaKnACLcBGAsYHQ/w286-h400/IMG_0468.jpg" width="286" /></a></span></div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Vient de paraître: </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Frédéric Barbier, <i>Histoire des bibliothèques, d’Alexandrie aux bibliothèques numériques</i>, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
3e éd. revue, corrigée et considérablement augmentée, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Paris, Armand Colin, 2021, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
303-[1] p., 39 ill. in texte, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
couv. ill. en coul. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
bibliographie </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
«Mnémosya».</span><p></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">ISBN 978-2-200-63012-6</span></p><p>(<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>Extrait de l’introduction</i>) L’histoire des bibliothèques, qui a fait l’objet de très nombreux travaux, nous paraît aujourd’hui devenir inactuelle: que pouvons-nous avoir de commun, à l’ère d’Internet et des nouveaux médias, avec ces lieux dont l’image reste toujours plus ou moins poussiéreuse et retirée, les bibliothèques? Le phénomène est accentué par la dématérialisation qui fonde la «troisième révolution du livre» (1) et qui permet la mise en ligne massive de nouveaux contenus: les catalogues de bibliothèque (OPAC) et les séries de métadonnées, puis les bibliothèque elles-mêmes sous forme de textes numérisés. Alors que l’économie des médias change en profondeur, il n’est donc plus, comme auparavant, nécessaire de se déplacer pour avoir accès à l’information. Or, la bibliothèque n’est-elle pas d’abord définie comme le lieu où les textes sont conservés et mis à disposition? </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Pourtant, les bibliothèques nous parlent peut-être aujourd’hui plus encore qu’hier, et la question des bibliothèques reste d’une actualité certaine: il n’est que de considérer le mouvement de construction de «médiathèques», où l’attention donnée aux fonctions des bibliothèques nationales, par rapport notamment à la problématique de l’identité. La diversité des structures de bibliothèques (bibliothèques publiques, universitaires, spécialisées, nationales, etc.) suggère que leur inactualité supposée est peut-être un leurre, mais que leurs fonctions deviennent autres: les bibliothèques répondent à un ou à des besoins «au quotidien», qu’il s’agisse d’information (tout n’est pas sur Internet) ou de récréation (on n’a jamais autant publié qu’aujourd’hui), mais aussi d’égalité (donner accès à l’information et à la formation à ceux qui n’en ont pas toujours les moyens), donc de démocratie, ou encore d’identité collective. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Malgré des avancées très réelles, nous en sommes peu ou prou, avec l’histoire des bibliothèques, au stade où en était l’histoire du livre lorsque Lucien Febvre se plaignait, en tête du premier article publié par Henri-Jean Martin dans les <i>Annales ESC</i> des années 1950: </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>L’histoire du livre,</i> terra incognita<i>. Non que fassent défaut les travaux d’érudition (...). Mais (...) l’histoire de l’imprimerie n’est que trop rarement intégrée à l’histoire générale. Des historiens «littéraires» peuvent encore disserter à longueur de journée sur leurs auteurs sans se poser les mille problèmes de l’impression, de la publication, de la rémunération, du tirage, de la clandestinité, etc., qui feraient descendre leurs travaux du ciel sur la terre. Des historiens économiques peuvent toujours ne prêter qu’une attention distraite à une industrie (…) spécifiquement capitaliste par tant de ses aspects (…). Même chose s’agissant des historiens de la religion, de la morale ou de la politique. Ils sont tous sans excuse (…). Le travail d’érudition continue à se faire –mais le travail d’histoire à s’étayer sur lui et à partir de lui: non pas. Et c’est grande pitié.</i> </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Car l’histoire des bibliothèques a longtemps été envisagée de la manière la plus classique, sous forme de monographies (du type «Histoire de la bibliothèque de …»), ou de synthèses nationales. Dans le même temps, le monde des bibliothèques reste, sur le plan professionnel, à la marge de l’université. Les bibliothécaires ne sont pas des universitaires au sens institutionnel du terme, et cette situation entraîne, tout au moins en histoire, une forme d’ignorance d’un domaine pourtant très riche: </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>[En France], les bibliothèques et leur histoire demeurent pour beaucoup [d’historiens] un sujet bien marginal, comme l’atteste la quasi absence d’allusions aux bibliothèques dans de nombreux ouvrages d’histoire culturelle ou d’histoire de l’éducation </i>(Dominique Varry, au 160e congrès de l’ABF)<i>.</i></span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Même si des ouvertures ont été faites vers l’histoire des collections, des logiques d’organisation, ou encore des pratiques de lecture et d’utilisation, l’histoire des bibliothèques doit devenir aujourd’hui autre chose qu’une histoire d’abord érudite: il conviendrait de généraliser des interrogations qui nous concernent d’autant plus que nous sommes face à une période de mutations plus sensibles et qu’il faut essayer d’évaluer les changements devant lesquels nous nous trouvons. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">L’idéalisation des objets de recherche dès lors qu’il s’agit d’histoire de l’abstrait et de la création (histoire des idées, histoire de l’art, etc.), amène souvent à juger que les considérants matériels souilleraient, d’une certaine manière, le monde des idées. L’expérience nous montre que les discussions ont été violentes, depuis le XVIIIe siècle, sur la question de savoir si le travail des auteurs pouvait ou non faire l’objet d’une rémunération financière qui aurait pour résultat d’assimiler son produit à une sorte de marchandise négociable (2). Bref, pour reprendre le beau titre proposé par Jean-Yves Mollier, l’«argent» est-il compatible avec les «lettres»? </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Pourtant, le texte ne peut pas se comprendre en tant qu’entité abstraite, puisqu’il ne se donne à voir, et à lire, que par le biais d’un certain support (une interface) dont les conditions matérielles de fonctionnement (y compris sur le plan économique et financier) influent profondément sur son contenu même, et encadrent sa réception potentielle. C’est tout l’intérêt des problématiques articulées de la «mise en livre» et de la «mise en texte», qui amènent à reconsidérer les catégories les plus générales que sont l’«auteur» (qui est le responsable du texte tel que proposé au lecteur?), le «texte» (sous les multiples formes qu’il prend), voire la «littérature». Comme l’ont souligné un certain nombre de chercheurs, de Georges Duby à Louis Holtz et à Alain de Libéra, la pensée ne se déploie que dans un environnement historique plus ou moins contraignant, et en s’appuyant sur une panoplie d’outils matériels, d’institutions et de pratiques qui en assurent ce que nous appellerons la logistique. En définitive, il existe bien </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>une histoire instrumentale de la pensée, une histoire de la lecture, de l’écriture, du livre ou de la discussion, qui, nécessairement, viendrait compliquer l’histoire des concepts et celle des institutions</i> (3)<i>.</i> </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Non seulement les conditions matérielles du travail et des activités intellectuels jouent nécessairement un rôle, mais l’influence du monde des bibliothèques sur celui des idées se fera aussi sentir par le biais des techniques spécialisées peu à peu mises au point pour le traitement des livres –avec par exemple la normalisation de la description bibliographique, ou encore l’élaboration des cadres de classement. Cette histoire instrumentale, c’est celle qui est au cœur du projet des historiens du livre et des historiens des bibliothèques, et qui sous-tend la pertinence et l’actualité de leur travail, alors que les interrogations sur les changements en cours se font toujours plus pressantes. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Nous sommes devenus aujourd’hui plus sensibles au fait que l’économie des médias, <i>alias</i> des «moyens sociaux de communication» (Henri-Jean Martin), encadre un certain nombre de catégories que nous aurions eu tendance à considérer comme données <i>a priori</i>: des catégories comme celles de texte, d’auteur, d’édition, de propriété littéraire, voire de littérature, etc., sont à envisager comme des phénomènes historiques (…).</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">[Dans cette perspective], qu’est-ce qu’une bibliothèque? La banalité de certains termes les rend paradoxalement plus transparents: si chacun croit savoir ce qu’est un livre, ou une bibliothèque, c’est parce que le mot, employé tous les jours et «sans y penser», ne semble plus poser de problèmes. En réalité, cette évidence est un leurre, et l’histoire du lexique constitue aussi, comme l’ont montré les chercheurs allemands, une voie d’accès très signifiante pour l’histoire des discours, de la pensée et des idées (4). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Le syntagme de «bibliothèque» est bien évidemment d’origine grecque: Βίβλιο-Θήχη, <i>alias</i> l’armoire des livres. La bibliothèque signifie d’abord un meuble défini par son contenu, des rouleaux (<i>volumina</i>), puis des livres en cahiers (<i>codices</i>); par extension, elle désignera la ou les pièces où ces meubles sont rangés. Le terme grec est transposé directement en latin (<i>bibliotheca</i>) et employé, par exemple, pour les nouvelles institutions fondées par les empereurs et mises à la disposition du public (les bibliothèques romaines), mais il reste rare, et sera pratiquement abandonné pendant une grande partie du Moyen Âge: l’époque lui préfère le latin <i>armarium</i>, l’armoire contenant les livres (alld. <i>Bücherschrank</i>). Le dérivé <i>armarius</i> désigne le cas échéant le personnage qui a la charge des livres, autrement dit le bibliothécaire ou le bibliothécaire-archiviste, le plus souvent dans une maison religieuse. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le terme de bibliothèque désigne aussi, par métonymie, le contenu d’un ou de plusieurs livres. L’Ancien Testament est considéré comme une «bibliothèque», de même que les poèmes homériques, parce que ce sont des textes contenant toute l’expérience humaine. Les écrits des Pères de l’Église constituent une bibliothèque, la <i>Bibliotheca Patrum</i>, tandis que La Croix du Maine et du Verdier publient à la fin du XVIe siècle leurs deux <i>Bibliothèques françoises</i>, qui sont une bibliographie nationale rétrospective (5). L’acception glissera peu à peu à celle de collection éditoriale (la «Bibliothèque verte» de la Maison Hachette). C’est par la même logique que le mot «bibliothèque» est aujourd’hui appliqué à un ensemble de textes dématérialisés et mis à disposition du lecteur par le biais d’Internet: ce sont les «bibliothèques numériques», ou «bibliothèques virtuelles», du type de <i>Google Books</i>, ou de <i>Gallica</i> pour la Bibliothèque nationale de France. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Cette polysémie est signifiante: «bibliothèque» renvoie aussi bien au domaine physique (un espace donné, des objets, etc.) qu’à un contenu abstrait (les textes constitutifs d’un certain ensemble). Le mot le plus utilisé au Moyen Âge pour désigner la bibliothèque dans son acception spatiale est celui de «librairie»…</span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-6MgV1OCpd0c/YBPehgeOOSI/AAAAAAAAWBg/mIPQ2WR8bfQ2iDyF7ezmU2YROKhuGy7VwCLcBGAsYHQ/s680/IMG_0540.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="680" data-original-width="485" height="400" src="https://1.bp.blogspot.com/-6MgV1OCpd0c/YBPehgeOOSI/AAAAAAAAWBg/mIPQ2WR8bfQ2iDyF7ezmU2YROKhuGy7VwCLcBGAsYHQ/w285-h400/IMG_0540.jpg" width="285" /></a></span></div><p></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">NB: l'ill. de couverture représente la <i>Stadtbibliothek </i>de Stuttgart, à laquelle a été décerné le prestigieux titre de </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">«</span>Bibliothèque de l'année</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">»</span> en Allemagne en 2013.</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><br /></span></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Notes </span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(1) <i>Les Trois révolutions du livre: actes du colloque international de Lyon/Villeurbanne</i>, dir. Frédéric Barbier, Genève, 2001 (Revue française d’histoire du livre, 106-109, 2000). Les 3 [trois] révolutions du livre, Paris, Musée du CNAM, PUF, 2002. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(2) Frédéric Barbier, «De la République des auteurs à la République des libraires: statut de l'auteur, fonctions et pratiques de la librairie en Allemagne au XVIIIe siècle», dans <i>L'Europe et le livre: réseaux et pratiques du négoce de librairie, XVIe-XIXe siècles</i>, Paris, Klincksieck, 1996, p. 415-449. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(3) Alain de Libéra, <i>Penser au Moyen Âge</i>, Paris, Seuil, 1996, p. 65. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(4) <i>Historische Grundbegriffe: Historisches Lexicon zur politisch-sozialen Sprache in Deutschland</i>, éd. Otto Brunner, Werner Conze, Reinhart Koselleck, Stuttgart, Klett, 1972-1997, 8 t. en 9 vol. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(5) <i>Les Bibliothèques françoises de La Croix du Maine et de Du Verdier, sieur de Vauprivas. Nouvelle édition dédiée au roi, revue, corrigée & augmentée d’un Discours sur le progrès des lettres en France (…) par M. Rigoley de Juvigny</i>, Paris, Saillant et Nyon, Michel Lambert, 1772, 6 vol.</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Billets récents</span></u><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/01/nouvelle-publication-sur-la-censure.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La censure au XVIe siècle</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/12/a-paris-sous-le-second-empire.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">À Paris sous le Second Empire</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/12/le-canal-les-banquiers-et-les-medias.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Un livre en forme de chéquier</span></a><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> <br /></span></span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Retour au blog</span></a></span>
</p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-82123825867713783002021-01-16T17:42:00.013+01:002021-01-18T13:17:32.152+01:00L'effigie de la censure<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/01/nouvelle-publication-sur-la-censure.html" target="_blank">Le très agréable petit volume</a> publié récemment par notre collègue et ami Renaud Adam attire l’attention dès la couverture: celle-ci présente en effet une image intrigante, que l’on peut dater du tournant du XVIe siècle, et dans laquelle on voit un personnage dans une position quelque peu théâtrale, jeter un livre sur un bûcher. Notre intérêt pour le thème de la folie nous pousse à demander à l’auteur quelles sont ses sources: <a href="https://www.metmuseum.org/art/collection/search/469946?searchField=All&sortBy=Relevance&ft=burning+books&offset=0&rpp=20&pos=3" target="_blank">il s’agit en fait d’un rondel</a>, lequel est conservé au <i>Cloisters Museum</i> du <i>Metropolitan Museum of Arts</i>, le <i>MET</i> de New York. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Donc, une petite pièce de verrerie: le rondel apparaît en effet au XIVe siècle, et se présente souvent en grisaille, comme c’est le cas dans notre exemple, avec des rehauts de brun et de jaune d’argent (figurant l’or). Les rondels sont utilisés pour décorer les fenêtres appartenant à des espaces plus réduits (chapelles, etc.) que ceux des grandes églises, ou à des demeures privées (on pense au genre prolifique des rondels armoriés). Selon la norme du genre, le rondel du <i>MET</i> est de petite taille (un peu plus de 21 cm), et il a été acquis auprès d’un marchand new-yorkais en 1994. La notice mentionne encore qu’il s’agit d’une pièce provenant des Pays-Bas du Nord, et datant des années 1520-1530, mais sans plus de précisions. </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Un colloque tenu à Troyes en 2016 («Le vitrail dans la demeure») est revenu sur la conjoncture et sur la problématique générale de ces pièces souvent fascinantes: </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
<i>À partir de 1450, le verre est privilégié en raison de la baisse notable de son prix. La fenêtre reçoit alors une vitrerie incolore composée de losanges dans lesquels on insère aisément une pièce de verre généralement peinte à la grisaille et au jaune d’argent appelée rondel, de 18 à 22 cm de diamètre. Le succès du rondel tient à son prix modique, à sa mobilité, à sa rapidité d’exécution et surtout à la souplesse de son insertion dans la fenêtre. L’usage d’offrir un rondel héraldique s’étend rapidement de l’aristocratie aux milieux bourgeois désireux d’afficher leur position sociale, puis aux classes moyennes souhaitant imiter l’art de vivre des classes plus aisées. Offert pour toutes sortes d’événements entre parents, amis, relations, employés, le rondel est à la portée de tous. Son iconographie, principalement héraldique, se double d’illustrations moralisatrices, de sujets tirés de l’Antiquité, de scènes historiques ou pittoresques, d’allégories. Son contenu didactique, manifeste au XVIe siècle sous l’influence de l’humanisme et de la Réforme, se renforce au siècle suivant. Certains, dessinés par de grands artistes ont une valeur picturale indéniable.</i></span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i></i></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i><a href="https://1.bp.blogspot.com/-qEJI266CQK8/YAMXYg7ugXI/AAAAAAAAWAk/_UOkq98PbSQfyDZaJzH74whcOw2HUyXwQCLcBGAsYHQ/s682/Blog%2Brondel.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="682" data-original-width="680" height="640" src="https://1.bp.blogspot.com/-qEJI266CQK8/YAMXYg7ugXI/AAAAAAAAWAk/_UOkq98PbSQfyDZaJzH74whcOw2HUyXwQCLcBGAsYHQ/w638-h640/Blog%2Brondel.jpg" width="638" /></a></i></span></div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Si nous admettons, comme l’assure la notice du <i>MET</i>, que nous sommes aux Pays-Bas dans les années 1520 (et la représentation des reliures fait effectivement penser au monde germanique et à ses marges), la géographie est celle de la piété individuelle et de la <i>devotio moderna</i>, alors même que la question commence à se poser de manière plus pressante, de savoir dans quelle mesure on devra et on pourra réguler le média, et mettre des barrières à sa diffusion incontrôlée. Un peu partout, les premiers bûchers de livres s’allument, qu’il s’agisse de titres luthériens ou, au contraire, «papistes»: à Louvain dès le début d’octobre 1520, mais aussi à Wittenberg le 10 décembre 1521, et quantités d’exemples suivent. Bientôt, les hommes aussi seront condamnés à monter sur le bûcher, et Renaud Adam a raison de souligner l’identification du texte (le livre) et de son responsable, qu’il s’agisse de l’auteur, du professionnel (imprimeur ou libraire), voire de l’utilisateur (le lecteur).
Notre rondel met donc en scène un spectacle très impressionnant, mais qui à partir de la décennie 1520 tend à devenir plus répandu dans certaines villes: la destruction des livres, en public et par le feu, autrement la mise en scène de la régulation des contenus textuels par la violence légitime. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Sur notre image, un personnage (que nous avions d’abord identifié comme un fou, mais qui pourrait plus probablement être un personnage de l’Antiquité revu à l’aune des représentations de la Renaissance, comme le montre le théâtre) brandit de la main droite un livre, tout en tenant un rouleau dans la main gauche. Devant lui, un bûcher de livres est en train de se consumer. Au-dessus des flammes, un phylactère, avec la mots: «<i>Olim gratus eram</i>» («Autrefois j’étais cher [sous-entendu: à ma bien aimée]»). On ne peut que souligner la distorsion entre le thème et la légende. En effet, la citation est tirée des <i>Élégies</i> de Properce (livre I, Él. XII): le narrateur, resté à Rome, explique qu’il a perdu l’amour de Cynthia, celle qu’il aime. Sur le petit vitrail, ce sont les livres eux-mêmes qui étaient autrefois appréciés, mais dont on se détournera désormais. Avouons-le malgré tout: la réinterprétation du propos s’agissant de jeter au feu des livres que l’on a autrefois appréciés apparaîtra quelque peu surprenante. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">D'où vient le rondel? On ne peut que penser à un environnement marqué à la fois par l’orthodoxie religieuse, et par une connaissance, caractéristique de l’humanisme, </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">une connaissance</span> des classiques de l’Antiquité </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">d’autant plus précise </span>que Properce n’est alors pas un des auteurs les plus diffusés (1). Et on ne peut à nouveau que regretter notre ignorance de détails susceptibles de contextualiser l'origine de cette pièce remarquable: peut-être une pièce de décor ayant servi pour la bibliothèque d’une institution liée à l’Église? De fait, nous connaissons d’autres exemples de l'utilis<span>ation de rondels dans les bibliothèques</span>, comme ceux de Nicolas de Lyre et de Pierre Le Mangeur (Petrus Comestor), partie d’un ensemble décorant la bibliothèque des chanoines de la cathédrale de Troyes à la fin du XVe siècle (2). En adoptant un tout autre motif que celui des «hommes illustres» et des grands auteurs, voire des scènes bibliques, notre rondel nous montrerait combien, alors même que les tensions religieuses vont toujours s’exacerbant, la propagande peut adopter des modes d’expression et des canaux auxquels nous ne penserions pas nécessairement a priori. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Il reste à solliciter les uns et les autres de nos lecteurs susceptibles d’apporter des précisions sur une pièce aussi remarquable que notre «Rondel de New York</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">»</span>. Et à remercier grandement Renaud Adam, de nous l’avoir signalée.</span><p></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Notes</span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> (1) Quatorze édition incunables d’après l’<i>ISTC</i>, dont douze italiennes, une de Paris et une de Leipzig. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(2) Véronique Chaussée, « Un rondel du XVe siècle de la bibliothèque de la cathédrale de Troyes retrouvé au Musée des Arts décoratifs à Paris », dans <i>Bulletin Monumental</i>, 155 / 3 (1997), p. 231-236 (disponible en ligne). </span><br />
</p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-11291404002667700362021-01-13T14:54:00.021+01:002021-01-16T11:36:19.098+01:00Esthétique de la diffusion (à la "Librairie nouvelle" en 1857)<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> Nous annoncions <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/12/a-paris-sous-le-second-empire.html" target="_blank">il y a quelques jours</a> (mais c’était déjà l’an dernier…) la publication d’un article consacré au statut et au rôle de la librairie de détail, et nous revenons aujourd'hui d’autant plus volontiers sur cette thématique importante qu’elle se trouve généralement bien trop négligée par les historiens du livre.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">L’innovation désigne l’un des concepts majeurs sur lesquels s’appuient l’histoire économique et, bien évidemment, l’histoire des techniques. À plusieurs reprises, ce blog a déjà insisté sur son rôle s'agissant d’histoire du livre, et sur l’intérêt d’en proposer une typologie. La thèse sur l’histoire comparée de l’industrialisation de la «librairie» en France et en Allemagne au XIXe siècle s’est en partie appuyée, sans doute pour la première fois dans notre domaine, sur la distinction entre innovation de procédé (les nouvelles machines) et innovation de produit (1), articulation qui fonde aussi en grande partie l’analyse de la <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2010/10/histoire-du-livre-et-theorie-de.html" target="_blank">«révolution gutenbergienne»</a> (2). Cette approche peut se prolonger au niveau de la typologie elle-même, permettant par exemple de montrer comment, à l’époque industrielle, l’innovation passe d’un atelier à l’autre (des presses à la composition) par un jeu subtil de décrochements et de rééquilibrages. Il conviendrait bien entendu de prendre aussi en considération les conditions de fonctionnement des branches annexes à la typographie, notamment celle de la papeterie, mais aussi de la fonderie typographique, etc. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La typologie binaire (le procédé et le produit) a été par la suite enrichie avec l'introduction d'un troisième ensemble d’innovations, que nous avons désigné comme celui de l’innovation organisationnelle. L’exemple le plus démonstratif en sera donné par l’invention, au XIXe siècle, de l’«usine à livres» (3), soit une structure dont l’organisation et le mode de fonctionnement rompent complètement avec ceux des anciens ateliers typographiques. Installer une imprimerie industrielle suppose d’innover aussi au niveau du fonctionnement même de l’entreprise, qu’il s’agisse par exemple de la prise en compte d’effectifs d’ouvriers beaucoup plus importants, de l’intégration nécessaire des ateliers les uns par rapport aux autres, ou encore de la montée en puissance de la bureaucratie et de la catégorie nouvelle des «cols blancs»</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Une autre branche d’activités devra elle aussi s’adapter –et innover– en fonction des changements touchant le processus de production des livres et des périodiques: il s’agit de la diffusion et de la distribution. Pour parler crûment, il est évidemment inutile de produire en plus grande quantité, si on ne peut pas écouler sa production dans des conditions adéquates.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le phénomène s’observe dès la fin du Moyen Âge, d'abord dans les centres les plus développés (tout particulièrement à Paris, étudié par Richard et Mary Rouse en 2000), mais aussi dans des villes de moindre importance, <a href="https://digi.ub.uni-heidelberg.de/de/bpd/glanzlichter/oberdeutsche/lauber.html" target="_blank">comme Haguenau</a>. Dès lors que le marché existe, les ateliers de copistes laïques se multiplient, dont certains s’adjoignent une activité de négoce spécialisé (pour la papeterie, mais aussi pour les manuscrits). Ces dispositifs deviennent cependant insuffisants quand, avec l’imprimerie, la production augmente dans des proportions inédites: la réponse sera d’abord donnée par les revendeurs (<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2018/12/leconomie-des-industries-polygraphiques.html" target="_blank"><i>Buchführer</i></a>), puis par les librairies de détail, dont la première représentation iconographique est peut-être celle proposée par la <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2010/02/la-danse-macabre-des-imprimeurs-un.html" target="_blank"><i>Danse macabre des imprimeurs</i></a> à Lyon en 1500. Le grand négoce de livres constituera à terme une autre phase de développement, dont la silhouette du libraire Heinrich Kepner à Nuremberg en 1543 nous donne <a href="https://hausbuecher.nuernberg.de/75-Amb-2-279-31-v/data" target="_blank">une image très frappante</a>. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La multiplication des canaux de diffusion caractérise le XVIIIe siècle, une période que l’on présente souvent comme celle d’un premier décollage de la presse périodique, du moins dans le monde occidental. Le phénomène nous confirme un point, s’agissant de la diffusion et de la distribution. Cet essor très réel de la presse se fonde en effet sur l’existence d’un marché plus important, un marché dont l’élargissement provient en partie d’une intégration géographique elle-même croissante: d’une manière générale, la circulation des informations, des exemplaires et des paiements doit être suffisamment régulière et d’un coût suffisamment accessible pour autoriser la pratique des abonnements. Autrement dit, l’innovation du secteur s’insère dans un processus de changement beaucoup plus général, et la typologie des distributeurs, du libraire-négociant au petit revendeur, voire aux personnes privées, ainsi que celle des pratiques professionnelles mises en œuvre, est en grande partie déterminée par l’ampleur et par les conditions d’accessibilité du marché potentiel. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Enfin, nous voulons maintenant nous arrêter sur les phénomènes constitutifs de la «deuxième révolution» du livre, à savoir la révolution de la librairie de masse et de l’industrialisation. Nous étions, dans les anciennes librairies, dans un petit monde fréquenté d’abord par les notabilités de l’endroit, et dont le superbe tableau de Johannes Jelgerhuis nous fournit comme le miroir, à Amsterdam en 1820 (<a href="https://www.rijksmuseum.nl/en/search/objects?q=warnars&p=1&ps=12&st=Objects&ii=3#/SK-A-662,3" target="_blank">Rijksmuseum</a>). Pour le client, il faut entrer et s’adresser à un commis ou au maître lui-même si l'on souhaite avoir accès aux livres que l’on a choisis. Pourtant, et même si nous sommes aux Pays-Bas dans l’une des géographies les plus avancées du monde, ce modèle est déjà dépassé. À Londres en effet, l’heure est à l’ouverture en direction du public: la <a href="https://www.bl.uk/collection-items/shopping-for-books-at-messrs-lackington-allen-and-cos-temple-of-the-muses-1809#" target="_blank">librairie Lackington</a>, ouverte sur <i>Finsbury Square</i> en 1784, est un établissement d’un genre nouveau, avec beaucoup d’espace, un fonds de livres considérable (on parle de 100 000 volumes), la possibilité de se servir soi-même et la disponibilité de salons spécialisés, notamment pour la présentation des exemplaires les plus précieux.</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: left;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-wVzS8CW7mb4/X_77KkJ4H0I/AAAAAAAAV_w/TTbzGkcsZuQqDmKPc8Prt1L9hVGli00FwCLcBGAsYHQ/s907/Bourdilliat.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="635" data-original-width="907" src="https://1.bp.blogspot.com/-wVzS8CW7mb4/X_77KkJ4H0I/AAAAAAAAV_w/TTbzGkcsZuQqDmKPc8Prt1L9hVGli00FwCLcBGAsYHQ/s16000/Bourdilliat.jpg" /></a></span></div>À ce stade de la présentation, nous sommes <span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">revenus là d’où nous étions partis, à savoir sur les Grands boulevards parisiens dans la décennie 1850. Le 26 décembre 1857, l’hebdomadaire du <i>Monde illustré</i> contient, en cette période cruciale consacrée aux étrennes, un article que nous pouvons considérer comme publicitaire, pour présenter au lecteur la «Librairie nouvelle», à savoir les «magasins» de son propre éditeur. Encore une fois, l’iconographie met en scène un monde relativement privilégié, si nous en jugeons par la mise des clients –des élégantes, des messieurs dûment chapeautés, des enfants, un lycéen en uniforme… Mais ce qui frappe, c’est surtout le dispositif nouveau qui est celui du grand magasin parisien (on pense au «Bon Marché»), avec des comptoirs où les volumes sont à disposition pour consulter librement, le cas échéant pour s’y plonger, après avoir trouvé refuge au fond d’un confortable fauteuil ou sur un siège. La mezzanine constitue un espace plus réservé, tandis que, au fond de la salle, se distingue la silhouette du caissier, l’ensemble étant largement éclairé au gaz. Bien entendu, on peut imaginer l’opposition entre l’aménagement recherché des locaux ouverts au public, et celui, probablement plus modeste, des services intérieurs et autres bureaux… </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">L’article que l’illustration accompagne n’est pas long. Il s’agit pratiquement d’une réclame, dont le texte a été préparé par un rédacteur, en l’occurrence Fulgence Girard (4), et sans doute attentivement relu par l’éditeur lui-même. De fait, il ne traite que des titres publiés par la «Librairie nouvelle» au moment des Fêtes, en laissant complètement de côté le local et ses aménagements. L’article qui suit est d’ailleurs consacré aux «Étrennes», avec le sous-titre: «Promenade dans les magasins de Paris». Mais, il est vrai, la </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">«Librairie nouvelle»</span> bénéficie d'une illustration à pleine page, ce qui constitue la marque d'un traitement logiquement privilégié. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La cause est entendue: le rôle de la distribution et de la diffusion doit impérativement être bien davantage pris en considération, en tant que facteur d'innovation, par les historiens du livre, dès lors qu’il s’agit d’observer et d’analyser les transformations de l’économie des médias –et la situation n’est pas différente aujourd’hui, quand nous discutons d’une éventuelle régulation à introduire dans le fonctionnement des grands «réseaux sociaux». Mais revenons une dernière fois en France sous le Second Empire. À l’époque, les grandes vitres donnant sur le boulevard donnent à voir l’intérieur lui-même du magasin (et on peut bien comprendre que cet intérieur soit pour certains quelque peu intimidant). Une génération plus tard, nous serons entrés dans la grande époque de la vitrine: cette fois, il ne s’agira plus d’attendre que le chaland entre dans la boutique, même en sollicitant son attention par des publicités, mais de l’y attirer presque mécaniquement, par les dispositifs présentés à la vue de tous ceux qui sont à l’extérieur. Nous nous réservons d’y revenir.</span><p></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Notes</span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(1) Frédéric Barbier, <i>L’Empire du livre. Le livre imprimé et la construction de l’Allemagne contemporaine (1815-1914)</i>, préf. Henri-Jean Martin, Paris, Éditions du Cerf, 1995 («Bibliothèque franco-allemande»). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(2) Frédéric Barbier, <i>L'Europe de Gutenberg. Le livre et l'invention de la société moderne occidentale (XIIIIe-XVIe siècle)</i>, Paris, Librairie Belin, 2006. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(3) Matthias Middell, «L’usine à livres: die Druck- bzw. Buchfabrik», dans <i>Rev. fr. d’histoire du livre</i>, 110-111 (2001), p. 151-173. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(4) Fulgence Girard (1807-1873), originaire de la Manche, est avocat à Avranches, où il dirige conjointement le <i>Journal d’Avranches</i>, avant d'être un temps papetier dans la vallée de la Sée. Auteur d’un certain nombre de romans, recueils de poèmes, etc., il est surtout actif dans le domaine de la presse périodique (<a href="http://dunwich.org/genea/pub/livre-fgirard.html" target="_blank">notice biographique ici</a>)</span></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Billets récents</span></u><br /><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/01/une-these-de-medecine-et-de-botanique.html" target="_blank">Une thèse de médecin<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">e</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/01/nouvelle-publication-sur-la-censure.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La censure au XVIe siècle</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/12/a-paris-sous-le-second-empire.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">À Paris sous le Second Empire</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/12/le-canal-les-banquiers-et-les-medias.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Un livre en forme de chéquier</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Retour au blog</span></a><br />
</p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com4tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-88521665071846716062021-01-09T16:29:00.010+01:002021-01-13T14:59:31.194+01:00Une thèse de médecine... mais qui traite de botanique<p></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://1.bp.blogspot.com/-430lhDxLV98/X_nIdrcNWQI/AAAAAAAAV_I/NVFu6fpYebcA02BIG4iWeYywUq2GZW6ywCLcBGAsYHQ/s680/IMG_0448%2Bcopie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="680" data-original-width="546" height="400" src="https://1.bp.blogspot.com/-430lhDxLV98/X_nIdrcNWQI/AAAAAAAAV_I/NVFu6fpYebcA02BIG4iWeYywUq2GZW6ywCLcBGAsYHQ/w321-h400/IMG_0448%2Bcopie.jpg" width="321" /></a></div><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Il convient d’égayer la grisaille de saison et, pour cela, nous pouvons aussi faire appel aux livres, et aux fleurs. Benjamin Pierre Gloxin (1765- 16 janv. (?) 1794), descend d’une famille probablement originaire de Worms mais établie en Alsace à la fin du XVIIe siècle: ce sont des pharmaciens, des médecins et des scientifiques. Le 1er décembre 1785, le jeune homme soutient sa thèse de médecine, devant un jury de l’Université de Strasbourg présidé par Jean Hermann: </span><br /><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Gloxin, Benjamin Pierre, <i>Observationes botanicae in alma Universitate Argentinensi medici ordinis consensu impetrandae veniae ergo honores et privilegia doctoris medicinae adipisciendi disputatoriis exercitiis in audortorio academivo maiori die I. Decembris MXCCLXXXV solenniter discutiendas proponit Beniamin Petrus Gloxin Colmariensis, civitatis patriae physicus designatus</i>, Argentorati [Strasbourg], e prelo Dannbachiano, stanno Rolandi et Iacobi, [1785], [6-], 26 p., 3 pl. en t.-d., 4°.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
L’Université de Strasbourg, héritière de l’ancienne Haute École fondée par Johann Sturm, a conservé son prestige au XVIIIe siècle, alors même que les universités françaises entraient dans une décadence accentuée. Elle possède une faculté de médecine, au contraire de l’université catholique (dite «Université épiscopale»). La thèse elle-même est dédiée au Magistrat de Colmar, et Gloxin y décrit plusieurs plantes nouvellement introduites au jardin de l’Université (<i>Martyniae</i>, <i>Salvia leonuroïdes</i>, <i>Cyperus aegyptiacus</i>). Les planches sont dessinées par Balz, et gravées par Jean Martin Weis: ce dernier est le fils du graveur de ville et auteur de la magnifique <i>Représentation des fêtes</i> de 1745. La personnalité du directeur de thèse, Jean Hermann (1738-1800), n’est pas non plus anodine: directeur du célèbre jardin botanique (1) et professeur à l’université, Hermann possède une très remarquable bibliothèque de travail (plus de 12 000 volumes) (2). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La thèse se présente sous la forme d’un petit cahier (l'habitude n'est pas encore celle des thèses écrasantes, de plusieurs centaines de pages), mais sa «mise en livre» spécifique est révélatrice des choix de l’auteur et de son imprimeur-libraire. Le format, in quarto, est un petit peu plus grand que celui des thèses de l’Université épiscopale, le texte est suivi des trois planches en taille-douce et, surtout, l’adresse fait référence aux caractères typographiques utilisés, à savoir ceux de Rolland et Jacob. Cette mention nous ramène à une affaire d’envergure. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">L’année 1775 a en effet vu l’installation de Beaumarchais à Kehl (3), avec une partie des poinçons rachetées après la mort de Baskerville à Birmingham (1772), pour lancer la grande édition dite du «Voltaire de Kehl»: cette édition sortira à la Société littéraire et typographique en 1783-1785. Claude Jacob, lui-même ancien élève de Baskerville, travaille alors comme graveur typographique à Kehl mais, brouillé avec le directeur de l'«imprimerie étrangère», il s’associe à Rolland, pour présenter en 1784 une requête au Magistrat de Strasbourg en vue d’obtenir l’autorisation de créer une fonderie de caractères dans cette ville. L’autorisation est donnée, le Magistrat prête 6 000 ll. pour lancer l’opération, et les requérants sont installés au Zimmerhof, à proximité de la porte des Juifs. L’édition de la thèse de Gloxin constitue ainsi un des premiers exemples de l’emploi des caractères néo-classiques copiés de Baskerville dans la capitale alsacienne. Dannbach aurait par conséquent acquis un ensemble de fontes de Rolland et Jacob Il est significatif de voir portée au titre la mention faisant référence à cette utilisation, dans une optique évidemment publicitaire. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-hyFAK9BsOLM/X_nJjdHVRuI/AAAAAAAAV_U/kx3-rpzW_4QS4xxHpa3Usg4vDoa1aG9BQCLcBGAsYHQ/s667/gloxinia.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="500" data-original-width="667" height="300" src="https://1.bp.blogspot.com/-hyFAK9BsOLM/X_nJjdHVRuI/AAAAAAAAV_U/kx3-rpzW_4QS4xxHpa3Usg4vDoa1aG9BQCLcBGAsYHQ/w400-h300/gloxinia.jpg" width="400" /></a></span> Encore un mot rapide sur l’imprimeur: Philippe Jacques Dannbach (1747-1812) vient de reprendre à Jean Steinemann (1784) l’ancienne imprimerie-librairie Kürsner. Il s’agit d’un atelier important, puisqu’il compte cinq presses et emploie dix-sept ouvriers en 1788 (AmS, VI, 686), malgré ce qu’en dit Hermann: «Quant au sieur Dannbach, la prospérité de son imprimerie n’est qu’apparente. L’impression des annonces publiques et des gazettes allemandes occupe constamment une et même deux de ses presses, alors qu’il n’a pas de privilège». Dannbach travaille notamment pour le Magistrat, mais aussi pour l’Université: une thèse telle que celle de Gloxin s’inscrit parmi les travaux de ville, autrement dit c’est une commande, payée par le candidat, et dont ce dernier assure la distribution. Nous ne savons rien, malheureusement, du tirage (peut-être cent ou deux cents exemplaires?)</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">. </span><br />
Q<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">uoi qu’il en soit, nous sommes dans un milieu éclairé d’obédience luthérienne, et dont les membres seront en majorité favorables aux réformes des années 1789. Il semble que Gloxin ait visité les Provinces-Unies en 1786 (il achète des livres à Amsterdam), il est membre de la Tabagie de Colmar, mais aussi membre étranger de l’<i>American Philosophical Sty</i> à Philadelphie (cf <i>Transactions</i>, vol. III). Surtout, il s’engage nettement pour le changement, au début de la Révolution: pour lui, «être chrétien et révolutionnaire ne paraissait pas inconciliable» (Paul Leuilliot). Procureur de la commune, il est président de la Société des amis de la Constitution à Colmar (1791-1793), puis vice-président de la Société populaire révolutionnaire des Amis de la Liberté et de l’Égalité, participant en tant que tel au culte de la Raison. Ajoutons que, comme son maître Hermann, il possédait une riche bibliothèque, pour laquelle il fait réaliser un ex-libris. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Mais Gloxin dirigeait aussi l’hôpital de Colmar, dans une période très difficile, dans la mesure où les frontières de l’est voient affluer de tous les départements les volontaires venus défendre la République. De fait, on est quelque peu effaré de voir le nombre de décès survenus à l’Hôpital de Colmar au cours de l’hiver 1793-1794... Le directeur lui aussi décède, au tout début de 1794 – il n’a pas encore trente ans. Charles Louis L’Héritier (1746-1800) immortalisera son nom en lui consacrant le genre exotique des «Gloxinia» (cf cliché).</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span></p><p></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Notes</span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(1) Le Jardin botanique a été fondé en 1617, et il est dirigé depuis lors par un certain nombre de savants de très grande valeur. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(2) Dorothée Rusque, «Un dispositif matériel et visuel constitutif de la construction du savoir naturaliste au XVIIIe siècle: la collection de livres de Jean Hermann», dans <i>HCL</i>, XI (2015), p. 95-108</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(3) À la sortie du pont du Rhin, Kehl appartient au grand-duché de Bade, et constitue pratiquement le modèle idéaltypique de ce que l'on désigne comme les presses périphériques au XVIIIe siècle.</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""></span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><u>Bibliogr.</u>: L. Blanchard fils, <i>Éloge funèbre de Benjamin Gloxin, vice-président de la Société populaire et agent national de la Commune de Colmar, prononcé à la Société populaire de Colmar, le décadi 30 nivôse de l'an second de la République</i>. Marcel Moeder, <i>Les Ex-libris alsaciens, des origines à mil huit cent quatre-vingt dix</i>, Strasbourg, A. & F. Kahn, 1931. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">CR de la thèse dans <i>Journal de médecine, chirurgie, pharmacie, &c.</i>, 67 (juin 1786), p. 595-597; <i>Journal des savants</i>, déc. 1786, p. 2453-2454 (simple signalement).</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Sur Rolland et Jacob: <i>Épreuve des caractères de la Société Typographique de Strasbourg, par Jacob, élève de Baskerville</i>. Marius Audin, <i>Les Livrets typographiques des fonderies françaises avant 1800</i>, Amsterdam, G. T. Van Heusden, 1964, cite cinq livrets publiés par Rolland et Jacob (n° 230-231 et trois p. 207 du supplément).</span></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Billets récents</span></u><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2021/01/nouvelle-publication-sur-la-censure.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La censure au XVIe siècle</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/12/a-paris-sous-le-second-empire.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">À Paris sous le Second Empire</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/12/le-canal-les-banquiers-et-les-medias.html" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Un livre en forme de chéquier</span></a><br />
<a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/" target="_blank"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Retour au blog</span></a><br />
</p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-42597549587959514192021-01-05T17:44:00.005+01:002021-01-06T08:24:37.520+01:00Nouvelle publication sur la censure<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> Renaud Adam, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
<i>Le Théâtre de la censure (XVIe et XXIe siècles). De l’ère typographique à l’ère numérique</i>, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
préf. Ralph Dekoninck, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Bruxelles, Académie royale de Belgique, 2020, </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
104 p., ill. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
(«L’Académie en poche»).</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Cet élégant petit volume revient sur une problématique classique –la mise en place de la censure au XVIe siècle–, mais en lui superposant une perspective comparatiste particulièrement bien venue: en quoi la mise en place d’une régulation du marché du livre, pour l’essentiel au XVIe siècle, fait-elle penser à des phénomènes analogues, s’agissant des «nouveaux médias», en notre aube du XXIe siècle? La théorie des «Trois révolutions du livre» (1) postulait déjà la pertinence d’une approche comparatiste non plus dans la seule géographie, mais aussi à travers la chronologie, approche mise en œuvre par un certain nombre de travaux postérieurs. Au demeurant, la perspective peut avoir aussi une dimension épistémologique, dans la mesure où la comparaison peut n’être pas explicitement affichée dans le discours, mais bien utilisée dans la démonstration (les phénomènes des années 1990-2020 éclairent sur ceux des années 1450-1480, et inversement). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Renaud Adam est aujourd’hui l’un des meilleurs connaisseurs de l’histoire du livre dans les anciens pays bourguignons (2): <i>de facto</i>, cette géographie est celle traitée avant tout par son livre, avec en arrière-plan l'espace du Saint-Empire et de l’Espagne, le reste de l’Europe étant plus ou moins laissé de côté (la France, et, même si dans une mesure légèrement moindre, l’Angleterre). L’auteur a pleinement raison d’insister d’entrée sur le point-clé: l’émergence et le succès d’une nouvelle technologie des médias, qu’il s’agisse de la typographie en caractères mobiles ou des «nouveaux médias» des années 2000, pose aux contemporains un certain nombre de problèmes inédits, dont les moindres ne concernent pas les catégories supposées encadrer leur utilisation –on sait combien les discussions sur la taxation des bénéfices des GAFA, ou encore sur la responsabilité des réseaux sociaux quant au contenu des messages mis en ligne sur ces mêmes réseaux, sont aujourd’hui à l’ordre du jour. Rien de différent autour de 1500, alors même que l’on prend peu à peu conscience des possibilités nouvelles qu’ouvre l’imprimé, et que la question se pose, de la nécessité –ou non– d’en réguler l’emploi. Cette évolution couvre un délai de deux générations, de sorte que Renaud Adam ouvre avec justesse son propos avec le début du XVIe siècle. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Un second point, très remarquable, retient l’attention de l’auteur, qui concerne la problématique de la publicité: censure et répression sont mises en scène, en faisant souvent appel à un élément central, celui du «feu purificateur» lequel, au sens propre, réduit en cendres toute forme de pensée hétérodoxe, tandis que le cérémonial suivi s’apparente à une forme de théâtre moralisateur. Nous sommes dans une approche très bien venue, et qui s'apparente à celle de l’anthropologie historique. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Le premier chapitre envisage le temps de la censure répressive (3). Même si les phénomènes ici présentés sont plus englobant, il faut reconnaître que la mort de Cisneros, à quelques jour de l’affichage des 95 thèses, fait de l’année 1517 une date emblématique. Dans les années qui suivent, la répression orchestrée par le pape et par l’empereur dans les «anciens Pays-Bas» vise avant tout à interdire toute diffusion des écrits luthériens. D’autres problèmes sont abordés, s’agissant notamment de la position des professionnels du livre (Thierry Martens à Louvain), ou encore des difficultés de faire connaître les différents textes réglementaires (nécessité de traduire en vernaculaire, organisation de lectures en public, etc.). Les professionnels du livre, qu’ils soient imprimeurs, libraires ou relieurs, pourront eux aussi être condamnés et exécutés à compter de la décennie 1540, avant que les dispositions à suivre ne leur soient précisées par le premier <i>Index</i> de Louvain, sorti en 1546.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-gIGGvTYWmys/X_SW9WQG_wI/AAAAAAAAV-o/otkkSTzH8lYfJnT0Mi6MKMP86C9C2kwfACLcBGAsYHQ/s1020/IMG_8980%2Bcopie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="1020" data-original-width="675" height="640" src="https://1.bp.blogspot.com/-gIGGvTYWmys/X_SW9WQG_wI/AAAAAAAAV-o/otkkSTzH8lYfJnT0Mi6MKMP86C9C2kwfACLcBGAsYHQ/w424-h640/IMG_8980%2Bcopie.jpg" width="424" /></a></span></div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le deuxième chapitre traitera de cette forme particulière de censure qu’est la censure expurgatoire, et il s’ouvre avec la «destruction des images» à Steenvoorde en août 1566. La «furie iconoclaste» se répand dès lors très vite, jusqu’à la vallée de l’Escaut et à Anvers –et des livres aussi, voire des bibliothèques entières, sont détruits. Par la suite, face à la répression orchestrée par le Conseil des troubles, les imprimeurs et libraires cherchent à s’abriter en utilisant pour la première fois des fausses adresses (p. 51 et suiv.) ou en publiant de manière anonyme. Dans le même temps, des visites sont conduites dans les ateliers et dans les boutiques pour identifier et détruire les éventuels exemplaires de titres interdits. Enfin, le système, étonnamment lourd, de l’expurgation est mis en place à partir de 1570-1571, avec une pratique variable selon que les passages caviardés sont rendus plus ou moins illisibles (cf ill. 3 et 4). Désormais, les textes des grands réformateurs ne seront plus imprimés sur place, mais le plus souvent dans des villes passées à la Réforme, comme Genève, d’où on les achemine vers les Pays-Bas notamment par l’intermédiaire de négociants de Tournai (p. 63-64). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> Le troisième chapitre reprend la problématique du «théâtre de la censure», approche présentée par l'auteur comme caractéristique du règne de Philippe II (4). Les cérémonies suivent un rituel soigneusement théâtralisé (notamment s’agissant de la destruction par le feu), tandis que l’action du pouvoir est médiatisée par le recours à l’imprimé (placards, plaquettes, etc.), à l’image, voire à l’oralisation (crieurs publics). La pesée des résultats de la répression est évidemment difficile, mais les sources tendent à suggérer que la destruction entière d’un texte publié mais interdit reste exceptionnelle. En revanche, l’«héritage scribal» des Aztèques et des Mayas est pratiquement anéanti par les Espagnols (p. 76). L’arrivée des archiducs, Albert et Isabelle, en 1598, marquera l’entrée dans une conjoncture plus apaisée: l’Église tridentine a triomphé aux Pays-Bas (surtout Pays-Bas du sud), et par suite la répression devient moins sensible. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le quatrième et dernier chapitre, enfin, vise à répondre, même rapidement, à l’enjeu posé en tête du volume: une comparaison des conditions de fonctionnement de la censure face aux changements du système des médias, est-elle possible, entre le XVIe siècle et l’aube de notre XXIe siècle? L’auteur souligne le paradoxe qui fait de la «grande conversion numérique» un temps de difficultés plus grandes pour accéder librement à une information (ou à des contenus?) fiables (p. 80). Plus que la censure proprement dite, du moins dans nos sociétés occidentales avancées, deux phénomènes conjuguent leurs effets pour biaiser l’information: il s’agit d’abord du «tribunal des réseaux sociaux», dont la violence se révèle d’autant plus grande qu’elle s’articule avec une irresponsabilité de fait. Mais il s’agit aussi du déluge des informations non contrôlées, voire des fausses informations (les <i>fake news</i>), que la très grande majorité des utilisateurs n’est en rien armée pour traiter, encore moins pour critiquer. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Parmi les effets secondaires de cette évolution de fond, figure la volonté de ne pas s’exposer, et donc le privilège de fait donné au «politiquement correct», voire à l’autocensure. La dernière édition de l’<i>Index</i> est publiée en 1948 mais, comme Renaud Adam le souligne, l’utilisation systématique des algorithmes par les moteurs de recherche a pour effet d’en opacifier les résultats et de ré-instituer une forme de censure d’autant plus dangereuse que, précisément, elle ne dira pas son nom. Aujourd’hui comme au XVIe siècle, la question reste ainsi posée, de l’équilibre à instaurer entre les dispositifs de régulation éventuellement mis en place par le pouvoir politique, et les règles suivies par les acteurs privés. Nous sommes très reconnaissants à Renaud Adam de fixer le projecteur de l’historien sur une question dont on sait la place stratégique qu’elle occupe aujourd’hui. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> Même si on ne saurait demander à ce petit volume ce qu’il n’est pas censé nous apporter, nous pensons qu’il aurait préférable d’afficher plus clairement (au titre?) la délimitation géo-historique adoptée au fil du texte. De même, l’extension des possessions de Charles Quint et de ses deux successeurs, son frère Ferdinand et son fils Philippe II, pose-t-elle la question des distorsions sensibles dans la conjoncture: la chronologie des phénomènes liés à la censure n’est pas la même, selon que l’on se trouve aux «Pays-Bas», dans les territoires patrimoniaux de la famille de Habsbourg, dans les autres territoires appartenant au Saint Empire, dans certaines possessions italiennes ou dans la péninsule Ibérique. La présence même du souverain et de sa cour itinérante ne représente certes pas un enjeu secondaire, le départ de l’Empereur, en 1529, marquant par exemple, comme on sait, le déclin de l’influence érasmienne en Espagne et préludant au raidissement tragique des positions des uns et des autres. Mais les contraintes matérielles de la collection rendaient illusoire d’élargir encore la perspective, et il faut être pleinement gré à Renaud Adam de nous donner avec un réel bonheur une analyse très informée et pertinente d’un phénomène aussi complexe que celui de la régulation des médias au XVIe siècle, et de nous suggérer, <i>in fine</i>, un certain nombre de questions susceptibles d’alimenter la réflexion à venir.</span><p></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Notes </span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
(1) <i>Les Trois révolutions du livre: actes du colloque international de Lyon/Villeurbanne (1998)</i>, dir. Frédéric Barbier, Genève, Droz, 2001, 343 p. (Numéro spécial de la <i>RFHL</i>, 106-109, 2000), notamment l’introduction, «D’une mutation l’autre: les temps longs de l’histoire du livre», p. 7-18. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(2) Parmi une très riche bibliographie, bornons-nous à rappeler la belle étude consacrée par Renaud Adam à Thierry Martens: <i>Jean de Westphalie et Thierry Martens. La découverte de la </i>Logica vetus <i>(1474) et les débuts de l’imprimerie dans les Pays-Bas méridionaux (avec un fac-similé)</i>, Turnhout, Brepols, Musée de la Maison d’Érasme, KBR Be, 2009, [et la reprod. en fac-similé] («Nugae humanisticae», 8). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> (3) <i>«Maudits livres». La réception de Luther & les origines de la Réforme en France</i> [catalogue d'exposition], Paris, Bibliothèque Mazarine, Éditions des Cendres, 2018, 339 p., ill. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(4) Rappelons que, après l’abdication de Charles Quint (1555), les couronnes sont partagées: le frère de l’empereur, Ferdinand, succède à celui-ci dans les territoires des Habsbourg, tandis que son fils, Philippe II, aura l’Espagne, les anciens territoires bourguignons (y compris le comté de Bourgogne) et l’empire d’outre-mer.</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Cliché: © Bibliothèque de la Ville de Loches. </span></p><p><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Retour au blog</span></a><br />
</p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-75186951180387067312020-12-31T16:09:00.006+01:002020-12-31T17:36:28.490+01:00À Paris sous le Second Empire<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le temps à Paris étant en ce moment ce que l’on appelle un «temps de saison» (le 31 décembre…) profitons-en pour évoquer des saisons plus propices, avec les «Courses du printemps. Régates de Saint-Cloud» en 1859 (cliché 1), et l’«Embarcadère, sur le quai d’Orsay, des bateaux-omnibus à vapeur servant au transport des voyageurs pour l’Exposition universelle» de 1867 (cliché 2).</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-NnBwlsyBZfc/X-3o6nxDadI/AAAAAAAAV-A/NBG7CPKBFncxlyHAXqJNrrLwEjWcMqx0gCLcBGAsYHQ/s1023/IMG_0434%2Bcopie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="680" data-original-width="1023" height="266" src="https://1.bp.blogspot.com/-NnBwlsyBZfc/X-3o6nxDadI/AAAAAAAAV-A/NBG7CPKBFncxlyHAXqJNrrLwEjWcMqx0gCLcBGAsYHQ/w400-h266/IMG_0434%2Bcopie.jpg" width="400" /></a></span>Ces deux gravures, tirées du <i>Monde illustré</i> sont d'apparence modeste, mais leur publication attire l’attention sur plusieurs phénomènes qui intéressent très directement l’histoire du livre. Il s’agit, d’abord, de la conjoncture éditoriale: lancé en 1857 sur le modèle de <i>L’Illustration</i>, <i>Le Monde illustré</i> est un hebdomadaire d’actualités, publié sur 16 pages en grand format, et associant le texte et une illustration de qualité réalisée en bois de bout. Le feuilleton est présenté en bas de page (le premier titre est celui des <i>Dames vertes</i>, de George Sand). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le fondateur est un libraire parisien, Achille Bourdilliat (1818-1882), dont la «Librairie nouvelle» (pour laquelle il est associé avec Jacottet ) ouvre 15 bd des Italiens, au coin de la rue de Grammont et «en face de la Maison dorée» (l'un des restaurants les plus en vue de la capitale). Parallèlement, Bourdilliat a acheté une imprimerie, 15 rue Bréda. La «Librairie nouvelle» se lance notamment, dès 1854, dans l’édition à bon marché, avec une collection en petit format vendue à 1f. (0,75f. net) le volume.</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> Mais dès les années 1860, Bourdilliat doit céder la main dans ses différentes entreprises face aux grands libraires éditeurs capitalistes: son affaire sera notamment reprise par Michel Lévy († 1875), avant que celui-ci ne rétrocède le titre du <i>Monde illustré</i> à Paul Dalloz († 1887), lequel se constitue progressivement un véritable empire de presse. Signalons que, en 1862, le liquidateur de la «Librairie nouvelle», Martinet, avait commencé à traiter avec Lacroix, Verboekhoven et Cie, de Bruxelles, lesquels lui feront un procès après qu’il ait en définitive vendu à Michel Lévy… </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le succès du <i>Monde illustré</i> est d’abord dû à son prix: 30 centimes par numéro à Paris, 35 centimes dans les départements, et un abonnement de un an pour 18f. (soit à peu près 35 centimes, port compris). Le titre a été exempté du droit de timbre, ce qui contribue bien évidemment à en diminuer le coût. La qualité des contributeurs constitue un autre puissant argument: on citera des noms aussi connus que ceux d’Alexandre Dumas, de Paul Féval, de George Sand, etc., ou encore de Gustave Doré. Enfin, le contenu combine le traitement du «grand événement» (par ex., l’Exposition de 1867) avec certains articles dont la perspective est plus mondaine et d’autres relevant de ce que nous pourrions appeler la «vie parisienne». Le tirage aurait atteint le chiffre de 30 000.</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""></span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-b5YL4MSZG3Q/X-3pVPxsvmI/AAAAAAAAV-I/qsF-wroUPikFC9-cEl4Y4ZVxlZTK6TXXQCLcBGAsYHQ/s1134/IMG_0435%2Bcopie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="657" data-original-width="1134" height="231" src="https://1.bp.blogspot.com/-b5YL4MSZG3Q/X-3pVPxsvmI/AAAAAAAAV-I/qsF-wroUPikFC9-cEl4Y4ZVxlZTK6TXXQCLcBGAsYHQ/w400-h231/IMG_0435%2Bcopie.jpg" width="400" /></a></span></div><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Outre leur dimension artistique (le talent et le métier des dessinateurs et des graveurs), nos deux gravures sont aussi des sources historiques, qui nous informent sur les transformations de Paris et de sa région au mitant du XIXe siècle –la richesse iconographique du titre en fait une véritable mine, qui mériterait d’être plus systématiquement exploitée. Voici, d’abord, le déplacement de la librairie parisienne, traditionnellement installée sur la rive gauche (dans le quartier de l’Université), et qui se transporte désormais sur la rive droite. Plusieurs grandes maisons, des éditeurs industriels, des librairies à la mode et certains sièges de la presse périodique, s’établissent en effet dans les nouveaux quartiers d’affaires, entre la Bourse, l’Opéra et l’«embarcadère du Havre» –<i>alias</i> aujourd’hui la Gare Saint-Lazare– et sur les «Grands boulevards». Les frères Lévy avaient commencé près de la Comédie française, mais se transportent eux aussi, le succès venant, dans le quartier de l’Opéra (3 rue Auber). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le boulevard des Italiens s’impose alors comme une véritable galerie à ciel ouvert, où les nouvelles maisons et les nouveaux titres doivent être vus (la </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">«</span>Librairie Nouvelle</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">»</span>, le périodique de <i>La Vie moderne</i>, etc.), mais où tous «ceux qui comptent» dans la vie littéraire et artistique de la capitale se retrouvent aussi tous les soirs. Les Goncourt ne font pas exception, qui visitent à l'occasion leur éditeur: «J’entre aujourd’hui [2 décembre 1861] à la Librairie nouvelle, où j’entrevois, comme se cachant dans le fond, le Bourdilliat. Je lui demande où j’en suis de <i>Sœur Philomène</i>. Un commis fait semblant de chercher dans des livres et Bourdilliat me répond: «huit cents»… Vraiment, la loi devrait donner une espèce de défense à l’homme de lettres contre ce voleur de confiance qu’on appelle un éditeur…»</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La seconde dimension de la topographie nous retiendra moins longuement, qui relève de la ville «hors les murs». L’ouverture de la première ligne de chemin de fer pour les voyageurs, en France, date de 1837, entre Paris et Le Pecq (Saint-Germain-en-Laye), et elle est rapidement suivie par les deux lignes de Versailles, dont l’une passe à Saint-Cloud. Selon que le réseau se développera, il deviendra possible de venir en excursion dans les petites villes pittoresques de Seine-et-Oise (par ex., pour y suivre les régates), d’y prendre une villégiature pour y passer le week-end, avant, finalement, de s’installer «à la campagne» et de ne venir plus en ville que pour le travail. Dès 1846, un site comme celui de l’ile de Chatou devient lieu de plaisantes parties de campagnes, bientôt illustrées par la littérature (Maupassant), avant de l’être par les grands peintres impressionnistes (Renoir). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Feuilleter <i>Le Monde illustré</i> permet ainsi de découvrir quantité d’autres vues significatives, dont nous retiendrons tout particulièrement l’une, pour conclure, à savoir la vue de l’intérieur de la «Librairie nouvelle», illustrant excellemment les transformations de la pratique du commerce de détail à l’ère de l’industrialisation. Mais c’est là un sujet d’importance, et que nous réservons pour l’année prochaine... c'est-à-dire à partir de demain.</span></p><p><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Retour au blog </span></a><br />
</p><p></p><p></p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-80936295637820477442020-12-27T16:55:00.018+01:002020-12-28T15:20:45.862+01:00Le canal, les banquiers et les médias<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">L’antisémitisme est comparable à ce que l’on pourrait qualifier de «longue maladie», une maladie dont il est possible de guérir, avec le temps, mais dont on s’attend toujours à ce qu’elle revienne, et parfois dans des circonstances absolument inattendues (en France par ex., à l'occasion du <a href="https://www.lepoint.fr/debats/miss-provence-insultee-ou-le-signe-d-un-antisemitisme-banalise-23-12-2020-2406882_2.php" target="_blank">récent concours de Miss France</a>). Un coup d’œil sur le passé confirme la banalité d’une affection bien trop courante, tout en nous permettant de faire un petit peu d’histoire du livre. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Emmanuel Poiré (1858-1909) descend d’une famille lorraine (Montigny-lès-Metz). Son grand-père est blessé lors de la campagne de Russie de 1812, à laquelle il participait comme chef d’escadron aux chasseurs de la Garde. Resté sur place, ce grand-père se marie, et il deviendra maître d’armes de la couronne impériale. Emmanuel quant à lui rentre en France en 1877, où il se lance avec succès dans le dessin satirique, même si dans son esprit il s'agit d'un simple prélude à une carrière de peintre. Il choisit comme pseudonyme la transcription du russe «<i>Karandach</i>», crayon</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Caran d’Ache travaille beaucoup comme peintre militaire, mais il est surtout connu comme un caricaturiste de grand talent. Sur le plan politique, c’est un réactionnaire, partisan du Général Boulanger, nationaliste et antisémite. Il se signalera bien évidemment aussi comme anti-dreyfusard, notamment en tant que co-fondateur de l’hebdomadaire <i>Psst</i></span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">. </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Caran d'Ache est notamment célèbre pour son excellent dessin du «Dîner en famille», dessin qui ne présente d'ailleurs aucun caractère d'antisémitisme, et qui est publié dans <i>Le Figaro </i>du 14 février 1898 : «Surtout ! Ne parlons pas de l’affaire Dreyfus!» et, à la case suivante, <a href="https://www.lhistoire.fr/les-grandes-heures-de-la-presse/caran-dache-%C2%AB-ils-en-ont-parl%C3%A9-%C2%BB" target="_blank">«Ils en ont parlé…»</a></span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">.</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> <br /></span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Après le suicide de Boulanger à Bruxelles en 1891, la vie parlementaire redevient plus calme à Paris, quand le scandale de Panama, qui éclate dès l’année suivante, semble donner l’occasion à ses adversaires d’abattre la République (1). Ici, il convient de rappeler brièvement les faits. La Compagnie de Panama a été fondée à l’initiative de Ferdinand de Lesseps en 1880. On a prévu un coût total de 1,2Md f.-or, pour lequel les emprunts sont aussitôt lancés. Mais les difficultés ont été largement sous-estimées, les plus grandes banques ne s’engagent pas réellement, et la gestion financière est mal conduite. Devant l’impossibilité de couvrir la première émission (400M f., dès 1879), «la communication prend le relais de la finance». L’essentiel des fonds sera en définitive apporté par les petits épargnants français, mais une grande partie en sera aussi consacrée à la publicité dans la presse, et au trafic d’influences</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">. </span><br />
L<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">es études prévisionnelles n’ont pas été suffisamment poussées et, toujours à la recherche de nouveaux capitaux, la Compagnie s’engage à partir de 1885 dans une véritable fuite en avant, qui culmine avec le projet de lancer pour 600M f. d’obligations à lots: les remboursements se feraient par tirage au sort, et la prime (le «lot») serait variable. Or, les loteries sont alors interdites en France, et il faut donc une loi autorisant l’opération. Des parlementaires sont achetés, et la loi effectivement votée (9 juin 1888), sans pour autant que la faillite puisse être évitée (1889): le passif approche 1,5Md f., pour un actif de seulement 163 millions… Quelque 80 000 souscripteurs perdent leur investissement<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-mIV5JvA1iHQ/X-it2w3J_mI/AAAAAAAAV9c/AspTyQVVlkQgLMRmouIHs5nXfLlS8nwwwCLcBGAsYHQ/s1020/IMG_0403%2Bcopie.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="467" data-original-width="1020" height="294" src="https://1.bp.blogspot.com/-mIV5JvA1iHQ/X-it2w3J_mI/AAAAAAAAV9c/AspTyQVVlkQgLMRmouIHs5nXfLlS8nwwwCLcBGAsYHQ/w640-h294/IMG_0403%2Bcopie.jpg" width="640" /></a></span></span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">.</span></span><br /></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Le scandale éclate au grand jour, et une instruction est ouverte contre les administrateurs: des parlementaires sont compromis tandis que, la veille de sa comparution, le principal intermédiaire, le baron Jacques de Reinach, meurt de manière suspecte dans son hôtel «si élégant, si aimable et si accueillant» (<i>Le Figaro</i>, 21 nov. 1892) du 20 rue Murillo (nuit du 19-20 nov. 1892). On soupçonne alors, non sans vraisemblance, un suicide par empoisonnement.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Notre propos n’est évidemment pas de reprendre ici l’affaire du Panama pour elle-même, mais de souligner combien elle peut être liée à la question de la «publicistique» et au monde des médias, au premier rang desquels la presse périodique. Les Reinach appartiennent au groupe des émigrés juifs venus de l’Est, installés à Paris en plusieurs vagues à partir de la Révolution, et dont la plupart n’ont aucune fortune mais qui parfois réussissent de manière spectaculaire dans les affaires de banque (on pense évidemment d’abord aux Rothschild, aux Fould (2), et à quelques autres, que Balzac nous croque sous la figure de Frédéric Nucingen). La famille Reinach est quant à elle originaire de Mayence, où le bisaïeul était rabbin; une branche s’établit à Francfort, où Adolph, futur baron von Reinach (1814-1879), exerce comme banquier –il est aussi consul du royaume de Belgique. Sa femme, Clementine Oppenheim, appartient en effet à la grande famille de banquiers actifs entre Cologne, Bruxelles et Londres, mais aussi Paris. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> Paris, précisément, au temps de la «fête impériale»: né à Francfort en 1840, le jeune Jakob Adolph (Jacques) se lance dans la capitale française, y épouse sa cousine Fanny Emden, et y fonde la même année (1863), avec son nouveau beau-frère, Eduard Elias Kohn, une maison de banque (Kohn, Reinach et Cie) (3). Le baron de Reinach est un homme d’argent, mais qui sait aussi à la perfection jouer de ses multiples relations et de son appartenance au «monde». Il a sa loge à l’avant-scène </span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">des Italiens</span>, il est un habitué de Trouville, tandis que les quinze loges du Casino de Nice donnent encore, à la «fête musicale» du 12 février 1892, la revue des personnalités en vue, avec le prince Stirbey, le prince de Prusse, M. Krupp, le baron de Rothschild, le baron de Reinach, et d'autres (<i>Le Figaro</i>, 18 fév., p. 3). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Dans les années 1879, Reinach lui-même, à titre personnel, et la banque Kohn, Reinach et Cie sont engagés au premier plan dans les affaires de Panama (cf <i>Le Figaro</i>, 6 janv. 1879). La crise consécutive à la mise en cessation de paiements culminera avec la démission du cabinet Loubet (28 nov. 1892): le maître-chanteur Cornelius Hertz s’est réfugié à Londres, Clémenceau est inquiété, plus de cent députés sont accusés «d’avoir touché», de même que des ministres (jusqu’à 300 000f. pour Baïhaut), sans oublier les principaux titres de la presse périodique (pour la publicité)… Le néologisme de «chéquard» est alors créé, mais le procès, ouvert le 10 janvier 1893, n’aboutira en définitive qu’à trois condamnations.</span></p><p></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Mais revenons à Caran d'Ache: le format de la publication choisi par lui, de manière assez géniale, est celui… d’un carnet de chèques. Chaque feuillet porte de un à trois dessins satiriques: la série s’ouvre avec un personnage très digne, très certainement un parlementaire, qui se présente devant la commission d’enquête et qui, d'un chèque à l'autre, développera les procédés douteux dont l’agioteur l’a assailli, chaque fois avec une offre au montant plus élevé. L’ensemble des feuillets est subdivisé en trois séries: «Le chèque-obsession»; «L’art de donner et de recevoir le chèque»; «Variations sur le verbe: toucher le chèque». Au fil des dessins, le suborneur présente des traits caricaturaux du Juif (nez proéminent, etc.), tandis que l’orthographe de certaines notes reproduites sur les talons évoque de manière grotesque l’accent allemand: par ex., au talon du premier chèque, «NB Il vaut ezayer, on tit qu’il est tifficile. Envin on ferra» –on ne peut, à nouveau, que penser au Nucingen de Balzac. Le cliché dont nous publions la reproduction témoigne bien de ce que nous sommes pratiquement aux antipodes de ce qui constitue aujourd'hui le politiquement correct, non seulement s'agissant des Juifs, mais aussi du statut des femmes (le racolage n'aurait rien que de normal)... Ajoutons encore, pour conclure, que le dispositif formel du chèque ouvre la voie, promise à de très vastes développements, de ce qui pourrait prendre la forme d’une petite bande dessinée.<br /></span></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Notes</span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> (1) Jean-Yves Mollier, <i>L’Argent et les lettres. Histoire du capitalisme d’édition, 1880-1920</i>, Paris, Fayard, 1988, notamment p. 64 et suiv. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
(2) Frédéric Barbier, <i>Finance et politique: la dynastie des Fould, XVIIIe-XXe s.,</i> Paris, Armand Colin, 1991.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
(3) Jacques de Reinach épouse le 6 mai 1863 sa cousine Fanny Emden, dont la sœur s’est mariée avec Eduard Elias Kohn (originaire quant à lui de Bohême, Neuwallisdorf, auj. Nová Ves, non loin de Kolin, Rép. tchèque). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><br />Emmanuel Poiré, <i>dit</i> Caran d’Ache, <i>Carnet de chèques par Caran d’Ache</i>, Paris, E. Plon, Nourrit et Cie, [1892 ou 1893], 20 f., oblong à l’italienne, 12 x 28 cm.</span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/">Retour au blog</a> </span><br /></p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-42212950984380384582020-12-24T09:38:00.002+01:002020-12-24T09:38:48.554+01:00Vœux de fin d'année<p> </p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://1.bp.blogspot.com/-xb_VrmIIHLE/X-RTV3wa7SI/AAAAAAAAV9A/JaM8X5gdgDsePwE_pZai-mi-JfXJAhrCwCLcBGAsYHQ/s662/Barque%2B2021.tiff" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="619" data-original-width="662" src="https://1.bp.blogspot.com/-xb_VrmIIHLE/X-RTV3wa7SI/AAAAAAAAV9A/JaM8X5gdgDsePwE_pZai-mi-JfXJAhrCwCLcBGAsYHQ/s16000/Barque%2B2021.tiff" /></a></div><br /><p></p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-46575259968079389592020-12-20T18:19:00.005+01:002020-12-21T08:30:37.210+01:00Nouvelle publication <p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span> <i></i></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><i><a href="https://1.bp.blogspot.com/-LE1tksi7zRo/X9-HE9RQElI/AAAAAAAAV8Y/mXs4FEww3-0ibG_njxCp2zM_fDMIAwmzACLcBGAsYHQ/s1600/Blog%2BLabrouste.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="1600" data-original-width="1066" height="400" src="https://1.bp.blogspot.com/-LE1tksi7zRo/X9-HE9RQElI/AAAAAAAAV8Y/mXs4FEww3-0ibG_njxCp2zM_fDMIAwmzACLcBGAsYHQ/w266-h400/Blog%2BLabrouste.jpg" width="266" /></a></i></div><i>Le Siècle de Labrouste. Un élève, un ami, un maître</i>, <br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
éd. Jean-Philippe Garric, Marc Le Cœur, <br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
Paris, Éditions des Cendres, 2020, <br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
284 p., ill. <br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
ISBN 978-2-86742-297-3<p></p><p style="text-align: left;">Voici les Actes d’un colloque tenu à Paris en 2012, et consacré à «Labrouste et son temps». Il semblera paradoxal à l’historien du livre que les deux réalisations emblématiques de Labrouste, à savoir la Bibliothèque Sainte-Geneviève et la Bibliothèque impériale, ne figurent qu’à l’arrière-plan du présent volume. Mais la théorie des contributions lui permettra d’enrichir sa connaissance de l’architecte en pénétrant des milieux qui lui sont sans doute moins familiers –la villa Médicis, l’atelier, le maître et ceux qui l’entourent, sans oublier l’Institut de France. <br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
Le plan du volume suit, en trois parties, la biographie de Labrouste (1801-1875). D’abord, les années de formation, où l’on retrouvera notamment le volet de la problématique patrimoniale, voire archéologique, entre l’intérêt pour les Étrusques, le travail sur le forum romain et celui sur Paestum. La seconde partie est celle de la carrière: alors que le jeune architecte est attaché à la Commission des monuments historiques, il retrouve la question du patrimoine, à propos notamment de la restauration de la collégiale de Mantes. La dernière partie est consacrée au «maître» et à son héritage. <br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
Nous apprécions tout particulièrement, il va de soi, les passages où les bibliothèques apparaissent, même plus ou moins fugitivement: p. 10 et 141 (la salle de lecture de la BN), p. 29 (les «berceaux métalliques» de Sainte-Geneviève), ou encore p. 177 (les ornements de cette même bibliothèque). À l’automne 1857, et en prélude à ses travaux parisiens, Labrouste passe quelques jours à Londres, pour y découvrir la nouvelle bibliothèque du <i>British Museum</i> (p. 258). Mais nous retrouvons aussi, au passage, des personnalités connues, comme celle de Louis Fould, frère du ministre d’État (Louis Fould et son hôtel, p. 187 et 190) (1). Ajoutons qu'il n'est pas utile de signaler la parfaite venue d'un volume publié par les Éditions des Cendres... mais qu'il n'y a évidemment aucune raison de se priver de ce plaisir.<br /></p><p style="text-align: center;"><u>Sommaire</u><br /></p><p style="text-align: left;">
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
Introduction. Un élève, un ami, un maître, par Jean-Philippe Garric et Marc Le Cœur<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
<u>Les années de formation</u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
De maître à élève: Augustin Nicolas Caristie et Henri Labrouste. Correspondance, 1822-1826, pat Marie-Agnès Gilot<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
Henri Labrouste, l’Étrusque. De l’Antiquité rêvée à l’archéologie, par Natacha Lubtchansky<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
Le progrès vers le primitif: le mémoire de Labrouste sur Paestum en perspective, par Sigrid de Jong<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
Le monument à La Pérouse : Labrouste et le topos d’un tombeau face à la mer, par Jean-Philippe Garric<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
<u>L’œuvre dans son époque</u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
Labrouste et la prison, par Caroline Soppelsa<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
«Que nos constructions conservent le caractère d’étais». Labrouste, architecte attaché à la Commission des monuments historiques, par Corinne Bélier<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
Le monument funéraire comme paradigme du rapport au passé chez Labrouste, par Martin Bressani et Marc Grignon<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
Guillaume Abel Blouet et Labrouste, regards croisés, par Fabienne Doulat<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
«Un art nouveau complet». On Simon Claude Constant-Dufeux’s Project for a Chamber of Deputies, par Ralph Ghoche<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
<u>Labrouste en partage</u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
«Mon cher maître et ami…» Parcours croisés de Labrouste et de ses élèves, par Marc Le Cœur<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
Entre Labrouste et Viollet-le-Duc, Gustave Klotz architecte de l’œuvre Notre-Dame à Strasbourg, par Hervé Doucet<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
Labrouste dans la généalogie des maîtres. Voies divergentes du rationalisme et conflits de mémoire académique dans la rénovation de l’enseignement de l’architecture à la fin du XIXe siècle, par Guy Lambert<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
Le rationalisme des enfants de Labrouste, par Estelle Thibault<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
Chronologie<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
Bibliographie<br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
<i>Index nominum</i> <br /></p><p style="text-align: left;"><u>Note</u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span>
(1) Frédéric Barbier, <i>Finance et politique: la dynastie des Fould, XVIIIe-XXe siècle</i>, Paris, Armand Colin, 1991. <br />
</p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-2797786292509106690.post-41629360353144449262020-12-13T15:58:00.014+01:002020-12-14T08:35:27.666+01:00Une promenade sur la Piazzetta<p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-vh_3TjDwoWc/X9Yolin92uI/AAAAAAAAV7c/esKQTrWpf_MaVm-0B2FR9EhvTj_JBWikwCLcBGAsYHQ/s454/Palazzo%2BBarbarigo%2B2.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="340" data-original-width="454" height="300" src="https://1.bp.blogspot.com/-vh_3TjDwoWc/X9Yolin92uI/AAAAAAAAV7c/esKQTrWpf_MaVm-0B2FR9EhvTj_JBWikwCLcBGAsYHQ/w400-h300/Palazzo%2BBarbarigo%2B2.jpg" width="400" /></a></span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> Que Venise constitue, sur le plan historique, un univers en soi, à bien des égards distinct de la péninsule italienne, nul ne pourra en douter. La future cité des doges naît lorsque l’invasion lombarde détruit Padoue et Aquilée, et repousse nombre de réfugiés vers les lagunes. Les origines de l’État vénitien remontent quant à elles au début du IXe siècle, sous l’autorité théorique de Byzance. Un siècle plus tard, les Vénitiens construisent leur empire adriatique, en occupant les principales «échelles» de la côté dalmate. Encore un siècle, et l’empereur Alexis Commène leur octroie de vastes privilèges commerciaux, leur permettant ainsi d’acquérir la domination économique de la Méditerranée orientale et de l’Égée, plus tard de la mer Noire. Le premier apogée de Venise serait à placer à la fin du XIIIe siècle, quand les institutions de la République se sont définitivement stabilisées: jusqu’en 1797, la ville sera gouvernée par le groupe très restreint de la <i>Signoria</i>, laquelle est composée du Petit Conseil (six conseillers et le doge) et des trois présidents du conseil des Quarante</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">.</span><br />
C<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">e n’est pas le lieu ici de discuter des transformations que subit la République, entre la progressive conquête de la Terre ferme (qui fait de Venise la capitale d’un État), la chute de Constantinople et la poussée ottomane (1453), mais aussi les concurrences nées de la réorientation du négoce à la suite des «Grandes découvertes» et de la montée en puissance de la France et de l’Empire habsbourgeois. Mais nous nous arrêterons encore une fois sur l’urbanisme: à Venise, une seule «rue» principale, le <i>Canale</i> <i>Grande</i>, débouchant sur une «immense place liquide» (1) et structurant tout un réseau de petites «rues-canaux» et de bassins (cliché 1). La place Saint-Marc constitue le cœur de la République, avec la basilique, la tour de l’Horloge, les Procuraties et le campanile; en retrait, la <i>Piazzetta</i> est bordée par le Palais des doges, la Librairie et le <i>bacino</i> de Saint-Marc.</span><br /></p><p>
</p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-tBufyFsYNUs/X9Yo5l-Z9mI/AAAAAAAAV7k/SVmLqJwzBVUwyBYgnSllojgM5FRtZnjFgCLcBGAsYHQ/s454/Palazzo%2B5.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" data-original-height="340" data-original-width="454" height="300" src="https://1.bp.blogspot.com/-tBufyFsYNUs/X9Yo5l-Z9mI/AAAAAAAAV7k/SVmLqJwzBVUwyBYgnSllojgM5FRtZnjFgCLcBGAsYHQ/w400-h300/Palazzo%2B5.jpg" width="400" /></a></span></div><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">La Librairie, précisément. Si Venise bénéficie depuis le XIVe siècle d’un statut très particulier dans le domaine culturel, le fait est à rapporter aux liens très étroits entre la Sérénissime et l’Empire grec d’Orient. En effet, dans la seconde moitié du XIVe siècle, les curiosités des Occidentaux pour l’Antiquité grecque se développent de plus en plus, tandis que le modèle de la bibliothèque privée devient celui d’une institution mise par son propriétaire à la disposition d’un groupe de savants, d’amateurs et d’amis. Pétrarque constitue la première figure sur laquelle s’élaborera la construction intellectuelle de l’Europe moderne. Or Pétrarque, mort en 1374, a prévu de léguer sa collection de manuscrits à la Sérénissime, comme point de départ d’une bibliothèque «publique». Les dispositions initiales du legs ne pourront pas être observées mais, un siècle plus tard, le cardinal Bessarion en reprendra les termes pour créer à Venise le conservatoire d’une civilisation désormais en voie de disparition, la civilisation grecque après la chute de Constantinople. La collection est d’abord abritée au Palais des doges</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">.</span><br />Nous sommes à l’époque de l’architecture antiquisante triomphale: le Florentin Jacopo Sansovino (1486-1570) est nommé en 1529 surintendant des bâtiments de la République, et c’est à lui que sera confiée la charge d’édifier la <i>Libreria Vecchia</i>, dans une situation idéale, sur la <i>Piazetta</i>, face au pôle lui-même du pouvoir, le Palais des Doges (cliché 2). Le projet de bibliothèque date de 1515, mais il n’est mis en œuvre qu’avec retard, les travaux ne commençant qu’en 1537 –et il ne sera achevé que dans la dernière décennie du siècle, avec la mise en place de la balustrade et des trois obélisques au niveau supérieur.</span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Retenons-en quelques grandes lignes: le bâtiment est conçu comme une <i>loggia</i> à un étage, scandée de colonnes (cliché 3). Un escalier monumental à double rampe donne accès au vestibule. Nous sommes dans la perspective <a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/2020/10/une-histoire-descaliers.html" target="_blank">déjà présentée sur ce blog</a>, du passage de l’obscurité à la lumière, symbolique de la montée vers la connaissance par les livres. Le vestibule est dominé par la représentation de la Sagesse par Le Titien (1560), elle-même insérée dans un dispositif en trompe-l’œil. Enfin, c’est la grande salle de bibliothèque, située, selon l’habitude, au premier étage. Elle est éclairée par deux rangées de fenêtres, et devait d’abord être voûtée avec d’être reprise avec un plafond bas à la suite d’un effondrement survenu au cours des travaux (1545).</span></p><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="https://1.bp.blogspot.com/-QDpqGTgFkd0/X9YqWe21ybI/AAAAAAAAV7w/gYNPWxC3Jj0u2rqChd04X-jpGrtzPXZUQCLcBGAsYHQ/s1140/Marciana.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" data-original-height="230" data-original-width="1140" height="130" src="https://1.bp.blogspot.com/-QDpqGTgFkd0/X9YqWe21ybI/AAAAAAAAV7w/gYNPWxC3Jj0u2rqChd04X-jpGrtzPXZUQCLcBGAsYHQ/w640-h130/Marciana.jpg" width="640" /></a></span></div><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le bâtiment est de conception moderne, mais l’aménagement reste traditionnel, avec une allée centrale séparant les alignements de pupitres avec les livres enchaînés. Des armoires sont par ailleurs disposées le long des parois. La décoration picturale présente, sur les parois, deux cycles de portraits de philosophes, par Le Tintoret, Véronèse et un certain nombre d’autres artistes (1562-1572): selon la tradition, la théorie des personnages est ouverte par Platon et Aristote. Au plafond, vingt et un médaillon mettent en scène des allégories mêlant qualités (patience, honneur, etc.) et domaines des activités ou des connaissances humaines (mathématiques, agriculture, etc.). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Le programme bibliothécaire développé à Venise est d’abord un programme politique, qui vise à s’appuyer sur la culture humaniste pour conforter la <i>virtù</i> individuelle et l’assise du bon gouvernement, tout en mettant en scène la gloire de la République. Contrairement à la grande majorité des programmes picturaux conservés dans les bibliothèques du temps, il ne s’agit pas ici d’une personnalité, ni même d’une lignée –comme celle des Piccolomini à Sienne: </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><i>Les bibliothèques riches en livres choisis illustrent le plus les villes bien gouvernées; c’est ce dont les Romains, les Athéniens, et les citoyens d’autres villes anciennes et très florissantes avaient l’habitude. Car en dehors de l’apparence, les bibliothèques font accéder à la pensée judicieuse et à la science, d’où découlent les bonnes mœurs et les autres qualités</i> (2).</span><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> </span><br />
Bien évidemment, au fil du temps, l’augmentation des collections de livres a nécessité de restructurer complètement l’ensemble des bâtiments de ce coin privilégié de la <i>Piazzetta</i>, et la <i>Libreria</i>, devenue <i>Libreria antica</i>, a aujourd’hui une fonction exclusivement muséale. Mais retenons la leçon: en ce début du XVIe siècle, la décision collégiale d'ouvrir une bibliothèque publique, le choix d'un bâtiment indépendant et sa localisation au cœur du pouvoir, autant d'indices qui montrent combien la question du livre sera désormais une question politique.<br /></span><p></p><p></p><p></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Notes</span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(1) Philippe Braunstein, Robert Delort, <i>Venise: portrait historique d’une cité</i>, Paris, Seuil, 1971 («Points», H 4). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">(2) <i>Bene institutas Civitates maxime illustrare ac celebrare solent Bibliothecae delectis voluminibus refertae ; quemadmodum habere consueverant Romae, Athenae aliaeque antiquae et florentissimae Civitates. Nam praeter ornatum, animos quoque ad doctrinam et eruditionem accendunt, ex quibus boni mores aliaeque virtutes provenire solent… </i>(Jacopo Morelli, <i>Operette di Jacopo Morelli, bibliothecario di San Marco</i>, Venezia, Alvisopoli, 1820, t. I, p. 39).</span></p><p><u><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">Bibliographie</span></u><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""> Marino Zorzi, <i>La Libreria di San Marco. Libri, lettori, società nella Venezia dei Dogi</i>, Milano, Mondadori, 1987. </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
Thomas Hirthe, «Zum Programm des Bibliothekssaals der <i>Libreria Marciana</i> in Venedig», dans <i>Ikonographie der Bibliotheken</i>, Wiesbaden, 1992, p. 108-158 («Wolfenbütteler Schriften zur Geschichte des Buchwesens», 17). </span><br />
<span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:="">
La présentation de l’<a href="https://marciana.venezia.sbn.it/la-biblioteca/storia" target="_blank">historique de la Bibliothèque</a> sur le site officiel de celle-ci est particulièrement intéressante et permet d'identifier précisément le détail des éléments <a href="https://marciana.venezia.sbn.it/la-biblioteca/il-patrimonio" target="_blank">de l’architecture et du décor</a>. Nous nous permettons d'y renvoyer, notamment pour toutes les reproductions des peintures. Les clichés 1 et 2 illustrant le présent article ont été pris à l'occasion d'un mémorable colloque d'histoire du livre, tenu à Venise en octobre 2008 (merci à l'organisatrice, le professeur Barbara Marx, de l'université de Dresde!).<br /></span></p><p><span font-variant:="" font-weight:="" helvetica="" left="" normal="" quot="" text-align:=""><a href="http://histoire-du-livre.blogspot.com/" target="_blank">Retour au blog</a> </span><br /></p>Frédéric Barbierhttp://www.blogger.com/profile/15548230557200682568noreply@blogger.com0